Ce n’est un secret pour personne, Isabelle Huppert intimide. Contre son gré, sans doute, mais quand même. Sur les plateaux de tournage, sa présence, son stakhanovisme, son professionnalisme, et sa filmographie aussi, impressionnent ses partenaires, voire les déconcertent. Mais pas Hafsia Herzi. En 2023, à plusieurs mois d’intervalle, l’actrice a tourné deux films avec sa sœur aînée : Les gens d’à côté, par André Téchiné, et Le Prisonnier de Bordeaux, par Patricia Mazuy.
Dans le premier, sorti le 10 juillet, l’actrice de 37 ans incarne une professeure qui emménage avec son compagnon, un militant d’extrême gauche, à côté d’une policière touchée par le suicide de son mari. Dans le second, en salles le 28 août, elle incarne une banlieusarde qui, au parloir de la prison où son mari est incarcéré, rencontre une femme bourgeoise dont le mari est lui aussi derrière les barreaux.
Hafsia Herzi n’avait pas peur de son partenaire virtuose à l’écran. « Franchement, non, elle nous assure, ce jour de juillet à Paris. Les gens parlent de son côté dur, mais c’est de la concentration. Sans aucune prétention, presque avec candeur, elle dit : « Très vite, j’ai compris que nous étions pareils. Nous suivons la même méthode, la même rigueur. » Méthode, rigueur… Ce sont précisément les mots qui reviennent dans la bouche de ceux avec qui elle a travaillé. Sylvie Verheyde, qui l’a dirigée dans Poupée sexuelle, en 2016, et Mme Claude, en 2021, voit en elle « un bon petit soldat, capable de braver les éléments, de se donner à fond pour un film ».
Pour Iris Kaltenbäck, qui l’a choisie pour L’Enlèvement, en 2023, elle « Elle donne l’impression, au premier abord, que tout est naturel, alors qu’en fait c’est le contraire. Elle a une éthique de travail et une exigence sans égales. Comme les grandes actrices, comme Huppert. » Isabelle Huppert, encore, avec qui, vingt-quatre ans plus tard Saint-CyrPatricia Mazuy signe ses retrouvailles. La réalisatrice a joué « similitudes » entre les deux actrices. « De leur intensité commune, mais aussi de leurs différences. Dans le film, Isabelle est l’os, Hafsia est la chair. »
Une personnalité unique
Une quarantaine de films, un César du meilleur espoir féminin en 2008 pour son rôle dans La graine et le mulet, d’Abdellatif Kechiche – que beaucoup considèrent comme un chef-d’œuvre –, des collaborations avec des figures du cinéma d’auteur (Bertrand Bonello, Alain Guiraudie, etc.), un passage à la réalisation en 2019 avec Tu mérites un amour, suivi de Bonne mère, en 2021…
Dans la profession, Hafsia Herzi impressionne autant qu’elle se démarque. Elle n’est pas comme les autres. Plus secrète, plus féroce. Quand les actrices de sa génération s’envoient des câlins virtuels, mettent en scène leur vie sur les réseaux sociaux, elle reste en retrait. Son compte Instagram est basique : on y voit les affiches de ses films, à peine plus.
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