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François Ruffin : « Pourquoi un chroniqueur télé peut-il s’offrir une montre à 50 000 € alors qu’un soignant lutte pour sa survie ?

Le député « Picardie debout ! » du Somme, François Ruffin, est à Montpellier ce samedi 26 octobre* pour une réunion publique suivie de l’avant-première, au cinéma Diagonal, de son nouveau film « Au travail ! ». Un documentaire politique, dans lequel il invite l’avocate et chroniqueuse TV parisienne Sarah Saldmann à partager le quotidien des salariés au Smic. Entretien.

« Au travail », est-ce d’abord la revanche des « assistés sociaux » et des « fainéants », comme le décrit la chroniqueuse Sarah Saldmann, que vous faites faire le tour de France des salariés au Smic ?

Le véritable point de départ du film, ce sont les propos du Président de la République qui disait, pendant la crise du Covid, qu’il ne faut pas oublier que notre pays tout entier dépend de ces femmes et de ces hommes que nos économies reconnaissent et paient si mal. Au contraire, il y a eu l’inflation puis la retraite à 64 ans. Avec Gilles Perret, nous avons voulu raconter le mouvement contre la réforme des retraites, ce moment de notre histoire où nous avons rencontré des salariés qui disaient combien ils aimaient leur métier mais pas combien ils ont été faits pour le faire. Mais Ruffin et Perret qui font un film sur les salariés et les ouvriers, ça manquait d’originalité. Lorsque nous avons rencontré Sarah Saldmann sur le tournage des Grandes Gueules, nous nous sommes dit que cela pouvait introduire du fantastique dans l’histoire. Le fait de renverser la situation, d’imaginer la réinsertion des riches, retourne la situation avec humour. Mais nNos vrais héros dans le film sont BIEN Nathalie, Sylvain, Louise. Des gens extraordinaires avec des vies que nous qualifierions d’ordinaires.

Sarah Saldmann n’est-elle pas une caricature d’une vision parisienne de la France ouvrière ?

Il est évident que je regarder avec son côté folklorique. Eet vengeance, ce que je prends-le au sérieux, ce sont seles préjugés, son regard sur les personnes qui prennent un arrêt maladie qu’elle décrit comme paresseuxdeassisté qui ne bouge pas depuis leur canapé. Parce qu’ils sont préjugés Finalement répandu, Et pas seulement dans la haute bourgeoisie, aussi dans la classe ouvrière. Notre objectif est donc d’aller à rencontrer des gens, de montrer des voix, des vies, des visages, pour qu’ils ne le fassent pas soidanspas plus que des statistiques ou des remarques théoriques, mais‘ils devenirtn Sylvain, Nathalie, Jonathan, Dominique Et que chaque, raconter une partie de leur histoire en mouvement, vous permet de faire tomber csont des préjugés. jeil y a un geste dehumanité,le sentiment politique dans cle film. ÔNous sommes dans des temps sombres, donc nous voulions faire un film de joie, proposer, face à cela La France divisée, une France fraternelleplus humain.

Ne devrait-on pas répéter l’exercice avec vos collègues députés, avec les ministres ?

Qquand j’ai été élu à l’Assemblée nationalen 2017, je‘avoir dépôte amendements «  vie mon vie » proposer que le ministre de l’Éducation nationale aller au collège R.ep, ça celui de Santé abandons en Ehpad, qUE, ministre de la Justice faire un stage en prison. Apersonne n’a mordu à l’hameçon. Sarah Saldmann reconnaît dans le film qu’elle est déconnectéemais le problème, cc’est que ce sont les gens qui nous dirigent sont tout autant. Le puissance loin les élus, ils voirdansIl n’y a plus de gens qui ont le temps de témoigner de leur existence, de leurs fiertés, leurs difficultés. Ôn réunion certainement porte-parole, représentants, présidents des associations, mais pas de vraies personnes.. Jje pense que ce serait tout à fait nécessaireOui, que le PDG retourne à l’atelier, que le ministre se rend à la cantine d’un Ehpad.

Est-ce la France réelle que vous cherchez à décrire à travers vos films ?

EEn tout cas, une France populaire dans sa diversité. Nous allons voir Elie, le paysan du Morvan, mais aussi Eliès et Mohamed qui posent la fibre en banlieue parisienne. C’est une France dans sa diversité. Est-ce la vraie France ? je je ne sais pas. Je me considère comme un représentant du Nation, mais bien avant d’être député. À travers mon journal (Fakir, NDLR)quand je travaille à la radio, dans mes filmset maintenant depuis la tribune de l’Assemblée, je m’efforce de représenter le Nation et en particulier les plus invisibles. Parce que Sylvain, qui sait raconter son histoire pour sept minutes dans le film, nous ne le verrons pas pendant Sept minutes à la télévision. Alors oui, il y a une France qu’on ne montre pas, celui dont Macron dit que ce sont des gens qui ne sont rien mais qui font tout.

Votre film démontre également une forme de séparatisme social. Comment y remédier ?

jelya indéniablement une nécessité d’abaisser le plafond et de surélever les planchers et ainsi mettre un terme à une sorte de délire. LELes 500 premières fortunes françaises pesaient 5% du PIB il y a 30 ans. CC’était 20 % à l’arrivée d’Emmanuel Macron… aujourd’hui, nous avons dépassé les 40 %. La classe dirigeante s’est séparéed’en haut, du reste du pays. jeil faut leur ramener les pieds sur terre. Je ne le dis pas dans le film et je le regrette, mais jeIl y a une phrase de la Déclaration des Droits de l’Homme de 1789 qui dit simplement : « Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune. » En fait, la question posée par le film est exactement pourquoi un chroniqueur télé Et Un avocat d’influenceurs peut s’offrir une montre à 50 000 € tandis qu’un soignant aura tout juste du mal à survivre ? Si nous prenons la question de l’utilité sociale, nous voyons qu’il y a quelque chose qui je ne vais pas. Et cela est vrai pour de nombreuses professions. Il doit être revalorisé, rémunéré métiers de deuxième ligne. C’était toujours la promesse qui avait été faite À cœur de la crise covid et qui n / A absolument pas été tenue. AAu contraire, ce sont ceux qui étaient déjà rationnés quielNous rationnons encore plus aujourd’hui.

Les héros que vous filmez aujourd’hui votent majoritairement pour le RN. Qu’a fait (ou n’a pas fait) la gauche pour les perdre ainsi ?

M.Oui, je défends les classes populaires, quelles que soient leur origine, leur religion et leur bulletin de vote. J.il ne demande pas aux gens pour quoi ils ont voté avant de les défendrejeIl y a quelque chose qui est de l’ordre d’un pari amoureux, aussi naïf que cela puisse paraître. C‘c’est-à-dire que J’embrasse et je me dis qu’en embrassant, peut être, Je coache. Aprs, la montée au pouvoir du RN dans les classes populaires et cela vaut pour le Gardien et le Cévennes, quant au Nord-Pas-de-Calais et le Picardie –, trouve sa source, d’abord, dans le 40 ans de mondialisation que nous avons laissé arriver et qui ont contribué à briser les usines. Ôl’instabilité installée dans le cœur des classes populaires. Auparavant, il y avait une base stable : l’usine, LE comité d’entreprise, le 13ème mois, un crédit pour son drapeau Tout çaa a été détruit. La deuxième cause est l’affaiblissement de la démocratie. Quand on a un mouvement populaire comme les Gilets jaunes, il faut apporter une réponse politique., pas la police. Et ne retenant rien de la TVA à 0% sur les produits de première nécessité, de retour de l’impôt de solidarité sur la fortune, du référendum d’initiative citoyenne Et en faisant derrière une réforme des retraites refusée par 8 salariés sur 10, par tous les syndicats réunis et probablement par une majorité à l’Assemblée, qui conduit à détourne-toi de cette démocratie. Finalement, la gauche, en privilégiant le bruit et la fureur, apparaît plutôt comme une force d’instabilité. jeil doit DONC faire une pause avec un certain nombre de chosestant sur le fond que sur la forme.

Et pourtant, pour faire tomber le gouvernement, il faudra que la gauche s’allie au RN…

Cce que je vois actuellement à l’Assemblée nationale sur les votes les plus importants, par exemple le retour d’un impôt de solidarité sur la fortune, c’est un soutien de Rassemblement national au gouvernement. Emmanuel Macron et le gouvernement se sont remis aux mains du RN. Ce sont leurs adjoints qui pourront siffler la fin de la récréation mais pour pour le moment, ils apporter un soutien objectif.

Vous êtes allé soutenir les salariés en grève de Sanofi. Pour vous, est-ce symptomatique de la conjoncture politique ?

Ôna y a-t-il une multinationale qui devrait être notre base en termes de sécurité sanitaire. Et pourtant,depuis une dizaine d’années maintenantjeil y a eu la fermeture de dix sites en Francedont huit laboratoires de recherche. Etcdansce n’est pas parce que l’entreprise va mal,tChaque année, elle verse plus de 4 milliards d’euros à ses actionnaires. Là, ils décident de se débarrasser du Doliprane, de Lysoupejené, de Monasaumon fumé, Et de tous les médicaments grand public dans un objectif qui n’est pas la bonne santé des patients mais juste de pouvoir se verser encore plus de dividendes. Nous avons détruit de nombreux fleurons industriels comme celui-ci Juste dans le A : Arcelor, Alcatel, Alstom Mais j’en veux Surtout à l’étatqui devrait doit se porter garant de l’intérêt général Et protéger le pays contre les vautours. Mais là, La La Macronie est complice de Sanofi en permettant que cet outil industriel soit brisé depuis dix années maintenant.

Au programme ce samedi 26 octobre à Montpellier :

18h : Discours de François Ruffin et interventions d’ouvriers et militants (AESH, salariés d’Onet, viticulteurs) au Quartier Généreux, 2 quai des Tanneurs à Montpellier (gratuit). 19h : Déambulation en fanfare vers le cinéma Diagonal (rue de Verdun) pour assister aux deux avant-premières du film « Au Boulot » à 19h30 ou 20h30 (8 €). Sortie du film le mercredi 6 novembre.

Cammile Bussière

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