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Île de Pâques : une étude démystifie le mythe de l’effondrement de Rapa Nui

Une théorie a longtemps présenté l’Île de Pâques (Rapa Nui) comme l’exemple parfait de l’homme compromettant sa survie en détruisant son environnement. Cela suggère que l’île isolée du Pacifique Sud, située à environ 3 700 kilomètres à l’ouest de la côte chilienne, était autrefois peuplée d’une importante population qui s’est effondrée à cause d’un « écocide » ; elle aurait vécu au-dessus de ses moyens et épuisé les ressources des lieux, notamment, pour y déplacer plus d’un millier de statues de basalte (moaï) sur leurs terrasses en pierre (ahu).

Une nouvelle étude, publiée dans Science Advances le 21 juin 2024, réfute cependant cette idée avancée par le géographe Jared Diamond (Effondrement, 2004). En utilisant l’intelligence artificielle pour analyser les données satellite des « jardins de pierre », la forme d’agriculture de subsistance des insulaires, les chercheurs ont déterminé que l’île « n’a probablement jamais hébergé beaucoup plus que les quelque 3 000 personnes rencontrées par les explorateurs européens en 1722 »écrit dans The Conversation Carl Lipo, professeur d’anthropologie aux universités de Binghamton et de l’État de New York (États-Unis) et co-auteur de cette récente recherche.

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Des « jardins de pierre » pour répondre aux besoins

Les sols de Rapa Nui n’ont jamais été très fertiles, privés de nutriments essentiels (potassium, phosphore, azote) en raison de la nature volcanique de l’île et de ses embruns salés océaniques. Des contraintes auxquelles ses premiers habitants ont dû s’adapter.

Les sites archéologiques identifiés sur ses terres montrent qu’ils ont développé différents types d’agriculture, dont certaines faisaient appel de façon remarquable aux pierres volcaniques : « jardins de pierre » ou « jardins pavés ». Utilisée par les Maoris de Nouvelle-Zélande, les peuples autochtones du sud-ouest américain ou encore les agriculteurs des Pays-Bas, la technique consiste à briser la roche mère en très petits morceaux et à les mélanger à la terre pour l’améliorer. niveaux de nutriments et prévenir l’érosion.

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Dans les anciens jardins de Rapa Nui étaient cultivés du taro et de l’igname violette, mais surtout de nombreuses variétés de patates douces. «(Ces) parcelles de cultures extensives (…) se trouvent sur toute l’île et auraient fourni une source alimentaire cruciale complétée par les ressources marines», explique Carl Lipo. La véritable étendue de la surface qu’ils couvraient resta cependant longtemps un mystère. Les premiers Européens arrivés sur place estimaient qu’ils occupaient 10 % de l’île. D’autres études plus récentes affirment qu’ils auraient pu nourrir jusqu’à 16 000 personnes.

Une entreprise de 3.000 personnes « à son apogée »

Les travaux des archéologues ont révélé que les zones identifiées comme des jardins de pierre ne l’étaient pas en réalité. De nouvelles fouilles ont donc été réalisées, couplées à des images satellitaires infrarouges à ondes courtes, utiles pour distinguer des matériaux apparemment identiques à l’œil nu. Le développement de modèles d’apprentissage automatique (apprentissage automatique), a également permis aux scientifiques de détecter les différences les plus subtiles « à plusieurs reprises et systématiquement »pour qu’ils puissent « examiner rapidement presque toute l’île sans passer des années à faire de la cartographie sur le terrain »c’est précisé.

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Ces analyses ont considérablement réduit la superficie pouvant être associée aux « jardins de pierre », d’une étendue de 4,3 à 21,1 kilomètres carrés à 0,76 kilomètres carrés – sur les 164 kilomètres carrés de l’île. À partir de cette base révisée, les auteurs ont calculé que cette forme de culture n’aurait fait vivre qu’une population d’environ 3 900 personnes au maximum.

« Ainsi, contrairement au récit de l’écocide, la population présente à l’arrivée des Européens n’était pas les vestiges de la société Rapa Nui, mais probablement la société à son apogée, vivant à des niveaux durables sur l’île. »conclut avec le Guardian Dylan Davis, chercheur postdoctoral à la Climate School de l’Université de Columbia (États-Unis) et co-auteur de l’étude.

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Avertissement ou source d’inspiration ?

Il faut dire que les premiers Européens ont été surpris – et c’est peu dire – par les figures colossales construites à Rapa Nui : son moaï peut atteindre la hauteur d’un immeuble de trois étages et peser jusqu’à 70 tonnes. On a donc rapidement supposé que des dizaines de milliers de personnes devaient avoir été impliquées dans la sculpture et le transport de telles statues.

C’est ainsi qu’est née « l’histoire de l’effondrement », arguant qu’un tel travail n’aurait pas été durable et aurait conduit à des pénuries alimentaires, des famines, des guerres et même du cannibalisme, expliquant finalement la petite population rencontrée par les Européens au XVIIIe siècle.

Cette théorie est restée ancrée dans la littérature académique, et n’est pas sans conséquences. « Malgré les preuves archéologiques du contraire, il n’est pas rare, par exemple, que des écologistes utilisent Rapa Nui comme cas d’étude de démographies dites malthusiennes (selon les théories de Thomas Malthus, ndlr) où la population est censée ont atteint un pic massif qui a momentanément submergé les ressources de l’île et déclenché une catastrophe écologique., regrette Carl Lipo. Mais depuis au moins une décennie, les recherches contestant cette idée d’écocide dû à la croissance démographique et à une mauvaise gestion des paysages se multiplient.

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Les auteurs de l’étude soulignent cependant l’importance de se préoccuper de l’exploitation potentielle des ressources naturelles. « Notre compréhension croissante de l’île a des implications cruciales pour l’avenir. »développe l’anthropologue. « En apprenant à prospérer dans un environnement limité, la société peut adopter les stratégies utilisées par les gens du passé », à l’image des ingénieux « jardins de pierre » aménagés par les insulaires. Il ajoute :

En fin de compte, l’histoire de Rapa Nui n’est pas un récit édifiant, mais une source d’inspiration qui pourrait être essentielle pour l’avenir de l’humanité.

Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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