Fini les « stêques », « boulaites » et « neugâtes », le conseil d’État fait marche arrière sur l’appellation des produits végétaux
En février dernier, le gouvernement a publié un décret interdisant l’utilisation des appellations de boucherie pour les « steaks » et autres « saucisses » végétales. Le Conseil d’Etat l’a suspendue le 10 avril en raison de « doutes sérieux sur la légalité de cette interdiction ». Une victoire pour Accro, l’industriel nordiste qui avait tourné en dérision ce décret.
C’est un nouveau tournant pour les professionnels de l’agroalimentaire. Alors qu’en février, un décret a été déposé par le gouvernement pour interdire l’utilisation de noms de boucherie, comme « steak« ou la »saucisse« , sur les emballages des produits végétaux. Le Conseil d’Etat a suspendu en urgence ce décret le 10 avril. La raison ? Il y a « doute sérieux sur la légalité de cette interdiction.«
Producteur de ces alternatives végétales dont les usines sont basées à Vitry-en-Artois (62), Accro avait demandé la suspension de cet arrêté. Ce revirement est donc un véritable «la victoire» pour cet industriel de l’agroalimentaire, qui avait choisi de dénoncer le projet, avec humour.
Pour contourner le décret qui devait être appliqué à partir du 1er mai, Accro avait choisi de renommer phonétiquement ses produits. Fini les merguez et les raviolis, place aux « mairghaiz » et autres « boulaises ». Un habile tour de passe-passe, qui n’a pas manqué de faire sourire sur les réseaux sociaux.
L’argument développé par le gouvernement lors de la publication de ce décret : éviter toute confusion pour le consommateur entre alternatives végétales et produits carnés. Une confusion qui, pour les constructeurs, n’existe pas en réalité. « Surtout, cette décision nous rappelle aussi qu’il n’y a pas de confusion chez les consommateurs ; le caractère 100% végétal de nos produits est désormais assumé, visible, lisible et compris par tous » déclare Renaud Saisset, directeur général d’Accro.
Toute une industrie se réjouit de cette décision. Dans un communiqué, Happyvore, qui commercialise les marques La Vie mais aussi Umiami, parle d’un «victoire du secteur végétal. Nos steaks, chipolatas et même nos merguez garderont donc leur nom, c’est très important pour la pérennité de notre marque.«
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Dans son usine de Vitry-en-Artois créée il y a deux ans, Accro produit 10 000 tonnes de viande végétale par an.
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©Arnaud Moreau / FTV
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Le texte publié en février, lors du Salon de l’agriculture, est une réponse directe au mécontentement des agriculteurs début 2024, et s’inscrit dans une liste plus large d’une soixantaine d’engagements pris par le gouvernement pour apaiser leur colère. Une première version de ce texte avait déjà vu le jour en juin 2022, avant d’être également suspendue par le Conseil d’État.
Le juge des référés estime que cette interdiction «porterait un préjudice grave et immédiat aux intérêts des entreprises qui commercialisent ces produits« , à tel point que tous les emballages auraient dû être changés en urgence. Mais le noeud du conflit se situe à l’échelle européenne. Les producteurs de ces alternatives végétales situés hors de France n’auraient pas été soumis à cette interdiction, de quoi déséquilibrer le rapport de force avec les industriels français.
Mais alors, faut-il légiférer au niveau de l’Union ? La dénomination de ces viandes végétales par des noms issus de l’industrie de la boucherie est autorisée en Europe. En revanche, c’est beaucoup plus réglementé pour les produits laitiers. Par exemple, il n’est pas possible d’utiliser le mot « yaourt » ou « fromage » pour un substitut végétal.
Avec l’AFP