C8 conservera-t-elle sa fréquence TV malgré ses multiples sanctions ? Dans le cadre de ses auditions pour l’attribution de quinze chaînes, qui ont débuté lundi, l’Arcom auditionne ce mardi matin cette chaîne issue de la galaxie du milliardaire conservateur Vincent Bolloré, régulièrement réprimandée par le régulateur de l’audiovisuel. Ce dernier s’est engagé, dans la matinée, à diffuser en différé l’émission de l’animateur-producteur controversé Cyril Hanouna. « C8 s’est engagée à mettre en place un nouveau processus nous permettant de garantir le contrôle de son antenne », a déclaré Gérald-Brice Viret, PDG de Canal+ France, la maison mère de C8, parmi les dirigeants auditionnés par le régulateur de l’audiovisuel.
La chaîne a écopé au total de plus de 7,5 millions d’euros d’amendes ces dernières années en raison des polémiques suscitées par sa star. La plus grosse partie de ce total provient d’une amende record de 3,5 millions d’euros appliquée en février 2023, en raison d’insultes proférées par Cyril Hanouna au député LFI Louis Boyard dans l’émission « Touche pas à mon poste ». « Idiot », « perdant », « ferme ta gueule », « bouffon », avait lancé Cyril Hanouna à Louis Boyard qui avait accusé Vincent Bolloré, propriétaire de la chaîne, d’avoir « déforesté le Cameroun », une référence aux activités de la société Socapalm qui produit de l’huile de palme au Cameroun et dont Vincent Bolloré est actionnaire.
Des milliers d’euros d’amende
La dernière amende en date, de 50.000 euros, remonte à la mi-juin, après une émission en septembre dans laquelle des personnes handicapées étaient présentées à tort comme des toxicomanes accros à la « drogue zombie ». La chaîne avait dû payer la même sanction après des propos violents, vulgaires et humiliants tenus en janvier 2023 à l’encontre de la fille mineure de Johnny et Laeticia Hallyday. En juillet 2023, elle avait écopé d’une amende de 500.000 euros parce qu’un invité complotiste de « TPMP » avait accusé certaines personnalités de consommer de l’adrénochrome, une substance présentée à l’antenne comme étant issue du sang d’enfants kidnappés et sacrifiés.
En raison de ces manquements et d’autres, les cas de C8 et de la chaîne d’information en continu CNews, également aux mains du milliardaire français, retiennent l’attention à l’heure du renouvellement d’une partie des fréquences de la TNT, attribuées gratuitement par l’État pour 20 ans. BFMTV, Gulli, TMC, Paris Première, NRJ 12, W 9, TFX, LCI… Toutes les chaînes actuelles du paysage numérique terrestre sont candidates au renouvellement de leur fréquence, mais d’autres acteurs tenteront de décrocher une place. Au final, elles ne seront plus que quinze, pour 24 candidats. Leur mandat durera quinze ans, soit une éternité à la télévision.
Au printemps, le rapporteur de la commission d’enquête parlementaire sur les fréquences de la TNT, Aurélien Saintoul (LFI), écrivait dans un rapport qu’il « ne comprendrait pas comment les chaînes CNews et C8 pourraient voir leurs autorisations de diffusion renouvelées en l’état ». Un an plus tôt, la ministre de la Culture Rima Abdul-Malak estimait qu' »il y a déjà eu une vingtaine d’interventions de l’Arcom, depuis 2019, pour C8 et CNews. Au bout de combien d’interventions l’Arcom pourra-t-elle dire dans quelle mesure les obligations ne sont pas respectées ? C’est le rôle de l’Arcom ».
L’Arcom, qui dispose du pouvoir de retirer la fréquence d’une chaîne en cas de manquements graves à ses obligations et à la convention conclue avec elle, utilise cette « sanction suprême » « avec beaucoup de parcimonie », rappelait en février le président du régulateur de l’audiovisuel, Roch-Olivier Maistre. Mais il avait promis : « Nous repartons de zéro ».