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« Il a fallu refaire le même travail cinq ou six fois » : chez Spiders, développer des jeux n’est plus une partie de plaisir

Il y a comme une sorte de gueule de bois. Pendant le Covid, l’industrie du jeu vidéo a connu une véritable ivresse, l’argent a coulé à flot. Spiders, un petit studio de la région parisienne, a alors été avalé par Nacon, son éditeur. L’entreprise a triplé ses effectifs, une deuxième ligne de production a été lancée… Mais les salariés n’ont pas vu la couleur de cette manne, au contraire, ils ont l’impression d’en payer le prix.

Après avoir écrit une longue lettre ouverte à leur direction, et en l’absence de toute réponse de sa part, les salariés de Spiders se sont mis en grève ce lundi, à l’appel du STJV (Syndicat des travailleurs du jeu vidéo). Un fait suffisamment rare, voire unique, dans le secteur, pour pousser la direction à rouvrir le dialogue, alors qu’il était bloqué depuis novembre 2023 sur le télétravail et depuis le printemps sur les salaires.

Des collègues syndiqués du studio parisien Kylotonn, également propriété de Nacon, sont venus garnir le chaleureux piquet de grève devant les locaux. Ils partagent d’ailleurs la plupart des revendications. D’autant que la nouvelle directrice de Spiders, Anne Devouassoux, est aussi présidente du Syndicat national du jeu vidéo (SNJV), le patron des patrons du secteur.

Des employés désillusionnés

Le malaise est généralisé, selon l’enquête lancée par le CSE (comité social et économique) du studio, à l’occasion du développement de GreedFall 2le nouveau jeu devrait sortir fin septembre. « On ne sait pas vraiment qui donne les ordres, la direction ou l’éditeur ? D’un côté, on nous assure que nous restons indépendants ; de l’autre, Nacon intervient sur la direction du jeu ainsi que sur la politique salariale. On a développé un jeu sans avoir une vision constante du projet, puisqu’il change constamment. »explique Nicolas, un employé du studio.

Antoine, élu STJV au CSE, donne un exemple : « Les équipes ont dû refaire le même travail cinq ou six fois car, entre-temps, le jeu avait pris une autre direction. Il y a un vrai problème d’organisation et de communication. »Il déplore. Résultat : les salariés se désinvestissent, le travail perd tout sens et ils craignent que cela se ressente dans la qualité du travail produit. Une véritable souffrance pour ceux qui aspirent à créer une œuvre commune. « On n’ose même plus utiliser ce mot, travail, Nicolas respire. Parce que la direction utilise cet argument pour nous refuser toute augmentation de salaire sous prétexte que nous avons de la chance de travailler un métier qui est aussi notre passion. »

Avec un salaire à peine supérieur au SMIC, des prêts étudiants à hauteur de 50 000 euros à rembourser pour certains, et sans perspective d’évolution, les salariés du studio sont déprimés. Beaucoup avaient profité de la pandémie pour fuir les prix élevés de Paris, mais la direction, qui refuse toujours le télétravail, réclame un retour massif au présentiel. « Ils veulent tout négocier individuellement et ça se passe très mal. Le studio a été exemplaire dans cette pratique pendant plusieurs années.déplore Antoine. Pire, alors qu’ils le refusent pour les salariés, plusieurs managers sont, eux, en télétravail permanent. Lundi, la direction a annoncé qu’elle s’adresserait à tous les employés jeudi.

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Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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