Flamme olympique à Paris : et soudain, un silence poignant devant le Bataclan
A quelques mètres du Bataclan, Arthur Dénouveaux, rescapé de l’attentat terroriste qui a fait 90 morts dans la salle de concert le 13 novembre 2015, est acclamé par la foule. Celui qui se trouvait dans la fosse au moment du drame ne fait pas son jogging, ce dimanche 14 juillet à 17h37 au 50, boulevard Voltaire à Paris (11e), il marche. D’une main, il tient haut la torche olympique et pose l’autre sur son cœur en guise de remerciement. « Arthur ! Arthur ! », crient ses camarades qui ont eux aussi échappé à la haine en ce tragique vendredi.
Puis, dans un « baiser aux flambeaux » selon la terminologie de Paris 2024, l’éclaireur à la tête de l’association Life for Paris allume la flamme de Philippe Duperron, père de Thomas, 30 ans, tombé ici il y a neuf ans sous les balles des islamistes. Soudain, c’est le grand silence, celui qui fige les visages, embue les yeux qui ont tendance à se fermer naturellement sous le poids de l’émotion.
Un moment poignant qui contraste avec le tumulte de quelques minutes plus tôt, lorsqu’un animateur sur un char partenaire du relais scandait « Bataclan, faites du bruit ! » « Une ambiance de cirque, de fête foraine à laquelle on n’est pas habitué », commente un rescapé, sans être choqué.
« Je ressens de la fierté, de l’émotion »
Pendant cent vingt secondes, le recueillement prend le pas sur la ferveur. Arthur Lamarre, violoncelliste solo de la Garde républicaine venu ici « en civil », termine la mélodie traditionnelle irlandaise Danny Boy choisie « parce qu’elle est belle » puis enchaîne avec l’allemande et la sarabande de la 1ère suite de Jean-Sébastien Bach.
La maire socialiste Anne Hidalgo est là, toute proche, aux côtés du préfet de police Laurent Nuñez. Puis Philippe Duperron, Stan Smith aux pieds et cheveux blancs en désordre, prend le relais sous les applaudissements. L’ancien avocat, président de l’association 13onze15, savoure chacun de ses pas, escorté par les gardiens de la flamme. « Je ressens de la fierté, de l’émotion, c’est un immense honneur de représenter toutes les victimes des attentats dans la joie de vivre », nous a expliqué le relayeur de « EO73 » juste avant de monter sur scène.
Les rescapés du massacre restent devant la salle de concert aux lettres bleues. Ils discutent, s’embrassent, se prennent dans les bras. « Ça fait du bien d’être avec des amis », soupire René, 59 ans. « Voir les deux responsables des associations de victimes se transmettre le flambeau, ça me touche », réagit André, qui a perdu son beau-frère. On croise aussi Nadia, 72 ans, dont la fille a été tuée ce même soir de novembre à la terrasse du café La Belle Équipe. « Je suis venue retrouver une famille, on s’est rencontrés pendant le procès », confie-t-elle.
Le symbole d’une « histoire collective que nous n’oublierons jamais »
Pour Anne Hidalgo, il était important que la flamme, en ce « jour de fête », s’arrête devant le Bataclan, symbole d’une « histoire collective que nous n’oublierons jamais ». « Paris, c’est la fête, la beauté de lieux extraordinaires et iconiques que tout le monde connaît. Mais il y a aussi ces lieux dans lesquels une part de nous continue de demeurer », commente l’édile qui a troqué sa tunique rouge du matin pour une veste bleu ciel et un jean évasé. Elle va ensuite saluer un à un les spectateurs rassemblés derrière les barrières, prenant joyeusement des selfies à chaque demande.
Pierre Rabadan, son adjoint en charge des JO, rappelle lui que « c’est suite à ces attentats qu’il a été décidé de se projeter encore plus dans les JO ». « Dans quelque chose de positif pour que Paris, ville qui représente la liberté et l’accueil du monde, puisse se relever », explique l’ancien rugbyman.