Gaël Monfils n’avait plus battu un top 5 en Grand Chelem depuis David Ferrer à Roland-Garros en 2008, sa seule victoire à ce niveau dans les Majeurs. Qu’il réalise cet exploit dix-sept ans plus tard, à un âge (38 ans et 147 jours à la fin du tournoi) qui fait de lui le deuxième homme le plus âgé depuis 1991 à se classer en deuxième semaine d’un Grand Chelem, est la marque d’un grand accomplissement.
Il ne fait pas son âge, c’est évident. Beaucoup trop faible au moment de finir un point au filet, Taylor Fritz l’a trouvé à ses dépens ce samedi (3-6, 7-5, 7-6 (1), 6-4). Il n’a jamais vu le « Vétéran français », comme on dit ici, faiblir un seul instant durant les 3h08 du match. Présent sur presque toutes les balles, féroce et taquin aussi pour placer quelques drop shots et slices de revers.
Le Français a largement su faire douter l’Américain dans une ligne de jeu qu’il a su maintenir tout au long du match. Il fallait pouvoir contenir les bombardements américains et Monfils y parvint en se montrant intraitable en défense. Il fallait imposer sa puissance de frappe et Monfils l’a fait en accélérant sur des frappes qui laissaient son adversaire sans réaction, et parfois même en une série de quatre contres consécutifs. Il y avait l’idée d’un équilibre presque idéal, magnifié par une grande qualité de service (82% de points gagnés au premier ballon). Monfils vintage et intemporel contre un Fritz qui manque sans doute d’ébauche de plan B lorsqu’il ne parvient pas à faire dérailler l’adversaire dans son rythme de jeu.
Malgré la perte du premier set, la faute à un jeu mal négocié à 4-3 conclu par une double faute, Monfils est resté serein, s’adaptant juste avec une envie plus visible d’activer la machine à parpaing. Il livre une ronde très propre avec quatre blanchissages sur ses mises en jeu (deux points perdus au total), tandis qu’à 6-5 contre lui, Fritz capitule en s’offrant la ronde sur deux grosses fautes.
As sur balle de match
Dans le troisième set, Monfils n’a rien lâché, ni en attaque, ni en défense. Il s’assiéra dans la loge des entraîneurs du côté court pendant que Fritz prendra un temps mort médical au milieu du tour pour faire soigner son pied marqué par de grosses ampoules. S’il obtient les seules opportunités de break, tout se résume à un tie-break. Et quel tie-break ! Lob, retour de fusée, ace, accélération en coup droit le long de la ligne, martèlement en tout genre sur la balle de set : Fritz n’y voit que du feu et Monfils met Margaret Court en déroute (7-1).
Malmené dans le quatrième set, le Français a dû sauver deux balles de break à 2-1 grâce à deux services, dont la deuxième fois sur le deuxième ballon, comme le signe d’une journée de belle réussite. A 4-4, Monfils profite d’une nouvelle accélération fabuleuse du revers et de deux montées approximatives pour s’échapper. Il pouvait lever les yeux au ciel avant de servir pour ce match, l’un des plus aboutis de sa carrière. Et ce n’est pas une double faute au départ qui allait gâcher le tableau, complétée par un lob défensif sur la ligne et un ace pour finir, son 24e.
Hourra pour Margaret Court. « J’avais le sentiment que je pouvais bien bouger, tenir le rythme, il a souri lors de l’entretien sur le terrain. Et j’ai fait le boulot ! J’ai la grande conviction que je peux créer des dégâts. Et nous voilà dans la deuxième semaine d’un Grand Chelem ! »