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HISTOIRE. Du fiasco de Jakarta à la rédemption de Paris, la renaissance express des « cailleras » de l’équipe de France de basket

Lamentablement éliminés de la Coupe du monde 2023, les hommes de Vincent Collet ont bravé le mauvais temps pour décrocher la médaille d’argent aux Jeux olympiques de Paris, samedi.

France Télévisions – Éditorial Sport

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Les joueurs de l'équipe de France posent avec leur médaille d'argent, le 11 août 2024. (ANN-DEE LAMOUR / CDP MEDIA / AFP)

Quand on touche le fond, on ne peut que tenter de remonter. C’est sans doute le point où les Bleus en étaient arrivés il y a tout juste un an, en Indonésie. Dans la chaleur humide de Jakarta, ils suffoquaient, éliminés après deux courts matches de Coupe du monde alors qu’ils avaient annoncé qu’ils ne visaient pas « rien que de l’or », selon Rudy Gobert. Une humiliation contre le Canada, une déroute contre la Lettonie, et les voilà déjà de retour à l’aéroport.

À ce stade, le risque d’implosion était grand. « La Fédération doit demander à sa direction technique nationale et à son staff les raisons de cet échec »a annoncé depuis l’Indonésie le président de la FFBB, Jean-Pierre Siutat. Boris Diaw, manager des Bleus, a poursuivi : « Aucune décision n’a été prise concernant qui que ce soit, y compris Vincent Collet. Nous pouvons tous être mis en cause. Pour l’instant, ce n’est pas le cas. » Vincent Collet, en poste depuis 2009, est resté. Les dirigeants, Nicolas Batum et Nando de Colo, ont poussé jusqu’aux Jeux, fiers de ne pas quitter ce maillot bleu comme ça.

Et puis, un petit nouveau a tout chamboulé. Ce petit bonhomme mesure presque 2,30 mètres et s’appelle Victor Wembanyama. Dans un passage à vide où Joël Embiid n’a finalement pas voulu mettre les pieds, il a mis sa tête. Une tête bien faite, froide et lucide, qui a redynamisé ces Bleus auxquels plus personne ne semblait croire.

Une fois la saison NBA terminée, lui et les autres se sont retrouvés à l’entraînement à l’Insep, pour l’opération rédemption aux Jeux. Envers le basket français, le public, mais surtout envers eux-mêmes. « Nous avons une opportunité incroyable et nous avons l’intention d’être à l’heure pour l’événement. Nous voulons tout exploiter et l’échec de l’année dernière est un élément important. »a souligné l’entraîneur Vincent Collet début juin.

Quatre défaites pour terminer la préparation et les doutes sont revenus comme un coup de fouet. Le début des Jeux face au Brésil, sérieux mais sans grand relief, n’a pas rassuré grand monde.

Et puis le Japon. L’adversaire le plus abordable s’est avéré terriblement coriace, et ce n’est que grâce à un Hail Mary de Matthew Strazel que les Blues s’en sont sortis. « C’est le miracle de Matthew contre le Japon qui nous a amenés ici. Nous avons eu de la chance, ça s’est joué sur un seul tir.Nicolas Batum a rembobiné jeudi, après la demi-finale.

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Miraculeusement, les Bleus se qualifient, mais sans aucune marge. Écrasés dans les grandes largeurs par l’Allemagne, ils s’engagent dangereusement sur la pente descendante. C’est alors que le point de bascule se produit. Nicolas Batum élève la voix, en tant que capitaine, pour secouer tout le monde. « Je ferais mieux de ne pas le partager ici… »a-t-il déclaré le soir de la défaite.

L’échange dans les médias entre Evan Fournier et son entraîneur a fait naître une possible tension qui n’en était pas une. Et puis, Vincent Collet a tout changé. Il a brisé les « statuts », et envoyé ses deux stars Rudy Gobert et Evan Fournier sur le banc pour débuter les matchs de la phase finale. « Nous avons été pourris, mais nous sommes toujours là. Nous sommes toujours en vie, nous avons encore une chance. Nous devrions la jouer à fond », Batum a dit. Et tout a changé, tout « cliqué »comme on dit.

On les prédisait à l’enfer en quart de finale face au Canada ? Ils ont balayé avec autorité (82-73) ceux qui les avaient humiliés au Mondial. Avec en prime un Evan Fournier décisif.Tout ce que nous avons traversé ces dernières semaines nous a permis d’être l’équipe que nous sommes aujourd’hui. Quand l’adversité est arrivée, nous ne nous sommes pas séparés, nous n’avons jamais perdu confiance. »a insisté Gobert. « Nous ne sommes pas la même équipe »Fournier résume.

L’Allemagne, championne du monde en titre, semblait montée encore plus haut en demi-finale. Même punition (73-69). Les leaders dans la coriace sont les lieutenants qui ont pris le relais, Isaïa Cordinier et Guerschon Yabusele. « ONous savons que peu de gens croyaient en nous, à cause de la préparation, à cause de la phase de poules. Mais nous avions confiance en nous. On s’est dit des choses, on s’est donné une direction. Et aujourd’hui, ça porte ses fruits. »Cordinier se réjouit. « Nous nous sommes rencontrés au meilleur moment »a souligné Frank Ntilikina.

Oubliée l’équipe hésitante et résignée de Jakarta. Celle de Paris a un cœur immense, et se bat avec lui avant de se battre avec ses jambes. Le cœur des « cailleras », surnom autoproclamé pour marquer leur ténacité et leur détermination à ne jamais abandonner.

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En finale, la montagne américaine s’est révélée infranchissable. Pourtant, ces Bleus sont passés tout près du sommet, mais ont manqué de peu de l’escalader. « On n’était pas loin, et c’est nul ! »a déploré Andrew Albicy samedi, après la défaite 98-87 en finale.

Mais l’heure n’était pas aux lamentations. Ce groupe revient de loin et sort avec les honneurs de l’enfer que certains lui prédisaient chez lui. « Qui aurait pensé, il y a sept jours, que nous serions ici, à jouer contre cette équipe en finale ?a noté Nicolas Batum après la réunion finale. « J’ai vécu le tournoi le plus fou et le plus étrange auquel j’ai jamais participé avec cette équipe. »

A la croisée des chemins, avec les départs de Vincent Collet, Nicolas Batum et Nando de Colo, cette équipe va devoir se réinventer. Mais elle a réussi son pari, transformée en un an. « Ce n’était pas forcément visible. d’abordmais l’état d’esprit n’avait rien à voir avec ça avec celui de l’année dernière »déclare Vincent Collet.

Cette relève sera incarnée par Matthew Strazel, Bilal Coulibaly ou encore Isaïa Cordinier. Mais surtout par Victor Wembanyama. A 20 ans, il a joué son meilleur match en bleu lors de la finale des Jeux olympiques. Avec lui, l’avenir des Tricolores ne peut pas être sombre. « Aujourd’hui, ce n’est certainement pas ce que je voulais. Mais dans 20 ans, cela fera bien sûr un CV. Ça me fait mal de voir un autre drapeau au-dessus du nôtre. C’est l’image que je garderai pour les quatre prochaines années. »conclut la nouvelle coqueluche de la sélection française. Rendez-vous à Los Angeles en 2028.

Jeoffro René

I photograph general events and conferences and publish and report on these events at the European level.
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