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Guerre en Ukraine : y a-t-il encore du gaz russe dans nos canalisations ?

La guerre en Ukraine a largement rebattu les cartes énergétiques du Vieux continent. L’Europe, cliente privilégiée de la Russie, a entamé un sevrage forcé et accéléré. Jusque-là très dépendantes des importations de gaz naturel russe, livré par gazoduc, les 27 ont dû faire face tour à tour à la coupure volontaire de gaz par la Russie dès les premiers mois de 2022, et aux fuites sur les gazoducs Nord Stream 1 et 2, qui relient la Fédération à l’Europe du Nord via la mer Baltique, en septembre de la même année.

Le contrat qui oblige l’Ukraine à laisser transiter par son territoire le gaz russe vers l’Europe via le gazoduc fraternité est sur le point de se terminer. De plus, les quantités transitant par ce corridor ukrainien ont considérablement diminué, rapportions-nous en juin : selon The Insider, en 2023, le volume de gaz transporté n’était que de 34 % de ce qu’il était en 2021.

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Russie : sur la route du gaz, de la mer Caspienne à la mer Noire

De 40% à 8% : l’Europe s’affranchit du gaz naturel russe…

Depuis deux ans, et dans le cadre du REPowerEU adopté en 2022, l’Union européenne s’efforce donc de se passer du gaz russe, en revoyant ses besoins à la baisse – les 27 ont réduit leur consommation de gaz de 20 % depuis l’invasion, selon l’Institute for Energy Economics and Financial Analysis (IEEFA) – et en diversifiant leurs sources d’approvisionnement. La stratégie porte ses fruits : « Nous sommes passés de 40% de gaz naturel russe en 2018 à environ 8% de gaz naturel » en 2023, rapporte Thierry Bros, expert français en énergie, à GEO.

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Voilà pour le gaz naturel, importé sous forme gazeuse. Mais il y a une subtilité : l’Europe a transféré une partie de sa consommation de gaz russe vers du gaz naturel liquéfié (GNL) russe, transportable par bateau.« C’est le même gaz, mais sous des formes différentes »explique Thierry Bros. « Le gaz naturel refroidi à -162 degrés prend la forme liquide appelée GNL. Et là, on peut en mettre 600 fois plus par unité de volume, et l’envoyer par bateau. Quand il arrive en Europe, il passe par des terminaux de regazéification à Marseille, Dunkerque, etc. Ce GNL entre ensuite dans le réseau de distribution, et il n’est pas différent du gaz importé sous forme gazeuse. »

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…Mais accélérer sur le GNL

Dès lors, les chiffres sont différents : selon la Commission européenne, les importations totales de gaz russe (incluant cette fois le gaz naturel et le GNL) s’élèvent à 15 % des importations de gaz en Europe en 2023 – contre 40 % en 2021. Les 27 ont augmenté leur demande en GNL russe, et la France, premier importateur européen, n’est pas en reste. Ainsi, la France aurait acheté pour 600 millions d’euros de GNL russe depuis janvier 2024, selon le Centre de recherche sur l’énergie et l’air pur (CREA), rapporté par Politico. Au total, les 27 ont augmenté leurs importations de GNL russe de 11 % entre 2021 et 2023 selon l’IEEFA.

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L’entreprise française TotalEnergies est l’un des maillons de l’approvisionnement en GNL russe de l’Europe. Deux ans après l’invasion de l’Ukraine, le géant énergétique reste actionnaire à 19,4% de Novatek, le numéro deux du gaz russe, et possède plus de 20% de Yamal LNG, qui exploite la station de production de gaz naturel liquéfié (GNL) du même nom en Sibérie occidentale.Il n’est pas possible de le suspendre (le contrat avec Yamal LNG, NDLR) en l’absence de sanctions les visant de la part des Etats »TotalEnergies s’est justifié auprès de La Tribune. Au total, TotalEnergies vend au Vieux Continent environ 4 millions de tonnes de GNL russe chaque année. Contactée par GEO, la société n’a pas donné suite à nos sollicitations.

Même si l’Europe a imposé pour la première fois une sanction légère au GNL russe en décidant en juin dernier une 14e série de sanctions, le constat est clair : le chemin vers l’indépendance énergétique vis-à-vis de la Russie est encore long. Mais pourquoi tant d’efforts ?Le gaz, on ne peut pas le faire : quand la Russie a commencé à nous couper le gaz en 2022, les prix ont grimpé en flècherappelle Thierry Bros. Nous ne pouvons pas nous sevrer parce que nous n’avons pas d’argent, et pour Pour que les sanctions en valent la peine, elles doivent faire plus de mal à votre ennemi qu’à vous-même.

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Un discours partagé par Patrick Pouyanné, le PDG de Total, devant les sénateurs français en avril dernier.Il y a une importation de GNL russe en Europe : 14 millions de tonnes en 2022 et 2023 (…) Si on décide d’interdire le GNL russe, il faudra aller chercher ces 14 millions de tonnes ailleurs, en payant plus cher. Car il n’y a pas, actuellement, 14 millions de tonnes de GNL disponibles sur le marché mondial »il a assuré.

Quel gaz circule dans nos valves ?

« La seule façon d’y parvenir, c’est d’attendre qu’il y ait plus de production », explique Thierry Bros. Du gaz provenant de l’extérieur de la Russie, donc. Et sur la voie de la diversification, l’Europe avance. En 2023, rappelle le Conseil européen, la Norvège et les États-Unis ont été les principaux fournisseurs de gaz de l’Union européenne. La Norvège a fourni près de 30 % de toutes les importations de gaz. Parmi les autres fournisseurs figurent les pays d’Afrique du Nord, le Royaume-Uni et le Qatar.

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En matière de GNL, ce sont cette fois les États-Unis qui prennent la tête, représentant près de 50 % du total des importations européennes de GNL. En 2023, par rapport à 2021, les importations en provenance des États-Unis ont presque triplé.

Alors, quel gaz vous arrive ? Russe, norvégien ou américain ? Impossible à dire.« Chez nous, on ne peut pas savoir si on a du GNL russe ou américain »déclare Thierry Bros. « Ce qui entre dans nos maisons par les canalisations est un mélange de plusieurs origines.

Et la marque n’est pas non plus un indicateur fiable : «Total a des parts dans Novatek. Donc en France, il y a du GNL russe qui arrive estampillé Total, ou Novatek. Ensuite, soit Total le garde, soit des traders le revendent. On n’a aucun moyen de savoir si Total garde le gaz pour lui, s’il le revend à Engie, ou à d’autres… On peut connaître l’origine dans les pipelines, dans les bateaux, à l’entrée sur le territoire, mais après ce n’est plus possible. »

Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
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