Il était une fois en Amérique

Les films racontent l’histoire des Etats-Unis au Festival du cinéma américain de Deauville, où « In the Summers » a reçu le Grand Prix de la 50e édition, et où Francis Ford Coppola et Natalie Portman ont reçu des standing ovations ces derniers jours.

En ouverture du 50e Festival du cinéma américain de Deauville, Camélia Jordana a interprété la chanson « Un homme et une femme », en hommage à Anouk Aimée. Chaque soir avant les projections, une publicité Chanel était diffusée, mettant en scène Brad Pitt et Penelope Cruz dans un mini-remake du film de Claude Lelouch. Logiquement, à quelques mètres des planches et de la plage où il tournait, le cinéaste français a clôturé le festival samedi soir avec son 51e film, « Finalement » (sortie le 13 novembre), avec Kad Merad dans le rôle du trompettiste et une musique composée par Ibrahim Maalouf (qui a été écarté du jury du festival). « Tout ce qui nous arrive est pour notre bien », promet cette histoire qui parle de « santé, d’amour, d’amitié, de famille et d’argent ».

La veille, Claude Lelouch était déjà sur scène, parmi une dizaine d’anciens présidents du jury du festival normand, Costa-Gavras, Christophe Honoré, Jean-Jacques Annaud, Pierre Lescure, Guillaume Canet, Audrey Dana, Mélanie Thierry, Clémence Poésy, Elodie Bouchez, Anne Berest, Rebecca Zlotowsky… venus célébrer ce 50e anniversaire.

« Deux amis sont devenus amants »

L’un des moments les plus mémorables de la soirée a été la superbe standing ovation du public au légendaire réalisateur Francis Ford Coppola (« Le Parrain », « Apocalypse Now »…). « J’ai beaucoup de bons souvenirs personnels ici », confiait le vieux réalisateur, avant la projection de sa nouvelle dinguerie, « Megalopolis » (sortie le 25 septembre), une spectaculaire fable de science-fiction. Coppola racontait comment, il y a 62 ans, dans un hôtel voisin, « deux amis sont devenus amants », et c’est ainsi que débuta son histoire avec Eleanor, sa femme et proche collaboratrice, décédée en avril.

Michael Douglas, qui a lui aussi des « souvenirs personnels » de Deauville, était présent lors de l’ouverture, et Natalie Portman était présente lors de la cérémonie de clôture, pour recevoir un hommage d’Isabelle Adjani, avant la révélation du palmarès, dont le jury était présidé cette année par l’acteur Benoît Magimel. Déjà primé à Sundance, « In the summers » d’Alessandra Lacorazza Samudio a remporté le Grand Prix et le Prix de la Révélation ; ce premier film sensible sur la relation père-fille raconte les visites estivales de deux filles à leur père « aimant et téméraire » mais aussi très dépendant.

« Les choix ont des conséquences et déterminent notre avenir », déclare le réalisateur au générique de « The Knife » de Nnamdi Asomugha, lauréat du Prix du Jury ; également acteur principal de ce récit stressant, le réalisateur a filmé « une famille ordinaire dans des circonstances extraordinaires, plongée d’emblée dans un système biaisé », lors d’une nuit perturbée par l’intrusion d’une inconnue dans leur foyer. Ému par un récit tragique sur l’immigration, le public de Deauville a décerné son prix à « The Stranger’s Case » de Brandt Andersen, avec Omar Sy dans le rôle d’un salaud. « Hollywood pense que vous ne voulez pas voir de films sur les réfugiés », a déclaré le réalisateur, qui n’a pas encore trouvé de distributeur en France.

Racisme, violence, immigration…

Le jury des critiques a choisi « Color Book » de David Fortune, qui évoque avec tendresse la relation père-fils, ce dernier étant « différent », trisomique et désormais sans mère. « C’est un combat de tous les jours, qui contient de la beauté et de la joie. Ce n’est jamais facile d’accepter les gens qui sont différents », explique le réalisateur. Le prix Barrière du 50ème a été attribué à « La Cocina » du réalisateur mexicain Alonso Ruizpalacios (dont « Un homme et une femme » est le film préféré de son père), une immersion dans les cuisines tumultueuses d’un restaurant new-yorkais, où la plupart des employés sont des immigrés. Et le prix spécial 50ème anniversaire Canal+ revient à « The School Duel » de Todd Wiseman Jr., une dystopie effrayante : pour réduire les fusillades dans les écoles, un tournoi télévisé est organisé dans lequel des étudiants universitaires sont poussés à s’entretuer.

Le Festival avait également programmé un hommage au documentariste Frederick Wiseman (94), mais le « maître cinéaste » n’a pu se rendre à Deauville pour des raisons de santé. Sous le label « Once Upon a Time in America », trois de ses films réalisés dans les années 70 (« Law and Order », « Hospital », « Juvenile Court ») ont été restaurés et sont désormais en salles. Wiseman a filmé une réalité américaine : la justice, l’hôpital, la police… et les films présentés au Festival racontent aussi l’histoire des États-Unis : le racisme, la violence, la prison, la misère sociale, l’immigration, les armes, la différence… Il était une fois l’Amérique.

Patrick TARDIT

50ème Festival du Cinéma Américain de Deauville, www.festival-deauville.com

Récompenses

Grand Prix: EN ÉTÉ par Alessandra Lacorazza Samudio

Prix ​​du Jury: LE COUTEAU de Nnamdi Asomugha

Prix ​​du Public de la Ville de Deauville:L’AFFAIRE DES ÉTRANGERS de Brandt Andersen

Prix ​​du Choix des Critiques: LIVRE DE COULEURS par David Fortune

Prix ​​de la Révélation 2024:EN ÉTÉ par Alessandra Lacorazza Samudio

Prix ​​Barrière 50ème Anniversaire: LA COCINA d’Alonso Ruizpalacios

Prix ​​Spécial 50ème Anniversaire CANAL+:LE DUEL SCOLAIRE de Todd Wiseman Jr.

Prix ​​d’Ornano Valenti 2024: RABIA de Mareike Engelhardt