François Ozon dépeint la vieillesse dans ses petites joies et dans ses misères, dans sa beauté et dans toute sa complexité. Une rareté au cinéma.
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Après Mon crimecomédie légère et pétillante à l’américaine, François Ozon revient avec Quand l’automne arriveun film plus sombre et mélancolique, dans lequel il peint la vieillesse avec une palette pleine de nuances aux couleurs de l’automne. Le film, porté par des comédiens formidables, sort en salles le 2 octobre.
Michelle (Hélène Vincent), une mignonne petite grand-mère qui vit seule dans sa maison à la campagne en Bourgogne, est ravie à l’idée d’accueillir sa fille Valérie (Ludivine Sagnier) et son petit-fils pour les vacances de la Toussaint Lucas.
Elle prépare une fricassée pour leur arrivée avec les champignons qu’elle a ramassés en forêt avec sa vieille amie Marie-Claude (Josiane Balasko). Dans l’après-midi, alors qu’elle revient d’une promenade avec son petit-fils, sa fille est sur le point d’être transférée à l’hôpital pour une intoxication alimentaire. Il s’avère que Valérie est la seule à avoir mangé les champignons…
Avec ce nouveau film, François Ozon aborde la question de la vieillesse et des relations familiales. Entre une mère et une fille, Michelle et Valérie, mais aussi entre une mère et son fils, Marie-Claude et Vincent (Pierre Lottin). Ce fils instable vient de sortir de prison et ne tarde pas à recommencer à faire des agissements. Valérie est odieuse envers sa mère, tandis que cette dernière se met en quatre pour lui plaire et l’aider financièrement. « C’est horrible à dire, mais avec nos enfants, on a tout raté ! résume Marie-Claude.
Mais que cachent ces deux vieilles dames apparemment paisibles ? Que s’est-il passé dans leur vie qui aurait pu conduire leurs enfants au malheur et aux ornières ? François Ozon met la vieillesse au cœur de son film, avec les personnes âgées à l’honneur, pour une fois non cantonnées aux rôles de figurants. Tout le début du film, au rythme de cet âge, nous montre la vie d’une femme âgée. Les gestes du quotidien, la petite routine, le jardin, la solitude, mais aussi les petites joies, et les moments partagés avec Marie-Claude, et l’entraide.
Puis peu à peu se dévoile ce qui se cache derrière ces dos voûtés, ces visages ridés : toute une vie qui a bouillonné, avec ses difficultés et ses joies, ses secrets et ses hontes. Le film retrace la trajectoire d’une vie, celle de Michelle, indélébile liée à celle de Marie-Claude, tandis que petit à petit, comme conclusion inévitable de leur histoire, se déroule un drame que tous les protagonistes acceptent tacitement. le silence pour que tout et chacun puisse trouver sa place, et la paix.
Qu’est-ce qui est bien, qu’est-ce qui est mal ? Le mal peut-il engendrer le bien ? Le film pose ainsi la question de la vérité, du bien et du mal, de la culpabilité et de la moralité, sans qu’aucun de ces mots ne soit prononcé. Tout le monde jugera. Le réalisateur approfondit également des questions qui lui sont chères, comme l’amitié, ou encore la famille, traitées ici sous l’angle de la transmission entre différentes générations, entre différents âges de la vie.
Dans une réalisation très sobre mais pleine de clins d’oeil, qui évoque les mondes de Simenon pour la littérature ou de Chabrol pour le cinéma, Ozon déroule son histoire par petites touches, dans un rythme très lent, en accord avec la vieillesse et la mélancolie de l’automne. Il donne à Hélène Vincent, immense actrice rarement mise en avant au cinéma, un rôle principal à sa mesure. Le personnage complexe et ambigu de Michelle se révèle petit à petit à travers ce que la caméra montre et entend, mais surtout à travers tout ce qui n’est pas dit, et que l’actrice suggère à travers son jeu sensible et intense.
En face d’elle, Josiane Balasko se montre aussi convaincante qu’inattendue dans le rôle de Marie-Claude alourdie par la vie et rongée par la culpabilité. « J’ai voulu filmer des actrices de 70 et 80 ans qui portent leur âge et l’assument, sans artifice », confie François Ozon. Le casting est complété par Ludivine Sagnier, avec qui Ozon renoue vingt ans plus tard Piscineet de Pierre Lottin, qui donne au personnage de Vincent toute sa palette de nuances.
Quand l’automne arrive est un très beau film. Elle bouscule une certaine vision figée de la vieillesse qui suggère qu’après un certain âge, la vie est un long fleuve tranquille pour des êtres vidés de leur substance. À contre-courant, François Ozon fait de cette vieillesse le terreau d’un thriller mettant en jeu tous les ingrédients d’un bon drame.
Genre : Drame
Directeur: François Ozon
Acteurs : Hélène Vincent, Josiane Balasko, Ludivine Sagnier, Pierre Lottin
Pays : France
Durée : 1h 42min
Sortie : 2 octobre 2024
Distributeur : Distribution Diaphana
Synopsis : Michelle, une bonne grand-mère à tous égards, vit sa retraite paisible dans un petit village de Bourgogne, non loin de sa meilleure amie Marie-Claude. À la Toussaint, sa fille Valérie vient lui rendre visite et dépose son fils Lucas pour la semaine de vacances. Mais rien ne se passe comme prévu.