Frank Bruno : retrouver l’équilibre en mer après une amputation

Les plus belles histoires commencent toujours par des naufrages, écrivait Jack London. Une phrase que Frank Bruno a fait sienne. Son propre naufrage a eu lieu le 9 juin 1983. Marin affecté sur le porte-avions Foch, il venait d’avoir 18 ans lorsqu’un avion de chasse lui a broyé la jambe droite. Verdict : un début de gangrène, une amputation, quinze opérations et des souffrances sans fin. Son calvaire pour surmonter cet événement « inacceptable, insupportable, intolérable » allait durer une décennie.

Des défis extrêmes, comme traverser l’Atlantique à la rame

Avec un salut qu’il devra à sa pratique de la plongée – il a obtenu son diplôme d’instructeur malgré son handicap – et à son amour de la mer. A bord de son voilier, qu’il a baptisé Cabochard, en référence à son obstination à surmonter les cicatrices que la vie lui a laissées, il se lance dans un long voyage en Méditerranée. Vivant la majeure partie de son temps en mer, il poursuit sa quête par des défis extrêmes, comme une traversée de l’Atlantique à la rame ou celle du Groenland d’ouest en est.

Il a également créé l’association Fin de vie de permettre aux amputés comme lui de reprendre confiance en eux, notamment grâce à des cours d’apnée. « Être unijambiste n’est pas une fatalité ou une tragédie, c’est une opportunité de devenir une personne complètement différente », dit Frank avec le recul.

Mer et solitude en Norvège, ses remèdes pour trouver l’équilibre

Parmi toutes ses expériences de solidarité et de solitude, celles du monde des glaces l’ont profondément marqué. Il y a appris l’humilité, la sagesse et la contemplation. Cet été, il est parti pour le Grand Nord. En Norvège, plus précisément, où il a décidé de vivre seul, au-delà du cercle polaire, dans une cabane au bord de l’eau à Seglvik (la « baie des phoques »). Pas de douche, pas de toilettes, pas d’eau courante, pas de voisins. Juste un face-à-face avec les vagues. « L’Arctique a cette douceur de m’offrir l’essentiel. »

Là-haut, Frank vit connecté au présent. Il bricole. Il navigue. Il pêche. Il marche. Il dîne seul avec sa compagne, la solitude. Il lit et écoute des airs russes à la radio. Et regarde les saisons défiler, puisqu’il a décidé d’y passer l’hiver.

➤ Article publié dans le mRevue GEO HS n°122Départ, août-septembre 2024.

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