Dans les colonnes de FoisLe chanteur américain Bruce Springsteen a récemment déclaré qu’il ne mangeait qu’un seul repas par jour pour « rester mince et en forme ». Le point de vue d’un nutritionniste sur ce régime un peu extrême.
Bruce Springsteen a fêté ses 75 ans en septembre et le célèbre chanteur Né aux États-Unisactuellement en tournée mondiale, clame à qui le veut qu’il est « au meilleur de sa forme ». La raison de cette énergie infatigable se trouve, entre autres, dans son alimentation particulière. La chanteuse américaine serait une adepte du régimeUn repas par jour (OMAD), ou « un repas par jour » en français, qui, comme son nom l’indique, consiste à manger une seule fois par jour. C’est Chris Martin, leader de Coldplay, qui a dévoilé la vérité en mars dernier dans le podcast Conan O’Brien a besoin d’un ami déclarant qu’il avait réussi à maintenir sa silhouette élancée en s’inspirant de Bruce Springsteen. Ce dernier a récemment confirmé ces déclarations dans les colonnes de Fois précisant toutefois manger « un peu de fruit le matin » et seulement le dîner ensuite pour « rester mince et en forme ». Faut-il y voir un exemple pertinent d’alimentation ?
Perte de poids et détox
Pour bien comprendre le sujet, rappelons que ce régime consiste en une forme de jeûne extrême durant lequel on s’abstient de manger pendant une très longue période de 23 heures. Peu importe que vous préfériez manger le matin, le midi ou le soir, l’idée est avant tout de rassembler toutes les calories nécessaires en un seul repas. Et qu’est-ce qu’on met dans l’assiette ? Aussi surprenant que cela puisse paraître, il n’y a aucune directive nutritionnelle dans les articles faisant la promotion du régime : il est possible de manger ce que l’on veut. Quant aux boissons, il est conseillé d’opter pour celles sans calories : eau, thé, café.
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Parmi les bienfaits du régime OMAD plébiscités par ses adeptes, on retrouve en tête l’argument de la perte de poids. « L’effet est très rapide », commente Claire Kalchman, médecin du travail et nutritionniste. De manière très réductrice, on peut dire que ce régime déclenche un processus appelé « cétose » qui permet à l’organisme de faire baisser la glycémie et ainsi de brûler des graisses à la place des glucides pour produire de l’énergie. Il a également un effet détox sur l’organisme car le jeûne permet de reposer le système digestif.
Des conséquences dévastatrices sur le corps et l’esprit
En revanche, ces effets sur l’organisme ne sont ni durables ni bons pour notre santé, souligne le médecin. « Le négatif l’emporte largement sur le positif », poursuit-elle. En demandant au corps de s’affamer subitement, on risque très vite d’être déficient, déshydraté, somnolent et irritable. Et par la suite, quand on mange normalement ensuite, ou quand on a des fringales – ce qui ne peut qu’arriver – on va prendre du poids très vite et peut-être même plus qu’avant.
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Les conséquences sont également mentalement dévastatrices. « De nombreux troubles compulsifs de l’alimentation sont révélés suite à ce type de régime », note le Dr Claire Kalchman. C’est extrêmement dangereux, surtout quand on sait que cela touche de plus en plus une population jeune.»
Plusieurs alternatives
Si l’expérience du jeûne vous intéresse, il existe cependant une alternative moins extrême : le jeûne intermittent, qui consiste à ne rien manger pendant une plage horaire définie. Il existe plusieurs variantes : le jeûne un jour sur deux, un jour par semaine, le « régime 5:2 » (cinq jours d’alimentation équilibrée et deux jours de restriction calorique), ou encore le jeûne « nocturne », soit 16 heures sans manger. Mais l’efficacité de ce régime sur la perte de poids – comme sur la santé en général – ne fait l’objet d’aucun consensus scientifique, rappelle le médecin. La recherche sur le jeûne intermittent présente de nombreuses limites. « Elles sont généralement réalisées sur de petits échantillons de personnes et sur de courtes périodes, et leurs résultats sont souvent mitigés, rapporte le journal. Le New York Times ce 1er novembre Alice H. Lichtenstein, scientifique et professeur au Centre de recherche en nutrition humaine Jean Mayer de l’Université Tufts (Massachusetts).
Il n’existe pas une approche unique de l’alimentation, chacun a la sienne, en essayant de la rendre la plus équilibrée possible.
Claire Kalchman, médecin du travail et nutritionniste
Si vous souhaitez surveiller votre poids et plus généralement prendre soin de votre santé, le Dr Claire Kalchman préfère vous recommander un régime moins restrictif : le régime à index glycémique bas. En réalité, tous les aliments ont un indice glycémique (IG) indiquant la rapidité avec laquelle le sucre est absorbé dans le sang après avoir ingéré ledit aliment. Plus cet indice est élevé, plus l’aliment augmente le taux de sucre dans le sang, au point de nous exposer davantage à la fatigue, aux fringales et à la prise de poids. D’où l’importance de privilégier les aliments dits « à faible IG » (féculents entiers, légumes verts, oléagineux, fromages à pâte dure). « C’est un régime recommandé aux personnes diabétiques, à celles souffrant de pathologies chroniques et il peut être facilement étendu à tous les membres de la famille », résume le spécialiste, qui sort ce mois-ci un livre de recettes dédié à ce thème (1).
Le moyen idéal pour entretenir une relation apaisée avec son assiette ? Écoutez-vous, souligne enfin le médecin. « Plus que de se forcer à jeûner à tout prix, il faut écouter son ressenti, poursuit-elle. Il n’y a pas une approche unique de l’alimentation, chacun a la sienne, en essayant de la rendre la plus équilibrée possible. Et si vous n’y parvenez pas, être accompagné par un médecin spécialiste est indispensable.
(1) Claire Kalchman est l’auteur de Claire au matcha cuisinant à faible IGillustré par Carotte et Moutards, publié aux Éditions Eyrolles, 160 pages, 18,90 €.