(Article publié le vendredi 11 octobre 2024 à 9h36 et mis à jour à 15h30) Après la présentation du budget 2025 à l’Assemblée nationale par le Premier ministre, l’agence de notation Fitch dévoilera, ce vendredi soir, son diagnostic de l’économie française et actualisera sa notation, actuellement à « AA- » en France, l’équivalent d’un 17 sur une échelle de 20 niveaux de notation.
Après elle, l’agence de notation Moody’s, qui classe la France un cran au-dessus de ses pairs, donnera son diagnostic sur l’économie française le 25 octobre, et S&P Global le 29 novembre. Seule l’agence Moody’s a maintenu sa note un cran au-dessus à Aa2, toujours avec des perspectives stables.
Menace de baisse de la note
Fitch pourrait donc encore abaisser sa note ou pourrait également décider d’ajouter un « perspective négative » à sa note sans la modifier, synonyme de risque de rétrogradation future.
Lors de sa dernière évaluation des finances françaises en avril, statu quo, Fitch mettait en garde contre un risque baissier en cas de « augmentation significative et persistante de la dette (…), par rapport au PIB résultant de déficits publics plus élevés que prévu « .
« En toute logique, compte tenu de la dégradation des finances publiques et du peu de leviers d’action, une ou deux agences devraient passer à une perspective négative, ce qui leur donnerait plus de marge de manœuvre pour dégrader la note l’année prochaine si nécessaire. » a expliqué un responsable à La Tribune9 octobre.
Un déficit colossal à réduire
Et pour cause, la France a révisé brutalement sa prévision de déficit pour 2024, passant de 4,4% fin 2023 à 5,1% en avril, pour finalement culminer à 6,1% du PIB, sous la limite des 3% tolérée par Bruxelles. En comparaison, l’Espagne prévoit par exemple d’afficher un déficit public de 2,5% l’an prochain, et l’Italie de 3,3%.
Pour prouver sa bonne volonté et éviter un risque de « crise financière » selon les mots du Premier ministre Michel Barnier, le gouvernement a présenté jeudi son projet de loi de finances pour 2025 prévoyant 60 milliards d’euros d’économies afin de ramener le déficit public à 5 %.
D’ampleur » relativement nouveau » Selon le président du Haut Conseil des finances publiques (HCFP) Pierre Moscovici, qui a analysé les contours macroéconomiques, cette potion, mêlant hausses d’impôts et baisses de dépenses, pourrait remettre la France sur des rails moins glissants après une année 2024 qu’il a qualifiée de « noir » JEUDI. Mais cela risque aussi, selon lui et les économistes, de peser sur la croissance l’année prochaine, actuellement anticipée à 1,1 % par le gouvernement, et de compliquer la réduction des déficits à l’avenir.
» La France fait exception » dans la zone euro, analyse le cabinet d’études Oxford Economics dans une note, soulignant que le pays « Il est peu probable qu’il réduise de manière significative son déficit dans les années à venir « .
Aucune crise de financement envisagée
Une dégradation de notation par une agence a généralement pour effet de faire monter les taux d’emprunt de la France auprès d’investisseurs dont le taux à dix ans est déjà supérieur à celui de l’Espagne et du Portugal, pays autrefois réputés plus dépensiers. Et la hausse des taux entraîne aussi une augmentation du poids de la dette, aujourd’hui deuxième poste budgétaire français derrière l’éducation.
Le ministre de l’Économie, Antoine Armand, a donc reconnu ce vendredi avoir pris en compte la notation des agences dans l’élaboration du budget. » Nous ne faisons pas de politique pour les agences de notation, mais nous regardons évidemment quel est le climat international et le regard des instituts sur la France. », a-t-il expliqué sur France 2. « Et ce regard, il est attentif (car) face à la dette colossale que nous avons, face aux déficits qui ne cessent de filer, il faut prendre des mesures « .
» Toute absence de signaux clairs de réduction du déficit public lors de l’adoption de ce budget dégradera la confiance que les marchés (…) peuvent avoir dans notre capacité à nous financer durablement et à avoir une dette soutenable. », a prévenu vendredi le ministre des Finances Antoine Armand lors d’une audition au Sénat plus tard dans la matinée.
D’autant qu’en 2025, le poids de la dette pèsera davantage sur les finances publiques. Il est prévu à 54,9 milliards d’euros, contre 50,9 milliards d’euros pour 2024. En comparaison, le premier budget de l’Etat, l’Education, s’élèvera à près de 65 milliards d’euros en 2025 et celui de la défense à 50,5 milliards d’euros.
Toutefois, la question de l’attractivité de la dette française pour les investisseurs ne se pose pas aujourd’hui, le dernier emprunt à long terme de la France de 12 milliards d’euros début octobre ayant conduit à une demande des investisseurs nettement supérieure aux besoins de la France. Par ailleurs, l’écart entre le taux d’emprunt français et celui de l’Allemagne, pays considéré comme le plus sûr de la zone euro, reste à des niveaux considérés comme peu préoccupants par les analystes.
L’objectif de déficit de la France pour 2025 semble irréaliste », estiment les experts de l’assureur-crédit Allianz Trade. Dans une note, ils anticipent une baisse à 5,5%, notamment en raison des difficiles négociations parlementaires à venir. Sur Fitch, ils jugent que « d’un point de vue historique, un placement sous surveillance négatif serait plus probable qu’une dégradation pure et simple « .
L’État français va lever 300 milliards d’euros en 2025
La France va lever un montant record de 300 milliards d’euros en 2025 pour financer ses dépenses et renouveler ses dettes précédentes, après 285 milliards d’euros pour 2024, a annoncé jeudi l’Agence France Trésor (AFT), en marge de la présentation du budget de l’Etat. 2025 par le gouvernement.
A noter : les besoins de financement de l’État sont en baisse de 12,7 milliards d’euros par rapport à 2024, selon les chiffres actualisés. Or, la France va emprunter une somme d’une ampleur inédite sur les marchés financiers et qui devrait correspondre à 10 % de son PIB en 2025. C’est « un chiffre relativement stable par rapport aux années précédentes », nuance toutefois Antoine Deruennes, directeur général de l’AFT.
En 2024, la dette souveraine française émise sur les marchés devrait représenter 9,8% du PIB, après 9,6% en 2023. Selon cette dernière, « la raison principale » On retrouve la hausse des montants à lever sur les marchés en 2025 » parce qu’il y a plus d’obligations arrivant à échéance en 2025 « .
(Avec l’AFP)