Immigration, Etat de droit…Bruno Retailleau parle encore comme le RN (et la Macronie le découvre)
ALEX MARTIN / AFP
Bruno Retailleau, le 28 septembre 2024.
POLITIQUE – Qui a dit : « Je pense qu’une société multiculturelle comporte le risque de devenir également une société multiraciste » ? Non, il ne s’agit pas d’un élu d’extrême droite mais du ministre LR de l’Intérieur Bruno Retailleau. Dimanche 29 septembre, les déclarations du numéro 4 du gouvernement ont choqué la gauche, au sein du NFP mais pas seulement.
Dans une interview avec Journal du dimanche puis sur LCI, le nouveau ministre a réitéré plusieurs de ses positions. Sur l’immigration, d’une part, « pas une chance » selon lui. Il a dit notamment « regretté » qu’un référendum ne peut être organisé et plaide pour une révision de la Constitution dans ce sens. Bruno Retailleau a également une nouvelle fois exprimé ses réserves sur un « société multiculturelle »OMS « comporte le risque de devenir également une société multiraciste. Je pèse mes mots » a-t-il déclaré sur LCI. Interrogé sur des commentaires antérieurs dans lesquels il jugeait qu’un « société multiculturelle » était un « impasse » Et « conflictuel »le nouveau ministre LR a répondu : « Je le pense toujours ».
D’un autre côté, Bruno Retailleau minimise également la notion d’État de droit : « L’État de droit n’est ni intangible ni sacré. C’est un ensemble de règles, une hiérarchie de normes, un contrôle judiciaire, une séparation des pouvoirs. Mais la source de l’État de droit, c’est la démocratie, c’est le peuple souverain. il a déclaré dans le JDD. Le concept juridique de l’État de droit repose, entre autres, sur le concept d’égalité des citoyens devant la loi. Un socle démocratique que certaines propositions soutenues par Bruno Retailleau – sur l’immigration par exemple – risquent de mettre à mal, comme l’a indiqué le Conseil constitutionnel en censurant une grande partie de la loi sur l’immigration en janvier 2024.
Yaël Braun-Pivet « assez inquiète », Thevenot alerte
Sans surprise, les positions de Bruno Retailleau ont suscité un tollé à gauche – « Quelle serait la différence avec un ministre de l’Intérieur RN ? »a demandé le chef des députés PS Boris Vallaud.
Mais au-delà du NFP, plusieurs personnalités du camp présidentiel ont également exprimé leurs craintes, à l’image de la présidente de l’Assemblée nationale Renaissance Yaël Braun-Pivet, qui a déclaré qu’elle « assez inquiet » après cette sortie. « L’État de droit, c’est ce qui protège nos citoyens, c’est l’égalité de tous devant la loi, c’est la hiérarchie des normes. Quand la situation est tendue, il ne faut pas remettre en cause l’État de droit, c’est ce qui protège notre démocratie »a-t-elle déclaré sur France 2 ce lundi 30 septembre. « Je pense que l’État de droit est quelque chose de sacré. Quand on est aux commandes, il faut avoir des mots apaisants » et non « source de division »» déclare l’ancienne Première ministre Élisabeth Borne sur RMC, sur le même ton que l’ancien ministre Clément Beaune.
Prisca Thévenot, ancienne porte-parole du gouvernement, s’est émue des déclarations sur l’immigration. » Nous pouvons parler de l’immigration sans dénigrer les Français qui en sont issus. Notre langage nous permet de faire la différence entre l’immigration illégale et l’immigration légale. Le premier est de combattre, le second de contrôler. Ne pas faire la distinction prépare le terrain pour le RN »» a-t-elle fustigé X. Même le prédécesseur de Bruno Retailleau à Beauvau, connu pour défendre une ligne ferme, a également pris ses distances : « L’immigration légale est bien sûr une opportunité pour notre pays. » a déclaré Gérald Darmanin.
Grâce à la nomination de Bruno Retailleau dans un gouvernement dirigé par un Premier ministre LR, le camp présidentiel est en train d’être étranglé. Mais le discours du nouveau « premier flic de France » n’a rien de nouveau ni de surprenant. Lors de l’examen de la loi immigration, le chef des sénateurs LR défendait déjà des mesures copiées-collées de celles du Rassemblement national. Et au-delà de Bruno Retailleau, ce sont les cadres républicains dans leur ensemble qui ont accru leurs emprunts auprès de l’extrême droite ces dernières années.
En pleine campagne présidentielle, Valérie Pécresse parlait du « papier français » et le concept de « gros remplacement »une théorie infondée mais qui constitue la base de l’extrême droite européenne. Enfin, impossible de ne pas évoquer Éric Ciotti, ex-président de LR et qui est allé jusqu’à nouer une alliance avec le Rassemblement national lors des élections législatives de juin. Autant de signes (flagrants) de la proximité entre l’ex-UMP et l’extrême droite… que la Macronie a choisi de ne pas voir, au point de privilégier l’alliance LR dans le cadre de la constitution du gouvernement Barnier. Un peu tard pour s’en rendre compte.
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