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Guerre en Ukraine : le rouble est en chute libre, alors pourquoi Moscou ne fait rien ?

Sur les rives de la Volga, la ville de Kazan accueille du 22 au 24 octobre le sommet des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud). Au menu : un nouvel ordre économique mondial, et la farouche volonté d’évasion de Moscou d’un système financier régi par le dollar.

Vladimir Poutine envisage lors de cette réunion de promouvoir la création d’un nouveau système mondial de paiements financiers, « BRICS-Bridge », qui facilitera le contournement du dollar dans le commerce international, et par extension certaines sanctions occidentales affectant l’argent russe.

Par ailleurs, la monnaie est une question centrale à Moscou, où plusieurs banques, dont Sberbank et VTB, ont été bannies du système Swift (Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication) utilisé pour effectuer des transactions internationales. Un frein au commerce et à la croissance économique russes : si Moscou a jusqu’ici fait preuve d’une résilience qui a surpris les alliés de l’Ukraine, les nuages ​​s’amoncellent.

Compagnons à quatre pattes des soldats ukrainiens

Inflation galopante, rouble en chute libre

Ainsi, sans les dépenses de guerre, l’économie du pays serait déjà entrée en récession, a récemment estimé Jay Zagorsky, économiste et professeur de marchés à la Questrom School of Business de l’Université de Boston, pour Business Insider.

En septembre, l’inflation s’est établie à plus de 9 %, soit plus du double de l’objectif du gouvernement. En réponse, la Banque centrale de Russie a annoncé le 13 septembre une nouvelle hausse du taux d’intérêt directeur, cette fois à 19 %. L’inflation annuelle devrait néanmoins atteindre « 6,5 à 7 % » en fin d’année, et se maintiendront entre 4 et 4,5% en 2025.

Dans le même temps, le rouble est en chute libre, sans « personne ne sait vraiment pourquoi »indique Meduza dans une analyse récente. Le taux de change officiel avec le dollar a continué d’augmenter ces derniers mois : le 18 octobre, la Banque centrale de Russie a fixé le taux de change officiel à 97,1 roubles pour un dollar américain. Début août, il dépassait légèrement 86 roubles. Inquiétude des investisseurs et des banques partenaires face aux sanctions secondaires occidentales ? Certainement.

La hausse du prix du pétrole était censée amener les roubles sur le marché intérieur et soutenir la monnaie, à la suite de l’augmentation du taux d’intérêt directeur, mais la prévision ne s’est pas réalisée et le rouble continue sa chute.

Une récente enquête auprès des analystes suggère que le taux de change moyen d’octobre à décembre oscillera autour de 94,2 roubles pour un dollar. Le débat sur la question de savoir si le dollar atteindra bientôt 100 roubles (le risque est estimé à 30 %) se poursuit depuis septembre. Il s’en est déjà rapproché à plusieurs reprises en 2024 : le 9 octobre, le marché interbancaire a brièvement vu le dollar atteindre les trois chiffres, rappelle Meduza.

L’équilibre entre exportations et inflation

Les autorités russes vont-elles intervenir pour maintenir le rouble ? Là encore, rien n’est sûr puisqu’une monnaie faible présente certains avantages et inconvénients pour Moscou.

Une monnaie faible est la promesse de Moscou d’une augmentation des exportations et d’une compétitivité accrue sur des marchés qui veulent encore des produits russes. Selon deux sources anonymes de Meduza, le plan serait d’utiliser la faiblesse du rouble pour atténuer l’impact des sanctions occidentales : avec la hausse des prix du pétrole en roubles, la monnaie arrivant en Russie augmente.

Mais un rouble faible accroît dans le même temps l’inflation, sur un marché où la demande intérieure a explosé depuis le début de la guerre en Ukraine. Ainsi, l’augmentation de la demande immobilière a permis la construction de logements d’une superficie totale de 110 millions de mètres carrés en 2023, contre 59 millions par an en moyenne entre 1991 et 2024, soulignait en septembre The Economist, pris par Geo. Le prix au mètre carré d’un appartement nouvellement construit est passé d’environ 60 000 roubles (639 euros) à plus de 130 000 roubles (1 385 euros) entre 2020 et 2023, selon le Wall Street Journal.

La faiblesse du rouble implique également un coût plus élevé des importations et, par extension, des projets publics mis en œuvre par l’État, dont certains dépendent de marchandises venant de l’extérieur du pays. De plus, un taux directeur élevé destiné à calmer l’inflation augmente le budget d’emprunt de l’État et le fardeau de la dette existante lié au taux. Dans un contexte d’animosité mondiale, Moscou devra peser le pour et le contre, et rapidement, sous peine de voir son économie sombrer dans les revers et son budget s’atrophier.

Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
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