Le contrôle de deux « corridors » dans la bande de Gaza bloque l’accès à un accord entre Israël et le Hamas sur un cessez-le-feu, après plus de dix mois de combats. Malgré tous leurs efforts, les Etats-Unis n’ont pas encore trouvé de solution miracle qui leur permettrait de contourner l’obstacle. Plus inquiétant encore : un échec des négociations en cours sur ces deux dossiers pourrait pousser l’Iran et le Hezbollah, son allié libanais, à déclencher une guerre régionale contre l’Etat hébreu.
Le premier de ces « corridors », surnommé aléatoirement Philadelphie par l’armée israélienne, concerne une bande territoriale de 14 km de long et d’une centaine de mètres de large, qui longe toute la frontière séparant le sud de la bande de Gaza du territoire égyptien. L’armée israélienne en a pris le contrôle total, y compris le poste-frontière de Rafah, fin mai. Depuis, Israël a lancé une traque souterraine. Vingt tunnels, qui passaient sous la frontière égyptienne, et 82 points d’accès ont été découverts et détruits.
Aucun compromis accepté
L’objectif est d’empêcher le Hamas de faire passer des armes en contrebande et de permettre la libre circulation des membres de la branche armée de l’organisation islamiste palestinienne. Pour Benjamin Netanyahu, le Premier ministre israélien, il n’est pas question que Tsahal renonce à un déploiement permanent dans ce secteur, sinon le trafic reprendrait.
L’Egypte, de son côté, est, comme le Hamas, hostile à une présence militaire israélienne, et exige que ce soient les Palestiniens, et pas forcément le Hamas, qui soient chargés de gérer le passage frontalier de Rafah. Antony Blinken, le secrétaire d’Etat américain, a tenté ces derniers jours lors d’une tournée dans la région de proposer des formules de compromis, en vain pour l’instant.
La question a, il est vrai, toujours été sensible. Le traité de paix entre Israël et l’Egypte, le premier conclu par l’Etat hébreu avec un pays arabe, prévoyait en 1979 le déploiement de 750 gardes-frontières égyptiens avec une liste détaillée de leur armement du côté égyptien, alors que la bande de Gaza était à l’époque occupée par Israël.
L’État hébreu a évacué la bande de Gaza et démantelé toutes les colonies qui y avaient été établies en 2005. Deux ans plus tard, le Hamas a pris le pouvoir en chassant l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas de la bande de Gaza, ce qui a permis aux islamistes de prendre le contrôle de la frontière avec l’Égypte.
« Droits de douane »
Périodiquement, l’Egypte a ensuite détruit une multitude de tunnels creusés par le Hamas, dont certains pouvaient permettre le passage de camionnettes, sans pour autant mettre un terme définitif à la contrebande de matériel militaire ainsi que de marchandises simples sur lesquelles le Hamas prélevait des « droits de douane ». Tout ce trafic est complètement épuisé depuis que Tsahal patrouille dans la zone, un atout auquel Benjamin Netanyahu ne veut renoncer à aucun prix.
Le deuxième « corridor » est surnommé Netzarim, du nom d’une des colonies démantelées par Israël lors de son retrait en 2005. Il s’étend sur 6,5 km et traverse la bande de Gaza d’est en ouest, autrement dit du territoire israélien à la Méditerranée. L’armée a établi plusieurs positions dans cette bande de terre d’où elle lance des opérations dans toute la bande de Gaza.
Les Palestiniens interdits d’entrée
Les Palestiniens ne sont pas autorisés à pénétrer dans la zone, sous peine de risquer leur vie. L’objectif de cette mesure est d’empêcher les membres de la branche armée du Hamas de profiter du retour de plus d’un million de Palestiniens dans leurs foyers du nord de la bande de Gaza pour s’infiltrer dans la zone afin de reprendre leurs tirs de roquettes vers le territoire israélien ou de tenter une nouvelle infiltration commando, comme celle survenue le 7 octobre.
Sur la question des corridors, le Hamas, qui réclame l’arrêt des combats et un retrait total de l’armée israélienne de la bande de Gaza, ainsi que Benjamin Netanyahu, n’ont pas cédé d’un pouce, du moins pour l’instant. Une reconnaissance de l’échec des négociations pourrait pousser l’Iran et le Hezbollah à mettre à exécution leurs menaces de représailles massives contre Israël, après l’élimination à Téhéran du chef politique du Hamas, Ismaïl Haniyeh, et du chef militaire du Hezbollah, Fouad Chokr, à Beyrouth.