Insultes, gifles, crachats… Le rappeur Moha La Squale jugé pour violences sur ses ex-partenaires
« Bébé, je sais, j’ai merdé, c’est Paname et son décolleté. » Dans sa chanson, intitulée Mon chériLe rappeur Moha La Squale semble regretter son comportement envers une petite amie avec laquelle il n’a « pas été courtois ». S’est-il inspiré de la réalité pour écrire ce titre en 2022 ? L’artiste, âgé de 29 ans, est en effet accusé de violences par sept femmes avec lesquelles il a eu des relations. Quatre ans après le début de l’affaire, Mohamed Bellahmed – de son vrai nom – comparaît à partir de ce mardi devant la 14e chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Paris. Le procès doit durer jusqu’à vendredi.
Tout a commencé avec la publication d’un article dans IndiquerEn septembre 2020, la chaîne de télévision américaine avait annoncé que trois ex-partenaires du rappeur avaient déposé plainte contre lui dans un commissariat du IXe arrondissement de Paris. Âgées de 23 à 28 ans, elles disent avoir été victimes de violences de la part du musicien, qui les aurait également séquestrées. L’une d’elles témoigne dans une vidéo publiée sur Instagram. Son récit fait immédiatement écho à ce qu’ont vécu Marine et Anaïs*. Les deux jeunes femmes étaient également en couple avec Mohamed Bellahmed. Et elles ont également décidé de confier leur calvaire à la police.
« Chien de guerre »
Marine entretient une relation intime avec Moha La Squale depuis décembre 2016. Il lui a rapidement confié qu’il était amoureux d’elle. Selon le récit de la victime, il a commencé à se montrer méfiant, agressif, voire envahissant. Leur relation s’est brutalement dégradée. Les coups ont commencé à tomber. La première fois, c’est parce qu’un homme l’avait raccompagnée chez lui après une soirée passée dans un bar. Cette nuit-là, Mohamed Bellahmed la harcèle au téléphone et l’attend dans la rue. Il la pousse contre un meuble et l’insulte. « Chienne de guerre… il faut que tu te fasses soulever, salope, sale pute. »
Les disputes ont continué, a-t-elle poursuivi. Marine affirme avoir été menacée et giflée par son petit ami, qui lui a également tiré les cheveux et craché dessus. Devant la police, elle a décrit un homme instable, violent, jaloux, dangereux, manipulateur, accro à l’herbe, qui instaurait un climat de terreur. En février 2018, elle a eu peur de mourir lorsqu’il l’a étranglée sur le lit, la comparant à « une merde sous sa chaussure ».
La jeune femme raconte un autre épisode qui s’est déroulé lors de vacances en Espagne. Mohamed Bellahmed l’aurait frappée car il était convaincu qu’elle le trompait avec le petit ami de sa cousine. Il lui aurait touché l’entrejambe et lui aurait dit : « Tu vois, tu es mouillée. »
« Il m’a menacé de représailles »
La plaignante a raconté les crises paranoïaques de son petit ami à ses proches qui ont remarqué les traces de coups sur son corps. Parfois, le rappeur regarde dans les poubelles des toilettes pour vérifier qu’elle ne s’est pas rasée pour un autre homme. Il la suit régulièrement dans la rue pour voir où elle va.
Marine veut le quitter. Mais elle a peur. « Il m’a menacée de représailles, d’envoyer des hommes me taillader le visage… ou de me violer dans une cave et il viendrait lui-même graver ‘le Requin’ sur la peau de mon dos », raconte-t-elle aux policiers.
Anaïs a rencontré Moha La Squale en août 2019. L’artiste l’avait abordée dans la rue et l’avait suivie en voiture, insistant pour qu’elle lui donne son numéro. Leur relation a duré à peine un an. Car très vite, le jeune homme a montré son autre facette, raconte-t-elle. En janvier 2020, lors d’un voyage en Thaïlande, le manque de cannabis s’est fait sentir et il a piqué des crises noires. Un soir, il a menacé de la tuer. « Je vais te faire tuer, je vais te fumer. » Deux mois plus tard, le couple partait au Maroc. Cette fois, pas question d’être défoncée au hasch. Mohamed Bellahmed l’a forcée à en transporter dans son vagin pendant le voyage.
« Paranoïa de merde »
De retour en France, la jeune femme a tenté de le quitter. Mais il s’est montré violent et l’a séquestrée pour la forcer à changer d’avis. « Il a verrouillé la porte de sa maison quand je lui ai dit que je voulais partir. Il a mis les clés dans sa poche puis m’a dit : ‘la seule fois où tu sortiras de chez moi, ce sera pour aller en garde à vue et te faire baiser par des clochards, ça va me faire bander’ ». Grâce à l’intervention d’un voisin qui l’a entendue crier, Marine a réussi à s’échapper.
En mai 2020, il s’est introduit de force chez elle, raconte Anaïs. Il l’a poussée sur son lit, lui a enlevé ses vêtements et a tenté de l’étouffer avec un oreiller, en hurlant qu’il allait la tuer, elle et sa mère, violer sa petite amie et tuer son mari. Interrogés par les enquêteurs, les proches et voisins d’Anaïs ont tous confirmé l’avoir entendu crier et l’avoir vu pleurer souvent.
Le rappeur semble avoir mis du temps à saisir la gravité des accusations qui pèsent sur lui. À plusieurs reprises, il n’a pas comparu lors des convocations de la police et des magistrats. Placé en garde à vue le 14 juin 2021, il a reconnu avoir beaucoup trompé et insulté Marine. Mais il jure ne pas l’avoir agressée. Il reconnaît également avoir été violent verbalement avec Anaïs et l’avoir « insultée comme un fou ». Un comportement qu’il attribue à « la paranoïa à propos de la merde ». Mais il nie l’avoir frappée ou étranglée. « Ma cliente n’est pas dans un esprit de vengeance », raconte-t-il. 20 minutes Sarah Beaucamp, qui défend Anaïs, a déclaré : « Elle souhaite simplement être entendue par des professionnels et que justice soit rendue dans le calme. Elle sera là pour parler d’elle, pour raconter les choses difficiles qu’elle a vécues. »
« Conspiration »
L’intéressé s’est défendu en évoquant un « complot » sur le réseau social X, assurant qu’il n’avait « JAMAIS, JAMAIS, levé la main sur une femme ». « Elle ne veut pas lui faire de mal, elle se fiche de ce qui lui arrive », a-t-il expliqué à 20 minutes Me Fabien Guilbaud, avocat de Marine. « Tout ce qu’elle souhaite, c’est que sa parole de victime soit entendue et que la justice reconnaisse qu’elle a subi des violences pendant deux ans, quasiment sans interruption. Elle a hâte que le procès se termine, car il lui est difficile de se replonger dans les faits qu’elle a dû raconter à plusieurs reprises. »
Contacté par 20 minutesL’avocate de Mohamed Bellahmed, Me Elise Arfi, n’a pas répondu à nos sollicitations.
* Les noms ont été modifiés