« Il faut absolument éviter d’en manger »
Par
Martin Leduc
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« Toutes les boîtes de thon sont contaminées par du mercure. Tous», prévient Julie Guterman,actu.fr. Elle est l’auteur de Poison dans le poissonune étude choc sur la teneur en métaux lourds du poisson le plus consommé par les Français, réalisée pour l’organisation non gouvernementale Bloom.
On le mange dans les salades, dans les sandwichs, les quiches, les gâteaux, dans les pizzas. Et comme le dénonce Julie Guterman, c’est probablement un nouveau scandale sanitaire qui s’ouvre en France : le poisson le plus consommé en Europe est aussi l’un des plus contaminés au mercure. « En consommant une seule boîte, on dépasse le taux recommandé par les autorités sanitaires », explique-t-elle.
Comment le mercure, véritable poison, peut-il se retrouver dans les poissons que nous mangeons ?
Pour faire simple, la plupart des poissons sont contaminés par ce métal lourd, présent en masse dans les océans, notamment à cause de l’homme. Sauf que le thon est très haut dans la chaîne alimentaire, et qu’en mangeant du poisson, le mercure s’accumule dans sa chair.
« L’étude aurait pu aussi porter sur les requins, ou l’espadon, qui sont fortement contaminés. Mais on consomme beaucoup moins en Europe», constate Julie Guterman. Quoi qu’il en soit, le thon est ensuite pêché, et il arrive dans nos assiettes. Aussi simple que ça.
« Comme nous savions que le mercure était présent en grande quantité dans ces poissons, nous avons drastiquement augmenté le seuil d’acceptabilité du mercure dans le thon, afin qu’il puisse être vendu légalement », résume l’auteur de l’enquête.
En d’autres termes, le seuil de dangerosité n’a pas été fixé dans le but de protéger la santé humaine mais uniquement les intérêts financiers de l’industrie thonière.
Selon l’étude, « ce lobbying cynique a abouti à la fixation d’un seuil de mercure « acceptable » trois fois plus élevé pour le thon que pour d’autres espèces de poissons comme le cabillaud, sans qu’il n’y ait la moindre justification sanitaire pour un seuil différencié ».
Et malgré cela, certaines boîtes de thon vendues en Europe, et même en France, dépassent facilement la dose autorisée. « Nous avons trouvé du thon de la marque Petit Navire dans un Carrefour City à Paris dont la chair était contaminée 13 fois plus qu’elle n’aurait dû », s’étrangle le chercheur.
Mercure, un véritable poison
« L’inhalation de vapeurs de mercure peut avoir des effets nocifs sur les systèmes nerveux, digestif et immunitaire, ainsi que sur les poumons et les reins, et peut être mortelle », note l’Organisation mondiale de la santé sur son site Internet. . « Les sels de mercure inorganiques sont corrosifs pour la peau, les yeux et le tractus gastro-intestinal, et peuvent être toxiques pour les reins s’ils sont ingérés. » D’autre part, « troubles neurologiques et comportementaux peut être observée après exposition à différents composés du mercure par inhalation, ingestion ou contact cutané ». L’OMS évoque des symptômes graves : tremblements, insomnie, perte de mémoire, effets neuromusculaires, maux de tête et dysfonctionnements moteurs et cognitifs. Enfin, un Une surveillance accrue doit être observée chez les femmes enceintes : « Lorsqu’une personne enceinte consomme du thon, le mercure que contient le thon passe par le cordon ombilical et se loge dans le cerveau du fœtus. Mettre un métal lourd dans le cerveau d’un fœtus est extrêmement dangereux : » de nombreuses études montrent des déclins cognitifs : baisse de QI, plus de troubles de l’attention, de la motricité et de la coordination », énumère Julie Guterman.
Quelles marques sont concernées ?
Pour les besoins de l’enquête, 148 caisses ont été testées. actu.fr a pu consulter la liste exhaustive. Il apparaît, comme mentionné précédemment, que tous sont contaminés. Certains, plus que d’autres.
Pour la France, les tests ont été réalisés à Paris, Marseille et Lyon dans les magasins Lidl et Carrefour. Les marques Nixe, Petit Navire, Carrefour, Chancerelle, Reflets de France et Maayane sont citées. Ce sont les cartons Petit Navire qui ont révélé les taux de mercure les plus élevés, avec 1,87, 1,94 et jusqu’à 3,85 mg/kg ! Pour rappel, le taux autorisé est normalement de 0,3 mg/kg.
« Attention : nous avons analysé 30 cartons en France, et avec 30 échantillons, il est très difficile de dire qu’une marque est une bonne élève. S’il n’est pas cité, ce n’est pas forcément parce qu’il est bon. L’inverse fonctionne également. Peut-être que Little Ship n’a pas eu de chance. Nous ne voulons pas tirer de conclusions statistiques», reconnaît Julie Guterman.
« L’enjeu de nos tests est avant tout de montrer que la contamination est partout », poursuit-elle.
Alors, faut-il arrêter de manger du thon ?
L’enquête révèle donc que 100 % des boîtes de thon actuellement vendues sont contaminées par du mercure. Une raison qui pourrait suffire à arrêter d’en consommer. Ce que recommande Julie Guterman.
Encore faut-il différencier : même si le poisson frais est également concerné, c’est le poisson en conserve qui risque le plus d’être fortement chargé en mercure. Le poisson frais se mange mieux cru. « En boîte, il est précuit, donc sa masse diminue. Mais le taux de mercure reste le même », en déduit-elle.
La réponse du Petit Navire
Contacté par actu.frla marque Petit Navire recherchée réagir aux accusations auxquelles elle fait faceassurant, malgré les résultats de l’enquête de Bloom, que « la consommation des produits Petit Navire est parfaitement sûre pour les consommateurs ». La marque représentée par un petit bateau certifie assurer « que tous nos produits sont conformes à la réglementation française et européenne en vigueur. Les autorités de régulation et les organismes scientifiques d’évaluation des risques comme l’EFSA, établissent des règles de sécurité sanitaire strictes pour protéger la santé des consommateurs que nous respectons avec la plus grande rigueur ». Insistant sur sa « vigilance continue quant au strict respect des normes », Petit Navire affirme également avoir , au cours des trois dernières années, « a effectué 270 contrôles. Les résultats de ces contrôles n’ont jamais révélé des taux de mercure supérieurs aux normes européennes en vigueur et se situent en moyenne entre 0,2 et 0,3 mg/kg, soit 70 à 80 % de moins que la limite autorisée.
Cela dit, « tant que les pouvoirs publics et les marques ne seront pas en mesure de nous assurer que le thon que nous consommons ne dépasse pas les niveaux de mercure, il faudra, oui, éviter absolument le thon. Qu’ils soient frais ou en conserve», prévient le chercheur.
Une pétition en ce sens est également en ligne sur le site de l’ONG Bloom.
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