« Hors du temps », Olivier Assayas et le temps arrêté
Hors du temps**
par Olivier Assayas
Film français, 1h45
Le confinement a été une période étrange qui a conduit de nombreux artistes à faire un travail introspectif. Un temps « arrêté » et l’opportunité d’un retour sur soi auquel le réalisateur Olivier Assayas n’a pas échappé. Il a réalisé un film hybride, mi-journal documentaire, mi-fiction, qui pourrait paraître terriblement égocentrique s’il ne nous ramenait pas de manière très concrète, et parfois très drôle, sur cette période étrange de nos vies avec ses peurs irrationnelles. , ses questionnements, ses tensions familiales et parfois ses profonds questionnements.
Vincent Macaigne dans le rôle du cinéaste et Micha Lescot dans celui de son frère, Michka, journaliste rock et chroniqueur sur France Inter, incarnent les deux sexagénaires confinés ensemble dans leur maison d’enfance de la vallée de Chevreuse avec leurs compagnons respectifs (beaucoup plus jeunes que eux), dans une série de sketchs amusants illustrant leur relation orageuse.
Hormis les souvenirs communs de leur jeunesse dans le Paris branché des années 80, tout semble les opposer. L’un, Paul, l’alter ego du cinéaste, est obsédé par les règles sanitaires jusqu’à la névrose et profite plutôt bien de cette pause inattendue ; l’autre, Étienne, qui se remet mal d’une récente séparation, étouffe dans ce lieu clos mortel et n’aspire qu’à s’enfuir. Deux grands enfants immatures ramenés à leurs liens fraternels par les fantômes qui hantent les lieux.
L’esprit du lieu
La maison où ils ont trouvé refuge et où le film a été tourné constitue l’autre personnage de Hors du temps. Sur une série d’images fixes, alternées avec des scènes de fiction, le cinéaste évoque en voix off les souvenirs qui leur sont liés. Une ferme simple rénovée par ses parents dans un hameau de l’Essonne devenu quartier résidentiel, où lui et son frère ont grandi en jouant dans le jardin attenant des voisins, doté d’un terrain de tennis.
Là aussi, le temps semble s’être arrêté. Olivier Assayas nous montre le bureau de son père (le scénariste Jacques Rémy), entouré d’une imposante bibliothèque remplie de livres d’art, ainsi que la chambre de sa mère (la styliste Catherine de Karolyi) au décor inchangé, que l’on retrouvera ensuite retrouver dans les scènes de fiction. Comme dans le magnifique Heure d’été (2008), l’esprit des lieux et son pouvoir consolateur imprègnent tout le film et lui confèrent un charme mélancolique.