Guerre en Ukraine : « Un sentiment de mort imminente », après l’attaque d’une centrale électrique à Kiev, les civils craignent le chaos
Le ministère russe de la Défense a annoncé lundi avoir ciblé des stations de compression de gaz, des sous-stations électriques ainsi que des dépôts de munitions et d’armes fournis par l’Occident sur deux bases aériennes ukrainiennes. Selon le ministère ukrainien des Affaires étrangères, une centrale hydroélectrique a été bombardée dans la région de Kiev.
La Russie a lancé lundi matin sa plus grande vague de frappes aériennes depuis des semaines, affirmant avoir ciblé des sites énergétiques et tuant au moins quatre personnes dans l’ouest et le sud de l’Ukraine. L’armée dirigée par le chef du Kremlin vise en priorité les installations énergétiques de l’ennemi, un choix stratégique que les Ukrainiens redoutent particulièrement.
« Cela fait trois ans que nous sommes stressés »
Alors que les explosions continuent de résonner au-dessus de Kiev, Ioulia Volochyna attend que l’orage passe, réfugiée dans une station de métro, comme une centaine d’autres Ukrainiens tiraillés entre anxiété et fatalisme.
La capitale ukrainienne a également été attaquée, à un moment où de nombreux habitants se rendent au travail. « Quand il y a des explosions, ça me fait toujours frémir. Mon cœur bat plus vite. »explique, d’une voix calme, Mme Volochyna. « C’est dur de vivre avec ça »dit l’avocat de 34 ans. « Je m’inquiète pour ma famille, pour mes amis, pour toute l’Ukraine, pour nos défenseurs. Cela fait trois ans que nous sommes stressés. »souligne Ioulia Volochyna.
« C’était un sentiment de mort imminente qui ne peut être exprimé par des mots »souffle Viktoriia Skyba à la Kyiv Independentune mère de 29 ans qui a échappé de justesse aux bombardements de lundi matin.
La guerre dure depuis trois ans et les Ukrainiens tentent de trouver un équilibre entre la nécessité de continuer à vivre et celle de se protéger des attaques meurtrières. Les habitants de Kiev ignorent souvent les alarmes anti-aériennes qui font désormais partie de leur quotidien, mais cette fois-ci, les explosions ont été inhabituellement fortes.
« Nous semblons nous habituer à cette peur »
Anna Boublyk, plongée dans un livre, dit avoir fait le deuil de la guerre. « Quand on entend une explosion, on ne se sent pas très à l’aise, mais si on s’inquiète tout le temps… On entend ces explosions depuis trois ans maintenant. »dit la femme de 23 ans.
Svetlana Khartchenko discute avec une femme qu’elle vient de rencontrer, toutes deux assises sur des chaises pliantes devant la mosaïque rouge et or qui orne la gare. Elle est arrivée vers 6h30, juste après le déclenchement du réveil. « Tout le monde ici ressent de la douleur »elle a dit. « Ce qui est inquiétant, c’est que nous semblons nous habituer à cette peur. »
Une crainte partagée par d’autres Ukrainiens. « Quand tu y es déjà habitué (aux attaques)on n’y pense plus. On fait tout automatiquement »se lamente Vasyl Cherniavskyi
La femme de 51 ans vient de la région de Donetsk, à l’est du pays, désormais en partie occupée par l’armée russe. « Personne ne pensait que la Russie, qui était autrefois notre sœur, nous causerait autant de chagrin »elle confie. « C’est une guerre tellement brutale qui se déroule là-bas »ajoute-t-elle, les larmes aux yeux.
L’hiver redouté
Les attaques contre les installations électriques en Ukraine accroissent également les craintes pour les mois à venir. « Si nous laissons le système électrique être détruit, les gouvernements occidentaux seront confrontés à une nouvelle vague de migration, surtout en hiver, une période très fragile. Nous comprenons déjà que nous devons réévaluer l’état du système électrique et son fonctionnement en hiver. »déclare Roman Nitsovych, directeur de recherche au sein du groupe de réflexion ukrainien sur l’énergie DiXi Group.
La Russie concentre ses efforts militaires sur la région de Donetsk malgré la contre-offensive sans précédent lancée par les forces ukrainiennes dans la région russe de Koursk, destinée entre autres à forcer Moscou à déplacer ses troupes.
Habitués à la guerre, ces civils ukrainiens craignent le chaos total à l’approche de l’hiver, où les conditions de vie pourraient être désastreuses, voire mortelles.