L’entraîneur des Bleus a justifié ses choix et fait le point avant de défier les Pumas vendredi au Stade de France.
Digérer l’exploit face aux All Blacks
« C’était une grande communion avec le Stade de France. Nous avons retrouvé des sensations très particulières que seuls ces moments, ces matchs, ce stade et ce public nous permettent de vivre. On l’a vraiment ressenti durant la fin du match et l’heure qui a suivi. Et même tout au long du match, le Stade de France a été un supporter incroyablement formidable qui nous a donné beaucoup d’énergie. Nous avons besoin de cette chaleur si particulière qui nous a aidé dans le chaos pour maintenir notre rugby et arracher cette victoire. On a aussi ressenti beaucoup de soutiens à distance : la famille du rugby, la famille du sport français, la famille qui aime voir jouer l’équipe de France. On a vraiment senti une grande, grande présence. On a aussi vu les audiences de TF1. Cela nous a vraiment porté et c’est quelque chose qui nous touche et pour lequel nous jouons. Il y a vraiment une signification très particulière autour de notre engagement. Quand on bat les All Blacks, c’est toujours très sympa. C’était du bonheur, de la joie. Nous étions heureux, comme nous l’avons souvent été. Et cela nous suffisait, sachant que nous avions rendez-vous. Une rencontre avec l’Argentine ce vendredi. Et nous savions que nous ne pouvions pas perdre de temps à nous préparer.
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Six jours pour passer en Argentine
« Ce n’est pas un cadeau de nous faire jouer six jours après le match des All Blacks. On sait que contre ces équipes, on a besoin d’une semaine pour récupérer, mais on le savait avant, on était prévenu, on avait cet agenda, on avait cette vision. C’est pour cela qu’il y a des rotations. C’est pour ça qu’il y a aussi ce groupe qui bouge un peu mais qui a aussi besoin de cohérence. Nous avions une vision très claire et les six jours de préparation sont en cours. Cela a commencé après le match, qui était vraiment convivial et apaisé. Et ça a continué avec ces trois jours de travail. Mardi, le seul entraînement de la semaine s’est déroulé en deux séances, matin et après-midi, enfin de nuit et sous la pluie. C’était très « difficile », mais nous avons vraiment aimé ça. Et depuis, notre rythme est plus doux, plus calme, ce qui nous amène au Stade de France, vendredi, pour cette dernière rencontre.
Grégory Alldritt est un capitaine, un leader et un joueur exemplaire que tous les joueurs veulent suivre. Et ça le restera
Fabien Galthié
Laissez Alldritt se reposer
« Pour certains, il y a régénération, récupération. Et puis, pour d’autres, la compétition. Il y a donc ce match, qui est le dernier match de l’année. Et puis, il y a une vision qui est le Tournoi en 2025. Avec un voyage en Irlande et un autre en Angleterre. Il y a aussi une vision pour 2025 puis pour 2027. Et donc, dans cette vision, dans ce chemin, nous avons une vision très claire du potentiel qu’il faut à la fois développer et régénérer. Il faut que je parle de Grégory Alldritt, il a participé aux deux victoires contre le Japon et la Nouvelle-Zélande. C’est un capitaine, un leader, un joueur exemplaire que tous les joueurs veulent suivre. Et cela le restera. Il y a une émulation, il y a une modification de la composition des équipes. Il n’y a aucune controverse à ce sujet. Il n’y a pas non plus de polémique autour de Mathieu Jalibert. Mathieu avait besoin de se régénérer. Je discute avec lui, nous discutons avec lui. Je trouve dommage l’amalgame entre les propos tenus à l’égard d’une équipe qui va à un match et qui a besoin de mots forts et les joueurs du groupe de France – dont il fait partie – qui ont d’autres besoins que nous soutenons et que je parler. »
Les joueurs « premium » épargnés
«C’est toujours un sujet. On essaie d’accompagner les joueurs, de partager avec eux, avec leur manager de club, avec leur préparateur physique. Nous nous déplaçons dans les clubs, nous partageons toutes les données dont nous disposons sur les performances des joueurs. On a un championnat de France qui est ce qu’il est, qui est magnifique. Combiné avec la Coupe d’Europe, qui fait une saison de 26, plus trois matches de phase finale, cela fait 29, plus dix matches de Coupe d’Europe, nous en sommes presque à 40. Nous travaillons avec notre écosystème, et nous comprenons les contraintes des clubs, qui ont leurs meilleurs joueurs et qui les paient. En face, on affronte par exemple les All Blacks qui ont disputé environ 12 matches, 14 matches avec leur équipe nationale, et 10 matches avec leur province. C’est pareil pour les Sud-Africains… Je peux partager des informations avec vous, mais je ne veux vraiment pas interférer. Nous travaillons avec notre écosystème, nous en sommes très heureux, nous félicitons les clubs de nous permettre d’avoir des joueurs de cette qualité, de les aider à se développer.
Barré à l’arrière plutôt que Buros
« Pour être clair, il s’agit d’un forfait de Romain Buros. Il était sur la feuille d’équipe, donc il s’est entraîné avec nous hier (mardi). Il ne s’est pas complètement remis d’une béquille de cuisse. Et il était si honnête avec nous. Hier soir, après l’entraînement, il a dit : « Je ne suis pas sûr d’être à 100%. » Nous ne pouvions pas attendre jusqu’à jeudi. Il fallait prendre une décision. Et d’ailleurs, c’est Romain qui l’a pris. Je tiens donc à saluer le courage, l’honnêteté et la franchise de Romain concernant cette décision. Envers lui et envers nous. Et Léo Barré est prêt.
L’essor de Bielle-Biarrey
« Il est en train de devenir un joueur de classe mondiale, point final. Il ne perd pas de temps, il comprend tout. Et il a un potentiel et un talent incroyables. Il devient un joueur de classe mondiale. Il en est peut-être déjà un. Même s’il est très jeune. Et il apporte beaucoup à l’équipe de France. Je voudrais aussi parler de Georges-Henri Colombe. Il va plus lentement que lui, mais ce qu’il a fait contre les All Black, je pense qu’il faut en parler, de sa performance. Vous connaissez le contexte, il était malade. Il n’a jamais joué plus de 70 minutes, que ce soit en club ou en équipe de France. Là, contre les All Black, il a joué 70 minutes ! Mais il les a fait, si on y regarde bien, avec une présence particulière de ses coéquipiers autour de lui. Les joueurs savaient que pour Georges-Henri, c’était l’Himalaya. C’était un défi. C’était le précipice. C’était un défi incroyable. Il était accompagné de tous les joueurs qui allaient le chercher et l’encourager. Comme symbole, c’est lui qui bloque la dernière action du match. C’est aussi un joueur qui se révèle. En difficulté, c’est le poste le plus difficile du rugby.
Les équipes championnes du monde comptent environ 60 sélections, 50 sélections. Peut-être qu’avec l’écosystème dans lequel nous vivons, ce n’est pas possible
Fabien Galthié
Entretenir l’émulation au sein des Bleus
« Mon souhait, c’est qu’il y ait une émulation très très forte, et plus on aura une émulation forte, plus l’équipe de France sera forte. Malheureusement, nous avons trop de blessés. Nous jouons avec environ un tiers de l’équipe de France potentielle qui est blessé. Nous avons malheureusement trop de blessés pour créer encore plus d’émulation. Mais il faut, avec cette vision à trois ans, développer le potentiel qui le mérite et qui se dessine. Ce qui est important, c’est cette vision déjà pour 2025 avec le Tournoi, puis pour la prochaine Coupe du Monde. Ces rassemblements de 42 joueurs visent avant tout à créer le groupe France. Il y a de nouveaux joueurs qui nous ont rejoint. Je sais que tu aimes les chiffres. Nous verrons. En tout cas, c’est sûr que si on regarde les compositions des équipes qui sont championnes du monde, elles ont environ 60 sélections, 50 sélections. Ils ont une forte expérience collective. Il s’avère que c’est une voie que nous avons empruntée et, peut-être qu’avec l’écosystème dans lequel nous vivons, ce n’est pas possible. Le seul joueur aujourd’hui de notre équipe qui compte de nombreuses sélections est Gaël Fickou (92 sélections), qui a 30 ans. Ce n’est peut-être pas possible. Peut-être que cette ambition que nous avions n’est pas réalisable… Peut-être qu’il faudra faire différemment pour être champion du monde en 2027. Nous ferons différemment, cela s’adaptera à notre écosystème.
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Son point de vue sur les Pumas
« C’est une équipe qui réalise une excellente saison. Je pense qu’ils sont déçus du résultat final du week-end dernier en Irlande (défaite 22-19). C’est une équipe qui n’a pas peur. C’est une équipe composée de grands joueurs. Des joueurs qui voyagent bien puisque leur championnat est un championnat amateur local et qu’ils s’adaptent en permanence à l’écosystème mondial du rugby. Ils ont leurs meilleurs joueurs qui vont jouer en Italie, qui vont jouer en France. Il y a beaucoup de joueurs qui jouent en France, qui jouent au Royaume-Uni. Ils ont des joueurs qui sont toujours dans le pays. Ils développent une équipe de 7 qui a longtemps été la meilleure du circuit mondial, qui était potentiellement une équipe capable de remporter le titre olympique après deux saisons incroyables. C’est un rugby très intelligent et qui est au contact des meilleures nations du monde. Merci aux Quatre Nations (Championnat de Rugby, NDLR) et grâce au championnat d’Europe, c’est une équipe très difficile à affronter.