Guerre en Ukraine : frappes françaises en Russie ? 5 minutes pour comprendre les accusations de Moscou
Des armes françaises ont-elles touché le sol russe samedi ? Moscou a accusé hier le régime de Kiev d’avoir attaqué la région russe de Belgorod, à la frontière avec l’Ukraine, avec des bombes guidées françaises Hammer, mais aussi des missiles anti-radar américains HARM.
« Une tentative du régime de Kiev de mener des attaques terroristes à l’aide de bombes guidées Hammer de fabrication française et de missiles antiradar HARM de fabrication américaine contre des cibles sur le territoire russe a été déjouée », a déclaré le ministère russe de la Défense dans un communiqué. Dans la matinée, « les systèmes de défense aérienne russes ont détruit quatre bombes guidées et deux missiles antiradar au-dessus de la région de Belgorod », a-t-il précisé.
Les frappes ont-elles été provoquées par des armes françaises ?
Peu d’informations ont filtré sur ces grèves ; par exemple, nous ne savons pas ce que visaient les missiles arrêtés. Le ministère des Armées a en tout cas démenti auprès de LCI les accusations russes d’envoi de bombes guidées françaises au-delà de la frontière ukrainienne. Sollicité par Le Parisien, le ministère n’a pas répondu à nos sollicitations.
« Il faut rester prudent pour l’instant » face aux accusations russes, souligne le général Jérôme Pellistrandi, rappelant que ces déclarations « participent à la propagande russe pour accuser la France d’être cobelligérante » dans le conflit. Jean-Paul Paloméros, ancien chef d’état-major de l’armée de l’air, appelle également à la prudence. Il souligne que si le ministère des Armées a nié ces frappes, c’est parce qu’il « dispose sans doute de bonnes preuves de la part des Ukrainiens pour affirmer qu’ils n’ont pas spécifiquement attaqué Belgorod avec ces armes. »
L’Ukraine, confrontée à l’offensive russe depuis plus de deux ans, répond régulièrement en attaquant des régions russes et a déjà ciblé celle de Belgorod. Située à la frontière avec l’Ukraine, elle se trouve à moins de cinquante kilomètres de la ville ukrainienne de Kharkiv, actuellement au centre des combats.
De quel type de bombes parlons-nous ?
Les bombes pointées du doigt lors de ces frappes sont les bombes Hammer AASM (armes air-sol modulaires de haute précision), produites par l’industriel français Safran. Ce système est compatible avec des bombes allant de 125 à 1 000 kg, précise l’entreprise sur son site. En janvier, le ministre des Armées Sébastien Lecornu « a confirmé la livraison de plusieurs centaines de bombes propulsées AASM » à l’Ukraine. L’armée ukrainienne a adapté le système, utilisé sur le Rafale, aux avions soviétiques qu’elle utilise dans la guerre contre la Russie.
Tirées depuis des avions, ces bombes « équipent plusieurs forces aériennes. Bien sûr celui de la France, mais aussi du Maroc, de l’Egypte, du Qatar et de l’Ukraine », explique le général Pellistrandi. Il souligne que des bombes Hammer ont déjà été utilisées en Ukraine en mars contre l’armée russe après la prise d’Avdiivka.
Les Hammers sont « entre une bombe et un missile : ce sont des bombes intelligentes qui se tirent à distance », explique Jean-Paul Paloméros. Une de leurs grandes forces, c’est qu’ils sont modulaires, « on peut choisir si on veut le guidage laser, le GPS ou l’inertie, explique-t-il, donc on les adapte selon ses besoins et c’est une grande qualité. » Ces armes « sophistiquées » sont « extrêmement efficaces, elles sont précises et elles permettent à l’avion de tirer à distance, à plusieurs dizaines de kilomètres » de la cible.
Quelles règles pour l’utilisation des armes françaises à Kiev?
Début mars, la France a annoncé avoir livré à l’Ukraine « une valeur totale de 2,615 milliards d’euros de matériel militaire », des armes régulièrement utilisées contre l’armée russe, selon certaines règles. « Il y a une forme de pacte de confiance », explique Jean-Paul Paloméros, « on donne des armes, mais elles doivent être utilisées sur des objectifs militaires et si possible pas sur le sol russe, sauf raison très précise directement liée aux opérations militaires ». de la guerre.
Les Ukrainiens doivent viser « des objectifs militaires, là où se trouvent les forces russes, mais en aucun cas viser des objectifs civils », ajoute le général Pellistrandi, « ils sont très prudents, généralement leurs frappes à l’intérieur du territoire russe sont menées avec des drones de fabrication ukrainienne ». Ils savent très bien qu’ils jouent sur leur crédibilité, ils n’ont aucun intérêt à jouer avec ça», estime Jean-Paul Paloméros.
Les deux experts n’excluent cependant pas totalement la possibilité que Kiev ait frappé Belgorod avec des armes françaises. « Nous avons un État souverain qui est attaqué par un autre. Nous sommes dans un cas légitime de représailles, rappelle le général Pellistrandi.