Vladimir Poutine a-t-il donné son feu vert à ses services secrets pour assassiner le président ukrainien Volodymyr Zelensky afin de faciliter la progression de l’armée russe qui gagne du terrain vers Kharkiv ? La mort du chef de l’Etat serait un coup dur pour son armée et aurait un effet stupéfiant dans les pays de l’Union européenne et de l’Otan. Poutine pourrait profiter de l’élimination de Zelensky pour lancer une offensive majeure, afin de percer la ligne de front et provoquer l’effondrement d’une Ukraine sans leader. L’ex-comédien que Poutine prenait pour un clown lors de son invasion de l’Ukraine en février 2022 est devenu celui qui lui barre la route. Au Kremlin, le moment est venu de le supprimer.
Un complot russe déjoué ?
Les services de sécurité ukrainiens, le SBU, ont affirmé la semaine dernière avoir déjoué un complot russe visant à l’assassiner grâce à « un réseau d’agents » qu’ils ont démantelé. Tous sont accusés de « haute trahison » et de « préparation d’attentat terroriste » grâce aux drones et explosifs qu’ils s’étaient procurés. Parmi les cibles : le chef du SBU, Vassyl Maliouk. L’armée russe a dû détruire avec un missile le bâtiment où il devait tenir une réunion grâce aux hauts agents russes qui surveillaient le bâtiment.
Le chef du renseignement militaire, Kyrylo Boudanov, figurait également sur la liste. Sa « liquidation » était prévue, avant le 7 mai, comme un « cadeau » à Poutine pour son investiture.
Avant l’invasion, deux colonels de la sécurité de l’État assurant la protection des hauts responsables ukrainiens avaient été recrutés. Selon leur plan, le président Zelensky devait être pris en otage et tué. Dans une vidéo, l’un des deux agents, le visage flou, donne les détails de l’opération. Il était chargé de recommander au FSB la bonne personne pour « bloquer » Zelensky au moment où il allait enregistrer son discours quotidien du soir.
« Plus de dix » tentatives d’assassinat russes
Le 9 mai, il a publié un décret visant à limoger le chef de sa sécurité personnelle, « Serguei Leonidovich Rud, de son poste de chef du département de protection de l’État ». En mars dernier, Zelensky révélait avoir échappé à « plus de dix » tentatives d’assassinat russes. Le même mois, un missile explose à moins de 300 mètres de lui, tuant cinq personnes, lors d’une visite du Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis à Odessa. L’été dernier, les services ukrainiens ont arrêté en flagrant délit une femme qui travaillait dans une base militaire de la région de Mykolaïv. Elle « recueillait des renseignements sur la visite prévue du président » afin de les transmettre aux Russes afin qu’ils lancent une « attaque aérienne massive ». En avril, un ressortissant polonais a été arrêté dans son pays. Il a été chargé par Moscou de recueillir des informations sur l’aéroport de Rzeszow-Jasionka, par lequel passe souvent le président ukrainien.
Poutine n’est pas à l’abri d’un mauvais coup
Côté russe, Vladimir Poutine n’est pas non plus à l’abri d’un mauvais coup perpétré par les services secrets ukrainiens qui disposent de nombreux agents dans le pays. Des millions de Russes sont d’origine ukrainienne. Beaucoup travaillent dans l’administration et l’armée. Impossible de tous les surveiller. Pour contrecarrer une attaque, Poutine aurait plusieurs sosies. Sans que personne ne puisse établir si c’était vrai.
Tous ses mouvements sont soigneusement orchestrés pour les caméras, qui ne montrent jamais la bulle de sécurité hermétique qui l’entoure. Sa nourriture et sa boisson sont dégustées. Et, lorsqu’on voyage en avion, plusieurs avions décollent en même temps avec des plans de vol différents. C’est rare car il préfère voyager dans un train banalisé, ce qui est moins risqué. En effet, on ne sait jamais où il se trouve lorsqu’il apparaît à l’écran car son bureau a été reproduit à l’identique dans chacune de ses résidences. L’un des rares agents de sécurité, Gleb Karakulov, qui a fait défection en 2022, affirme recevoir peu de monde, ne pas avoir de téléphone portable et n’utiliser pas internet. « Une cabine de négociation », un cube ultra-sécurisé de 2,5 mètres de haut le suit partout. A l’intérieur, il peut parler sans craindre d’être écouté. « Sa perception de la réalité est déformée », dit-il. Des précautions qui pourraient s’avérer inutiles. Si l’occasion se présente, les services secrets de Kiev prendront des mesures.
*Auteur de « Poutine contre la France. Un grand reporter au cœur des guerres du Kremlin », éd. Le Cherche Midi.