« Il y a des indigènes, mais c’est surtout une foire commerciale »
28 octobre 2024 à 15h53
Mis à jour le 28 octobre 2024 à 23h06
Temps de lecture : 5 minutes
Cali (Colombie), rapport
Pas de doute, Cali vit au rythme de COP16. Au palais des congrès, où se tiennent depuis le 21 octobre les négociations mondiales sur la biodiversité, à 10 km du centre-ville, mais aussi le long du Bulevar del Río, au cœur de la ville colombienne. Là, dans le « zone verte »l’espace ouvert au public dédié à « participation de la société civile »plus de 40 000 personnes ont défilé au cours des cinq premiers jours, selon le ministre de l’Environnement et président du Parlement. FLICSusana Mohammed.
Pendant que ce dernier fait le point « positif » Durant la première semaine de négociations, la ville a mis les couleurs de l’événement. Difficile de marcher quelques mètres sans apercevoir la fleur multicolore d’Inírida, le logo de l’événement, placardé partout dans la ville, ou des publicités officielles vantant la biodiversité de la région.
Sensibiliser à la conservation de la biodiversité
Si ce 16e Si ce sommet doit notamment examiner les progrès vers les objectifs ambitieux fixés lors de la précédente édition et aborder le partage juste et équitable des bienfaits de la nature, le moment est venu de sensibiliser les centres-villes. Des centaines de cabanes en bois abritent des artisans, des activités ludiques comme l’immersion dans la forêt amazonienne, ainsi que des scènes où se relaient conférenciers et artistes.
Des centaines de bénévoles guident les visiteurs à travers cet espace extérieur de 350 000 m22. Parmi eux, six étudiants parcourent la zone verte pour sensibiliser les visiteurs au tri des déchets. « Nous informons les gens et participons à ce grand événement »explique fièrement Karen, casquette COP16 noir vissé sur la tête. Une enquête réalisée par le Centre National de Conseil et le Ministère de l’Environnement révèle que les Colombiens considèrent la réunion comme une occasion unique de sensibiliser à la conservation de la biodiversité et qu’ils souhaitent agir pour la protéger.
L’omniprésence des organisations de peuples autochtones dans les stands est frappante. La Garde nationale indigène, voix de 120 peuples indigènes colombiens, vend des produits issus de la culture artisanale de la canne à sucre.
« Nous avons la chance d’être à la fois aux côtés des commerçants dans notre combat pour la reconnaissance de nos droits, mais aussi ici, de montrer aux visiteurs qui nous sommes et l’autre face du territoire colombien.explique Senobia Largo, qui tient le stand. Notre mission est de conserver et de protéger la vie, quelle que soit sa forme. »
« Un salon pour les étrangers »
L’implication dans le COP16 de ces peuples et communautés locales était l’un des engagements clés de la ministre Susana Muhamad. La création d’un organe subsidiaire leur donnant une voix distincte à chaque conférence sur la biodiversité fait également partie des discussions du sommet mondial.
Abondamment utilisée par le ministre et par le président Gustavo Petro, l’expression « FLIC du peuple » (« FLIC du peuple »), semble ici logique. Certains, comme Catalina Toro Pérez, sont plus sceptiques : « Certes, il y a beaucoup d’autochtones. Mais cela ressemble plus à un salon pour étrangers, qui pensent sûrement que les droits des peuples indigènes sont ici défendus. »dénonce ce professeur de sciences politiques et auteur d’une thèse sur la politique de protection de la biodiversité en Colombie.
Et d’ajouter : « Ils ne sont pas assis à la table des négociations avec les grands pays qui détiennent la majorité des brevets issus des ressources des pays du Sud. »
Marchandisation de la nature
Le professeur dit qu’elle veut « construire une réflexion alternative à la FLIC officiel sur l’écologie des pauvres versus l’écologie des riches ». Elle fait partie d’un comité qui organise un événement parallèle à Cali les 26 et 27 octobre, le « FLIC critique »pour dénoncer la marchandisation de la nature.
Tout comme Anderson Betancurt, membre du même comité, venu en zone verte pour exiger l’abandon d’un projet de base militaire sur Gorgona, une île à 28 km de la côte, à l’ouest de Cali, qui menacerait « biodiversité et faune marine ». Son camarade de combat plaisante : « Nous ne pouvons pas appeler à la « paix avec la nature » (le slogan du COP16), et transformer une île et un parc naturel en projet militaire. »
Haidther, membre d’une organisation de jeunesse colombienne qui mène des projets socio-environnementaux, a choisi ce jour-là de quitter le bâtiment des négociations pour la zone verte. « Le thème du jour FLICil s’agit des « peuples et communautés autochtones ». Je ne me voyais pas ailleurs qu’ici, avec les citoyens. Cette journée doit favoriser un espace commun. »
A la sortie de la zone verte, une mère et ses enfants tiennent dans leurs mains des bouquets de fleurs rougeâtres en forme d’étoile. L’Inírida, cette fleur endémique devenue l’emblème de COP16aussi appelée fleur éternelle car elle ne se flétrit pas et garde la même structure originale en séchant. Un symbole inspirant de résilience pour faire face au désastre climatique à venir.
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