Face aux violences, les habitants de Nouméa ont mis en place des « milices armées » dans certains quartiers

De nouvelles violences ont éclaté dans la nuit de mardi à mercredi à Nouméa, où les indépendantistes s’opposent au projet de réforme constitutionnelle. Une habitante, membre des « voisins vigilants », témoigne de cette tension grandissante.

Nouvelle nuit de violences en Nouvelle-Calédonie. Au moins deux personnes sont mortes mercredi 15 mai dans les violences qui secouent le « Caillou » depuis l’examen et le vote par l’Assemblée nationale d’un projet de révision constitutionnelle visant à élargir le corps électoral de l’archipel. Emmanuel Macron a annulé une partie de son déplacement prévu dans la journée en Normandie pour présider un conseil de défense consacré à la situation dans l’archipel, a annoncé l’Elysée.

Sur place, le couvre-feu a été prolongé jusqu’au jeudi 16 mai. Malgré sa mise en place, l’île a été une nouvelle fois le théâtre de pillages de magasins, d’incendies et de violences. Le Haut-Commissaire de Nouvelle-Calédonie appelle les habitants à rester chez eux, ou à limiter au maximum leurs déplacements. « Nous sommes dans une situation que je qualifierais d’insurrectionnelle« , s’est inquiété Louis Le Franc, lors d’une conférence de presse mercredi. « L’heure doit être à l’apaisement (…) l’appel au calme s’impose« , a-t-il exigé, avant de signaler « échanges de balles entre émeutiers et groupes de défense civile à Nouméa et Paita » et a déclaré avoir fait appel aux policiers d’élite du Raid pour empêcher un groupe d’émeutiers qui se dirigeaient vers un dépôt de gaz.

« Je vous laisse imaginer ce qui se passera si les milices se mettent à tirer sur des personnes armées», a insisté le Haut-Commissaire : « On est dans une spirale mortelle, ces jeunes que je qualifie d’émeutiers doivent arrêter« .

Certains habitants, terrifiés, mettent en place leur propre protection à travers des groupes, appelés « voisins vigilants » : « Nous nous sommes organisés en groupes internet sur les réseaux sociaux pour nous informer tous les soirs en temps réel, sur ce qui se passe dans la rue à une heure précise », explique Nadine. Elle vit dans le quartier de la Vallée-des-Colons à Nouméa avec son fils et son mari où des barricades ont été érigées avant l’entrée en vigueur du couvre-feu. Elle n’a quitté sa maison que lorsqu’elle a été obligée d’éteindre les incendies déclenchés dans sa rue. Elle l’assure : si elle a vu passer quelques pompiers et policiers, les violences aussi reprennent.

Preuve de la situation d’insécurité croissante, les vidéos amateurs diffusées sur les réseaux sociaux. Sur des images publiées sur Facebook, on voit des hommes se promener dans un quartier de Nouméa. Ils sont casqués et armés de barres et de bâtons de fer : ils veillent, assure Nadine.

« Des quartiers de Nouméa ont mis en place des milices, avec des patrouilles et des gens qui sont malheureusement armés parce qu’ils ont peur. Nous avons peur. »

Dans une vidéo publiée sur Dans une autre vidéo de La 1ère, on peut voir les forces de l’ordre donner des consignes de prudence et de calme à ces riverains.

« Dans d’autres endroits, il n’y a pas de milices parce qu’il n’y a pas de capacité organisationnelle pour le faire.continue Nadine. Cela dépend de la géographie des quartiers, des populations qui y vivent et de la diversité qui y règne. Il y a une montée en puissance qui semble s’être produite dans la nuit. » Elle craint désormais que les violences ne s’intensifient encore.

De son côté, le ministre de l’Intérieur et de l’Outre-mer Gérald Darmanin a évoqué «des centaines« des blessés en Nouvelle-Calédonie depuis lundi, dont un »cent» de policiers et de gendarmes. La police a procédé au total à 140 interpellations dans la seule agglomération de Nouméa, selon un nouveau bilan établi par Louis Le Franc.