Divertissement

Gustave Caillebotte dans six tableaux remarquables vus à l’exposition « Peintres d’Hommes » au musée d’Orsay

L’exposition Caillebotte, peignant des hommesqui débute mardi 8 octobre au musée d’Orsay, est un régal pour les yeux. Mais pas seulement. Le musée a voulu, à travers une soixantaine d’œuvres des peintres impressionnistes les plus réalistes, raconter l’expérience de l’homme moderne au XIXe siècle.

Car Gustave Caillebotte, décédé à l’âge de 45 ans en 1894, a fait entrer de nouvelles figures dans l’histoire de la peinture, comme l’ouvrier urbain ou l’homme nu à sa toilette. Des représentations quipuis participer pleinement à la redéfinition d’un nouvel idéal masculin ». Viril et moderne, certes, mais aussi étonnamment égalitaire avec les femmes, le regard de ce peintre est tout audacieux. Voici six œuvres vues à l’exposition qui témoignent de son audace et de son avant-garde.

1« Fête en bateau » (vers 1877-1878)

Il rame face à nous et bien qu’il ne nous regarde pas, la composition est telle, avec sa ligne d’horizon très haute, que nous sommes ses passagers. Caillebotte amène ici le spectateur directement dans le tableau, il nous invite, nous plonge dans cette scène de promenade en bateau, comme captée en plein mouvement. Ce n’est pas là sa seule originalité. Le sujet, visiblement un dandy de la ville, a ôté sa veste, dévoilant sa chemise (un vêtement intime à l’époque) et dévoilant sa silhouette avantageuse, mais il a gardé son élégant haut-de-forme, et c’est tout aussi inhabituel.

"Fête en bateau" par Gustave Caillebotte, vers 1877-1878. Huile sur toile, Paris, Musée d'Orsay, acquise grâce au mécénat exclusif de LVMH en 2022. (RMN-GRAND PALAIS (MUSEE D'ORSAY) / FRANCK RAUX)

Ce tableau spectaculaire, présenté dans l’avant-dernière salle avec une dizaine d’autres sur le thème du canoë sportif, qu’il pratiquait avec assiduité, a été acquis il y a deux ans par le musée d’Orsay grâce au mécénat exclusif de LVMH. Ce faisant, ce fut, rappelle le directeur du musée d’Orsay Sylvain Amic, le point de départ de cette nouvelle exposition Caillebotte.

2«Jeune homme à sa fenêtre» (1876)

L’originalité du cadrage et des points de vue est un des éléments qui différencient Caillebotte. Il cultive l’asymétrie, le décentrage, mais aussi les effets de plongeon, comme ici, très nouveaux à l’époque. Depuis ses différentes demeures parisiennes, il observe d’en haut le nouvel aspect de la capitale remodelée par le baron Haussmann. La fenêtre ouverte sur la rue permet de proposer un cadre dans un cadre et de jouer, comme c’est souvent le cas à la maison, sur différents niveaux.

Sa famille, et notamment ses deux jeunes frères, comptent parmi ses premiers modèles. Ici, son frère René regarde par la fenêtre de l’hôtel familial de la rue de Miromesnil en direction du boulevard Malesherbes. René est décédé à l’âge de 25 ans (d’un possible suicide) quelques mois après la réalisation de ce tableau baigné dans une certaine mélancolie.

3« Raboteuses de parquet » (1875)

Son premier grand tableau, l’un des plus connus de Caillebotte, est d’abord refusé au Salon (académique) de 1875, le jury jugeant le sujet « vulgaire », ce qui décide le peintre de ne plus jamais tenter sa chance au Salon. et de rejoindre les impressionnistes à l’invitation d’Auguste Renoir. Présenté lors de la deuxième exposition du groupe en 1876, il fut remarqué et connut un grand succès, les commentateurs saluant l’honnêteté de ce tableau avec sa perspective en contre-plongée audacieuse, qui exagère l’inclinaison de l’œuvre.

"Raboteuses de parquet" (détail) de Gustave Caillebotte, 1875. Huile sur toile, 102 x 145 cm. Paris, Musée d'Orsay. (RMN MUSÉE D'ORSAY / FRANCK RAUX)

Ce chef-d’œuvre constitue l’une des toutes premières représentations d’ouvriers urbains au travail. Ce choix de sujet, qui montre l’intérêt de Caillebotte pour le travail physique et les questions sociales, le distingue de ses confrères impressionnistes. Lors de l’exposition, cette œuvre d’un réalisme minutieux est accompagnée de nombreux dessins préparatoires, l’artiste ayant longuement étudié le geste et les avant-bras musclés des ouvriers à l’effort, avant de les transférer sur la toile.

4« Le pont vers l’Europe » (1876)

Une fois de plus, le cadrage de Caillebotte est moderne et insolite. Comme la photographie puis le cinéma, qu’il a à peine anticipé, il fait régulièrement entrer dans le champ des éléments en mouvement, des personnages ou des animaux (ici le chien, au premier plan), ce qui dynamise ses œuvres en donnant une impression de mouvement, de hasard saisi sur le vif. . Il se trouve que son frère Martial, avec qui il vivra longtemps, est photographe et ils s’influencent sans aucun doute.

"Le pont de l'Europe" de Gustave Caillebotte, 1876. Huile sur toile, 125 x 180 cm, Genève, Association des Amis du Petit Palais. (REINISCHES BILDARCHIV KOLNO)

Dans un autre tableau également appelé Pont de l’Europe (vers 1877), qui surplombe les rails de la gare Saint-Lazare, le peintre n’hésite pas à découper entièrement la moitié d’un personnage en haut de forme vu de profil qui sort du champ à gauche du tableau. Cette toile énigmatique »ne dis rien »écrit le musée. « Pour Caillebotte, la peinture est un fragment de réalité qui se poursuit hors du cadre..

5« Homme s’essuyant la jambe » (vers 1884)

Gustave Caillebotte a peint deux nus masculins audacieux la même année 1884, Homme dans le bain Et Homme s’essuyant la jambeque l’on peut voir à l’exposition. Dans les deux cas, les personnages se sèchent avec une serviette et leurs corps sont montrés dans leur vérité brute, soulignant leur vulnérabilité. Le premier est représenté de dos, fesses nues, ce qui place le spectateur dans la position d’un voyeur. « Cette peinture révolutionne le nu masculin, jusqu’alors dominé par les nus héroïques et idéalisés de la peinture d’histoire.souligne le musée.

"Homme s'essuyant la jambe" de Gustave Caillebotte, vers 1884. Huile sur toile 100 x 125 cm. Collection privée. (LEA GRYZE C/O REPROFOTOGRAFEN)

Dans la seconde (ci-dessus), l’entrejambe du sujet, bien que dans l’ombre, apparaît comme le centre de gravité de la toile. Deux œuvres provocatrices »particulièrement innovants par leur réalisme sans compromis »soulignent les cartels. Surtout, ils défient les normes de genre de l’époque, plus habitués aux nus féminins dans leurs toilettes. Qu’est-ce qui a « a soulevé des questions sur la sexualité de l’artiste, dont on ne sait rien » Et « interroge les notions d’érotisme et de genre » Resté célibataire toute sa vie, Caillebotte a néanmoins laissé à sa mort une petite maison et une rente à son « amie » Charlotte Berthier.

6« Intérieur, femme lisant » (1880)

Soixante-dix pour cent des sujets peints par Caillebotte sont des hommes. Mais les femmes ne sont pas exclues de son travail. Nue sur le canapéune toile spectaculaire de près de 2 mètres de large présente à l’exposition, représente une femme nue allongée dans une position inhabituelle : elle couvre à moitié ses seins et son visage d’une main pudique, mais expose sans réserve les poils de son pubis, ce qui a fait beaucoup parler. en son temps.

Dans Intérieur (ci-dessus), une femme, peut-être la compagne de Caillebotte, Charlotte Berthier, avec laquelle il n’était pas marié, est au premier plan, de profil. Dans cette composition encore une fois surprenante, le peintre se livre avec malice à une inversion de genre, brisant les stéréotypes : cette femme lit le journal, une activité typiquement masculine de l’époque. En arrière-plan, un homme allongé sur le canapé est plongé dans un livre, une attitude perçue au contraire comme féminine. Entre eux, il n’y a aucun jeu de séduction ou de pouvoir. Dans ce parallèle discret, ils sont égaux.

Exposition « Caillebotte, peindre des hommes » au musée d’Orsay(Nouvelle fenêtre)du 8 octobre 2024 au 19 janvier 2025. Esplanade Valéry Giscard d’Estaing, 75007 Paris. Tous les jours sauf le lundi, et le 25 décembre, de 9h30 à 18h avec nocturne le jeudi jusqu’à 21h45

Malagigi Boutot

A final year student studying sports and local and world sports news and a good supporter of all sports and Olympic activities and events.
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