Festival du film de Cannes. Chiara Mastroianni veut s’occuper du cinéma

Il faudra attendre pour voir émerger la question sociale à Cannes. Aucune coupure de courant ne s’est produite. Il en va de même pour les manifestations contre les violences sexuelles. La tribune contestataire signée par 123 personnalités du cinéma (principalement des actrices et acteurs) n’a pas été relayée avant la présentation de Jeanne du Barry, réalisé par Maïwenn, un anti #metoo virulent. Johnny Depp, nouveau héros des réseaux masculinistes, dont le procès contre son ex-femme Amber Heard a déchaîné les passions, a été accueilli avec ferveur au pied des marches. Même Dominique Boutonnat, président du CNC mis en examen pour agressions sexuelles et tentative de viol était présent. Passez votre chemin, rien à voir.

Sous la photo de sa mère Catherine Deneuve, le visage de l’affiche officielle du festival de Cannes avec une photo tirée de la ChamadeLe film d’Alain Cavalier, Chiara Mastroianni, la maîtresse de cérémonie, a fait son entrée en donnant de la voix.

D’abord avec une chanson interprétée en italien, puis en rappelant les origines du festival de Cannes, créé en réaction à la pression exercée par l’Italie fasciste et l’Allemagne nazie sur la Mostra de Venise. « N’oublions pas que ce festival est né de l’indignation, de la colère, d’un acte de résistance, fondé en septembre 1939, à la veille d’un drame qui allait enflammer le monde. La raison d’être de notre festival était et reste l’exaltation de notre liberté. Liberté d’oser, d’imaginer, de créer, liberté d’exprimer la puissance et la fragilité de notre existence. Le cinéma ne nous a jamais déçus. C’est à nous de prendre soin de lui. »

C’est alors Ruben Ostlund, deux fois Palme d’or et président du jury, qui se lance dans un plaidoyer pour le cinéma en salles. « Ce qui est unique au cinéma, c’est de voir des films ensemble, physiquement dans la même pièce. En Suède, le seul contenu que nous voyons en famille devant la télévision est l’Eurovision. Sommes-nous bons pour faire défiler le contenu créé par des algorithmes ? Le cinéma doit être créé par des êtres humains et doit nous amener à réfléchir. Les algorithmes qui traitent du contenu n’ont qu’un seul but, c’est que nous continuions à regarder du contenu, pas à réfléchir..

S’en est suivi la très belle interprétation de Stand By Me par les Gabriel’s avant la remise d’une palme d’or honorifique à l’acteur Michael Douglas. Catherine Deneuve, semblant essoufflée, a récité un poème en hommage à l’Ukraine, oubliant même d’annoncer l’ouverture du festival de Cannes. La cérémonie, plutôt sobre, s’est terminée par une jolie blague de sa fille qui citait le cinéaste George Cukor : « le cinéma, c’est comme l’amour, quand c’est bien, c’est génial, quand c’est pas bien, c’est pas mal quand même ».