« Frères » ou l’histoire folle et vraie des enfants sauvages de Châtelaillon-Plage
DDepuis plusieurs jours, Michel de Robert parcourt les cinémas à la rencontre des spectateurs. Et il aime ça. L’homme de 78 ans, beau physique, toujours architecte, accompagne le réalisateur du film, Olivier Casas. Après avoir vu « Frères », on se dit que ni Yvan Attal ni Mathieu Kassovitz, pourtant au casting étoilé, n’auraient fait mieux pour la promotion que cet inconnu du grand public. Car le véritable héros, c’est lui, Michel de Robert, dont l’incroyable destin a inspiré le film. « Je me rends compte aujourd’hui que cette histoire est folle. C’est parce que les gens me disent que je le prends…
DDepuis plusieurs jours, Michel de Robert parcourt les cinémas à la rencontre des spectateurs. Et il aime ça. L’homme de 78 ans, beau physique, toujours architecte, accompagne le réalisateur du film, Olivier Casas. Après avoir vu « Frères », on se dit que ni Yvan Attal ni Mathieu Kassovitz, pourtant au casting étoilé, n’auraient fait mieux pour la promotion que cet inconnu du grand public. Car le véritable héros, c’est lui, Michel de Robert, dont l’incroyable destin a inspiré le film. « Je me rends compte aujourd’hui que cette histoire est folle. C’est parce qu’on me le dit que j’en prends conscience», commente-t-il, ce samedi 6 avril, lors de l’avant-première du film à Royan.
« Nous vivions en totale liberté, tirant avec des frondes, dormant et mangeant quand nous le voulions »
Entre 1948 et 1955, âgés de 5 et 7 ans, Michel et son frère Patrice vivaient cachés dans un bois, à quelques pas des Boucholeurs, un quartier de pêcheurs de Châtelaillon-Plage, au sud de La Rochelle. Abandonnés par une mère très libre, préférant son travail et sa liberté, et qui ne venait pas les reprendre à la fin de l’été alors qu’ils étaient en colonie de vacances. Abandonné aussi par une population trop occupée à se remettre de la Seconde Guerre mondiale pour partir à la recherche de deux orphelins en fuite. Michel est le plus bricoleur des deux, construit les cabanes (d’où l’architecture), tandis que Patrice, l’aîné, aime chaparder les poules et le matériel aux abords du village. « Nous étions follement heureux. C’était difficile, nous avons beaucoup souffert du froid, jamais de la faim, il y a eu encore beaucoup de moments merveilleux. Nous vivions en toute liberté, tirions au lance-pierre, dormions et mangeions quand nous le voulions », raconte Michel de Robert.
Un secret gardé pendant des décennies
Pour autant, « Brothers » ne se concentre pas sur l’enfance sauvage de deux gamins qui ont réussi à combler leur manque d’amour par une liberté absolue, au plus profond d’une nature généreuse. Il faut dire que Michel et Patrice ont rendu l’affaire difficile en gardant le secret une grande partie de leur vie. Pendant près de quarante ans, ils n’ont rien dit à leurs femmes ni à leurs amis. Ils ne dirent pas un mot de ce secret qui rendait leur lien si puissant et unique. Jusqu’à la mort de Patrice en 1993. « Pendant tout ce temps, j’ai été très évasif, j’ai raconté des bribes, que nous avons eu une enfance difficile, que nous avons été abandonnés par notre mère, placés en maison de correction. Mon pitch dure dix minutes et personne ne me le demande. » pour en savoir plus. Tant que mon frère sera en vie, nous garderons cela pour nous. »
« J’ai accepté de rendre hommage à Patrice, mais aussi à tous les enfants perdus »
Michel de Robert est le plus résilient, celui qui a su surmonter le traumatisme, lui qui n’a consulté un psychologue qu’une seule fois, à la demande de son ex-femme. « Il m’a dit de m’allonger sur le canapé et de raconter mon histoire. J’ai dit. C’est lui qui a pleuré ! « , il rit. Finalement, c’est avec le réalisateur Olivier Casas qu’il décide de briser toutes les digues. Les deux hommes se connaissent depuis longtemps, ils sont voisins et se retrouvent tous les matins entre amis dans un café du XVIIe siècle.e quartier de Paris. « Un jour, au bord de la piscine chez un ami, j’ai vu Michel sculpter un morceau de bois. Cela ne cadrait pas avec ce Michel que je connaissais, ce notable très élégant, et je lui ai dit : « Y a-t-il quelque chose que tu ne nous aurais pas dit ? », se souvient le réalisateur.
Hommage aux enfants perdus
Pour Michel, c’est le début de la délivrance, mais cela prendra plusieurs années. Les deux amis discutent et écrivent un scénario où il est question d’abandon, d’amour extraordinaire entre deux frères, de souffrance autant que de résilience. « Au-delà de l’histoire de deux gamins qui survivent dans la forêt, je suis fasciné par ce lien fusionnel, cet amour fantastique qui me semble plus fort que tout », résume Olivier Casas. Le principal parti finit par donner son feu vert. « J’ai accepté de rendre hommage à Patrice, mais aussi à tous les enfants perdus. Combien d’enfants perdent leur identité et disparaissent, encore aujourd’hui, dans les guerres ? », poursuit le héros du jour.
« Frères » a été tourné dans le Gers, sur l’île d’Oléron et au Canada. Michel de Robert n’a pas souhaité assister au tournage. Trop douloureux. Mais lorsqu’il a vu le film pour la première fois, il a « été giflé ». « À l’écran, c’est vraiment mon frère et moi. Cette image quand on court dans les champs de blé doré et qu’on asperge l’eau dans le ruisseau, c’est exactement ça et elle est gravée à jamais », confie-t-il. « Les plus belles années de notre vie. On a commencé par la fin», raconte dans le film Patrice, devenu médecin et qui n’a jamais supporté de vivre autre chose que son enfance.
« Frères », d’Olivier Casas, avec Yvan Attal et Mathieu Kassovitz. Durée : 1 heure 46 minutes. En salles le 24 avril.