Marie, habitante du Val de Briey (Meurthe-et-Moselle), 68 ans, a « toujours détesté » ses cheveux bouclés car ils sont « incoiffables, sensibles à la moindre humidité, impossibles à démêler ». Cette « épreuve », décrite par de nombreuses femmes ayant répondu à notre appel à témoignages, n’est pas la seule à laquelle les femmes aux cheveux texturés doivent faire face au quotidien. Entre les remarques désagréables (« Vous avez mis vos doigts dans une prise électrique ce matin ? ») et les discours marketing des fabricants (contre les cheveux « indisciplinés », « indomptables » ou « rebelles »), il y a de quoi être complexe.
Mais depuis quelques années, les cheveux bouclés, crépus et crépus sont de plus en plus acceptés, comme le montre récemment l’adoption par les députés de la loi contre la discrimination capillaire. « Après des décennies de brushings et de lissages, la tendance est enfin à accepter nos cheveux tels qu’ils sont », se réjouit Anne, 59 ans. Pour elle, comme pour beaucoup d’autres, l’élément déclencheur a été l’apparition sur le marché de « produits spécialement conçus » pour les cheveux texturés.
Les grandes marques ont été dépassées
Les Secrets de Loly, Cut By Fred, Kalia Nature… Les marques qui mettent l’accent sur la naturalité ont explosé en quelques années seulement. Ils ont tous un point commun : avoir compris avant les grands industriels que l’offre ne suivait pas la demande – au moins 20 % de la population française a les cheveux texturés.
Ainsi, lorsque Laureen Schein, la fondatrice de La Belle Boucle, a lancé son compte Instagram en 2017, elle a simplement souhaité « partager les produits qu'(elle) utilisait au quotidien dans sa salle de bain », après des années à lisser ses cheveux. Aujourd’hui, la Lyonnaise compte plus de 250 000 abonnés et est à la tête d’une entreprise « sur le point d’atteindre les 10 millions de chiffre d’affaires ». Son e-shop fête cette semaine ses cinq ans, ses trois salons de coiffure affichent complets un mois à l’avance et elle prévoit d’en ouvrir trois autres prochainement (à Lyon, Bordeaux et Toulouse).
Voici quelques produits que vous souhaitez
« Depuis cinq à six ans, il y a eu une grande démocratisation des méthodes de coiffage des cheveux bouclés et cela a aidé de nombreuses personnes à se prendre en charge », analyse La petite Gaby, auteur du livre Cheveux bouclés naturels (1). Mais s’il est désormais possible d’accéder à des conseils en quelques clics, trouver sa routine capillaire reste compliqué : « Il faut du temps pour connaître la texture et la porosité de ses cheveux, les gestes et les produits qui lui conviennent », confie Caroline, 38 ans. Alsacien de 12 ans. Les cheveux ondulés (type 2) n’auront pas les mêmes besoins que les cheveux bouclés (type 3), crépus ou crépus (type 4).
Tiah, 35 ans, a l’impression d’être noyée sous un déluge d’informations et de packagings : « Il y a tellement de choses sur Internet que je n’ai pas la motivation pour chercher, tester et trouver les bons produits et les bonnes techniques. » raconte cet habitant du Plateau-des-Petites-Roches (Isère). D’autant que le montant de la facture peut s’additionner très vite, entre le shampoing, l’après-shampooing, le masque, la crème et la gelée coiffante, sans compter tous les accessoires associés.
Pas assez de coiffeurs spécialisés
Et encore une fois, c’est sans compter le rendez-vous chez le coiffeur. Jusqu’à récemment, il n’existait pas en France de formation dédiée aux méthodes de coiffage, de coupe et de soin des cheveux texturés. Résultat : « la plupart des coiffeurs ne savent pas comment s’en occuper », selon Karine, 42 ans, originaire d’Aindin. Un manque de connaissances qui peut conduire à des expériences traumatisantes, comme celle vécue par Samira, de Montélimar (Drôme). Cette quadragénaire raconte avoir perdu ses cheveux « en grande quantité » et avoir mis quatre ans à retrouver leur texture naturelle, après qu’un coiffeur lui ait appliqué un masque lissant sans son accord.
Récemment, les choses ont commencé à changer. Un certificat de qualification professionnelle spécialisée a été reconnu par l’État l’an dernier et des acteurs privés lancent leurs propres formations (L’Oréal et son « Real campus », Les Secrets de Loly et son « Academy »…). Mais, de l’aveu même de Laureen Schein, le nombre de coiffeurs pour cheveux texturés « doit encore augmenter car on part vraiment de zéro » et l’offre « reste très concentrée à Paris ». Cela permet aux rares salons spécialisés de pratiquer des prix « excessifs », selon Samira.
Laureen Schein et La petite Gaby justifient les prix (rarement en dessous de 80 euros) par « le temps passé à interagir avec la cliente » et « un protocole qui prend plus de temps » que pour les autres types de cheveux. Pour celles qui souhaiteraient garder leurs cheveux naturellement bouclés mais qui disposent d’un budget limité, les deux experts conseillent des produits « faits maison », comme le gel de lin et la crème d’avoine.
(1) Cheveux bouclés naturels (Ed. Albin Michel), La Petite gaby, à paraître le 5 juin 2024, 19,90 euros.