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« Il est temps d’aimer danser » : à Biarritz, on cultive vraiment toutes les danses

Une incursion dans le Temps d’aimer la danse, présidé par Thierry Malandain, nous a permis d’admirer Crocodile, duo amoureux des corps perdus, et du flamenco queer, dans un événement qui propose 57 spectacles.

Biarritz (Pyrénées-Atlantiques), envoyé spécial.

Le 34et L’édition de Temps d’aimer la danse, présidée par le chorégraphe Thierry Malandain, est ouverte à tous les styles, de la danse urbaine au ballet (six à l’affiche), avec pas moins de 39 compagnies invitées, 57 spectacles programmés et 42 événements gratuits.

Incorporé en 2009 au Ballet national de Marseille en tant que danseur, Martin Harriague s’apprête à devenir le nouveau directeur du Ballet de l’Opéra Grand Avignon. Il présente Crocodileun duo dansé et écrit avec la chorégraphe franco-américaine Emilie Leriche.

Sur une scène nue, blanche, parfaitement éclairée, avec, au centre et au centre, les vibraphones des deux musiciens de l’ensemble O, Emilie Leriche et Martin Harriague, se frôlent, puis se lancent à corps perdu dans un jeu de sursauts et de retraits. L’amour et ses évasions y trouvent un vocabulaire sûr. La syntaxe utilise délibérément le pied, la main, la hanche…

Un véritable jeu de cache-cache, où deux bras encadrent une tête, une épaule fuit et revient, une jambe frappe sa poitrine sur un dos pénitent, des mains se trouvent… On assiste aux charmes étranges de la répétition, auxquels fait écho la musique minimaliste répétitive des musiciens.

Un flamenco qui déjoue les codes du genre

Martin Harriague utilise sa méthode, dite de « traduction physique », qu’il a développée aux Pays-Bas et en Israël de 2013 à 2018. Elle consiste à associer des parties du corps à des émotions, que l’autre performer transpose sur une autre partie de la sienne. Une anatomie hypersensible, à fleur de peau, est ainsi jetée dans ce cercle amoureux, riche en climax.

Cela donne des duos millimétrés d’une vitalité sauvage. Crocodile explore l’amour et ses saisons en un peu plus d’une heure. Le couple, à terre, reste alerte comme l’herbe au vent. La pièce est un petit chef-d’œuvre fait de mille esquisses.

Un autre point fort est le flamenco queer de Manuel Linan. Il dit : « Quand j’étais petite, je m’enfermais dans ma chambre et je portais la jupe verte de ma mère. Je décorais mes cheveux de fleurs, je me maquillais et je dansais en cachette. » Sa pièce Longue vie ! est né du souvenir d’enfance du chorégraphe et metteur en scène, né à Grenade en 1980. Avec ses six danseurs, il invente un flamenco qui déjoue les codes du genre et laisse chacun affirmer sa singularité, en robe à volants et chignon épinglé sur la tête.

La solidarité des musiciens tapis dans l’ombre, le regard de l’un sur la prestation déchirante de l’autre, cela crée une marée montante qui submerge le public. La furie des talons martèle le sol, tandis que le groupe observe les jambes en soulevant les jupes. Les castagnettes sont redoutables et les visages résolus.

Tout à la fin, les guirlandes tombent, les robes aussi, sous lesquelles apparaissent les artifices, les faux seins, les gaines, le faux chignon. Sans plus d’artifice, elles se présentent devant les spectateurs, sortant un Kleenex de leur décolleté pour se démaquiller à la vue de tous, sous nos yeux ébahis, plongés dans le noir.

La bête devient humaine, comme après une lutte hideuse pour se tenir debout.

Nous avons cependant été moins convaincus par Pièces de couverture, de la Coréenne Sun-A Lee, aux talents de danseuse indéniables. Il s’agit, selon ses propres termes, d’une trilogie « forme de danse de guérison vitale. » Dans la première partie, la jeune danseuse, le visage caché sous un masque de bouc, fait d’abord corps avec la bête cornue. Ses gestes sont dressés, ses doigts crochus sont prêts à étrangler un adversaire, ou à saisir le public par les cheveux, les mains à la gorge, les pieds au-dessus de la tête.

Une fois sur ses deux pattes, la bête devient humaine, comme après une lutte hideuse pour se tenir debout. Après une attente assez longue, une deuxième scène se déroule où ils sont trois, deux femmes et un homme, chacun immobile devant un bloc d’argile.

Ils se tirent tour à tour par les cheveux pour se relever avant de retomber lourdement. Le dernier à passer, une petite créature morose, dépenaillée, échevelée, au regard suppliant, tremble sur ses pieds. Au sol, les blocs d’argile attendent leur tour.

Chaque interprète est absorbé, à genoux, dans la lutte pour leur donner forme. La troisième scène, après une longue attente, est plus conventionnelle, via un rituel orchestré, devant un bol où les gens se relaient pour se laver le visage en soulevant de l’eau imaginaire sous les vibrations d’un gong.

Nous n’avons pas assez de place pour traiter ce sujet en profondeur. don Quichotte de Po-Cheng Tsai, né à Taiwan, dansé par le Ballet de Berne, à la fois abstrait, fortement rythmé et fougueux.

Jusqu’au 16 septembre, à Biarritz. Infos : letempsdaimer.com

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Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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