Face à la menace chinoise, l’Australie dévoile une nouvelle stratégie de défense pour protéger ses intérêts dans le Pacifique
(Article publié le mercredi 17 avril 2024 à 7h46 et mis à jour à 10h51) C’est sans précédent. Ce mercredi, l’Australie a présenté sa toute première stratégie de défense nationale axée sur le Pacifique. Son objectif est de répondre aux « Tactiques coercitives » de la Chine, car cette région est confrontée à un risque croissant de conflagration régionale.
« Les hypothèses optimistes qui guidaient la planification de la défense après la fin de la guerre froide ont disparu depuis longtemps. » a déclaré le ministre de la Défense Richard Marles, qui a dressé un sombre tableau de la situation sécuritaire régionale.
Soulignant que « La Chine a eu recours à des tactiques coercitives pour atteindre ses objectifs stratégiques. » le ministre a souligné que « L’Australie n’a plus le luxe d’une fenêtre d’alerte stratégique de dix ans en cas de conflit », comme sa doctrine l’a soutenu jusqu’à présent.
L’Australie veut protéger ses intérêts dans le Pacifique
Au lieu de se concentrer sur une armée capable d’accomplir différentes tâches presque partout dans le monde, l’Australie se concentrera désormais sur la protection de ses intérêts dans sa région immédiate, a-t-il détaillé.
« Nous sommes une nation insulaire engagée dans le commerce maritime », a-t-il souligné, ajoutant que l’Australie doit être capable d’empêcher ses ennemis d’empêcher l’accès à des voies de navigation vitales. Concernant le risque de « Invasion de l’Australie »contre’« C’est une perspective peu probable dans tous les scénarios, précisément parce qu’un adversaire peut causer beaucoup de dégâts à notre pays sans jamais avoir à mettre les pieds sur le sol australien », a expliqué Richard Marles.
Au cœur de cette stratégie se trouvent le développement d’une flotte de sous-marins furtifs à propulsion nucléaire, le triplement de ses capacités de missiles et le développement d’une vaste flotte de combattants de surface.
« Disposer de la marine la plus efficace de notre histoire sera au cœur de notre plan et de notre stratégie de refus d’accès (approche défensive visant notamment à empêcher un adversaire d’atteindre son objectif, ndlr) »il a en outre précisé.
Alliance Aukus
L’annonce de cette stratégie intervient alors que l’Australie est membre avec les États-Unis et le Royaume-Uni (et bientôt le Japon) de l’alliance Aukus fondée en 2021, qui vise à renforcer les liens de défense entre ces pays, sur fond de puissance militaire croissante de la Chine. en Asie-Pacifique.
Le premier pilier de ce pacte consiste à doter l’Australie d’une flotte de puissants sous-marins à propulsion nucléaire. Le deuxième volet majeur concerne la cyberguerre, l’intelligence artificielle (IA) ainsi que le développement de drones sous-marins et de missiles hypersoniques à longue portée.
Le Premier ministre australien Anthony Albanese a récemment déclaré que la participation du Japon ne concernerait que le deuxième pilier de l’accord.
Tensions avec la Chine
Les dernières déclarations de l’Australie ne sont cependant pas du goût de Pékin. » La Chine ne constitue une menace pour aucun pays », a déclaré à la presse Lin Jian, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères. Avant de préciser que le pays est « engagé sur la voie du développement pacifique, poursuit fermement une politique de défense nationale de nature défensive et s’engage à maintenir la paix et la stabilité dans la région Asie-Pacifique et dans le monde en général ».
« Nous espérons que la partie australienne pourra (…) abandonner sa mentalité de guerre froide, faire davantage pour sauvegarder la paix et la stabilité régionales et s’abstenir de lancer à tout moment des accusations infondées contre la Chine », a-t-il ajouté. il ajouta.
Les tensions se sont accrues dans la région Pacifique, notamment du côté de la mer de Chine méridionale qui borde cet océan, et par où transitent chaque année des milliards de dollars de marchandises. Pékin revendique la quasi-totalité des îles situées dans ces eaux, tandis que d’autres pays voisins – comme les Philippines, mais aussi le Vietnam, la Malaisie et Brunei – ont des revendications concurrentes, parfois superposées. Le chef de la diplomatie chinoise, Wang Yi, a également réaffirmé, début mars, que son pays « défendre (ses) droits légitimes conformément à la loi ». D’autant que plusieurs incidents se sont produits récemment dans cette zone. Le 5 mars, les garde-côtes philippins ont notamment accusé leurs homologues chinois d’avoir provoqué des collisions avec deux de leurs bateaux et d’avoir blessé quatre de leurs personnels avec des canons à eau.
Autre point de tension : la question de Taiwan, île bordée à la fois par la mer de Chine méridionale et l’océan Pacifique et que Pékin considère comme l’une de ses provinces – bien qu’il n’exerce aucune souveraineté sur ce territoire insulaire de 23 millions d’habitants et ses îles adjacentes – et n’exclut pas d’en prendre le contrôle un jour, par la force s’il le faut.
Canberra cherche également à étendre son influence dans le Pacifique
La volonté de la Chine d’étendre son influence dans la région du Pacifique inquiète donc les puissances occidentales, notamment l’Australie. D’autant que Pékin a signé un vaste pacte de sécurité signé en 2022 avec les Îles Salomon, faisant craindre l’implantation d’une base militaire chinoise dans cet archipel du Pacifique. La Chine et les Îles Salomon ont toutes deux nié cette possibilité, mais les détails de l’accord n’ont jamais été révélés.
De son côté, Canberra, qui entend également renforcer ses liens dans ce domaine face à la présence inquiétante de Pékin, a proposé en novembre 2023 d’offrir progressivement l’asile climatique à quelque 11 000 citoyens de Tuvalu, micro-État du Pacifique et dont le un territoire entier pourrait à terme devenir inhabitable. Un pacte qui peut représenter une victoire stratégique pour l’Australie. Concrètement, le traité comprend notamment un volet défense, engageant l’Australie à venir en aide à Tuvalu en cas d’« agression militaire », mais aussi de catastrophe naturelle ou de pandémie.