Face à l’extrême droite, pour les féministes « il n’y a pas de débat »
« L’assemblée féministe de banlieue parisienne appelle à adhérer au Front populaire, il n’y a pas de débat », assume Aya Meroni, une enceinte en main. Derrière elle, le Bloc Rose affiche la couleur sur sa banderole : « Drag en colère contre le fasciste ». « Nous vivons actuellement un tournant historique, poursuit Aya Meroni. Il faut mettre certaines choses de côté. C’est comme ça et nous avançons. Si le RN est au pouvoir demain, la question ne sera pas de savoir s’il y a des députés accusés de violences sexuelles, mais si on aura le droit de faire campagne en tant que femme ou minorité de genre, si des transitions seront possibles, si le droit à l’avortement sera possible. être sauvegardé. »
Le maintien de candidats condamnés pour violences conjugales comme Adrien Quattenens (FI), ou comme l’ancien ministre des Solidarités Damien Abad, lié à Renaissance, et mis en examen pour tentative de viol ont bousculé toute la semaine la sphère féministe. Des pétitions, des lettres internes au parti ou des adresses plus personnelles sur les réseaux sociaux ont tenté d’empêcher leur investiture. Sans succès. « Le signe des féministes est violent, réagit Mathilde Viot, qui a créé l’Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique. Cela veut dire : tais-toi, on verra plus tard. Ces politiques ne comprennent pas que la méthode va avec le fond, elle est indispensable s’ils veulent attirer les électeurs aux urnes et leur donner confiance. » Du côté d’EELV, visé par une plainte pour violences psychologiques de son ex-compagne, Julien Bayou a préféré ne pas se représenter. « Mais dans sa circonscription, plutôt que de faire appel à une féministe EELV pour le remplacer, remarque Mathilde Viot, Ils ont préféré chercher quelqu’un qui n’est pas du parti, un membre du cercle politique restreint. Toutes les candidatures féministes ont été rejetées. » Malgré cela, la militante #MaVoixMonChoix qui milite pour le libre accès à l’avortement dans toute l’Europe, a décidé de s’engager auprès de l’union de la gauche. « Dès dimanche soir à 18 heures, lorsque les candidatures seront définitives, je me rangerai derrière le Front populaire. »
Au-delà des déceptions, du dégoût face à certaines manœuvres, le mouvement féministe se rassemble en force pour affronter le RN. Vendredi 14 juin, une centaine d’associations et collectifs très différents ont sonné « alertes féministes » en appelant à manifester partout en France le 23 juin et à bloquer l’extrême droite qui « est obsédée avant tout par la violation des droits et libertés d’une grande partie de la population : les femmes, les personnes racisées, handicapées et LGBTQIA+, les migrants, les filles et les enfants. » Toutes ces organisations demandent à voter en masse « pour un avenir qui permette l’émancipation et la liberté de tous ». Et déjà, ils étaient nombreux ce samedi, avec le monde du travail et des fêtes, comme le Planning Familial, les membres de #NousToutes, Osez le Féminisme…
Derrière les drapeaux multicolores des « trans, pd, gouines » du Bloc Rose, la Palme d’Or féministe 2023 se fait discrète. Justine Triet, la directrice deAnatomie d’une chuteje voulais manifester ce samedi parce que « Il n’y a pas le choix. » Face au RN, sans naïveté mais avec engagement, les féministes ont décidé d’agir en groupe. Une véritable leçon politique.
Kareen Janselme