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Est-ce la faute d’Elon Musk si Airbus veut supprimer 2 500 postes ?

Est-ce la faute d’Elon Musk si Airbus veut supprimer 2 500 postes ?

Le couperet est tombé, sans surprendre grand monde. Airbus Defence & Space (ADS) – la branche qui regroupe les activités spatiales et militaires du géant européen – vient d’annoncer son intention de supprimer 2.500 postes. Cela représente 7% de ses 35 000 salariés. La « répartition » de ces départs, dont les syndicats espèrent qu’aucun ne soit contraint, ne sera connue que le 4 décembre.

Cette annonce, qui n’augure rien de bon pour les 5 000 salariés du site toulousain, intervient après celle de Thales Alenia Space, l’autre mastodonte des satellites, qui va faire supprimer 1 300 emplois. Les temps sont donc particulièrement durs pour les constructeurs de satellites européens, après des décennies au firmament. Chez SpaceX, Elon Musk affiche une forme étincelante. La galaxie en expansion du milliardaire américain suffit-elle à expliquer cette éclipse des Européens ? Oui, mais pas seulement.

Concurrence féroce de Starlink de SpaceX

Espace L’Europe s’est imposée en construisant de grands satellites de télécommunications placés en orbite géostationnaire, à 36 000 km de la Terre. Mais c’était avant. Avant qu’Elon Musk ne lance Starlink, sa constellation de satellites Internet plus légers en orbite basse. Avec sa fusée Falcon 9, qui décolle presque toutes les deux semaines, SpaceX propose aux opérateurs des solutions moins chères. Il devient à la fois le premier lanceur et le premier opérateur de satellites au monde. « L’Europe a perdu la moitié du marché des satellites en dix ans », souligne auprès de l’AFP Pierre Lionnet, directeur de recherche à Eurospace, qui regroupe les constructeurs spatiaux européens. « Avec 5 000 satellites en orbite basse, puis 12 000, et 42 000 à terme, SpaceX accapare une très grande partie du marché des télécommunications spatiales, au détriment des opérateurs traditionnels », constate également Thierry Prefol, délégué syndical central CFE-CGC chez ADS.

Concurrence (trop) féroce entre concurrents européens

En Europe, trois grands constructeurs de satellites se tirent dessus et parfois se tirent une balle dans le pied : ADS, le franco-italien Thales Alenia Space et l’allemand OHB. « Ils se livrent à une concurrence féroce pour remporter les marchés, explique Thierry Prefol, en prenant le plus de risques possibles : risques financiers, en réduisant les prix de vente, risques technologiques en proposant des technologies non matures, risques planifiés en proposant des délais de plus en plus courts. . Et plus nous prenons de risques, plus la probabilité que ces risques se matérialisent augmente. Pour le syndicaliste, ADS ne manque pas de contrats, bien au contraire, en revanche leur prix « ne couvre pas les montants de développement », ce qui explique les pertes assez colossales de la branche satellite ces deux dernières années.

Les dirigeants de l’industrie spatiale ont levé un tabou en évoquant une fusion entre Thales Alenia Space et ADS, pour construire un « Airbus », au sens success story aéronautique du terme, de satellites. Mais si la démarche est franchie, il faudra encore convaincre les autorités de la concurrence et les voisins allemands de son bien-fondé.

Freins et lourdeur spécifiques au spatial Europe

Quand Elon Musk a failli remplacer la NASA, avec la bénédiction du gouvernement américain, en lui vendant par exemple ses fusées deux fois plus cher qu’à un client privé, et que les Etats-Unis, la Chine et même le Japon font de l’espace une arme politique comme une autre, en Europe, tout n’est pas si simple. Les pays regroupés au sein de l’Agence spatiale européenne (ESA), lorsqu’ils sont d’accord, n’ouvrent pas si facilement le tiroir-caisse. « En termes de masse lancée en orbite, les programmes spatiaux publics européens sont 6 à 8 fois inférieurs à ceux des autres grandes puissances », explique, dans un rapport sur l’Europe spatiale, le chercheur Paul Wohrer de l’Institut français des relations. Internationale (IFRI). Même Josef Aschbacher, directeur de l’ESA, le reconnaît : « L’Europe a beaucoup d’excellence et dans certains domaines a les mêmes capacités que les États-Unis, mais en termes d’accès au financement, l’écart est de 1 à 6 dans le secteur public. », confiait-il récemment.

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Depuis sa création en 1975, il existe également une « règle de retour géographique » à l’ESA. Tout « petit » pays qui participe financièrement à un programme spatial doit bénéficier, dans les mêmes proportions, des retombées industrielles. « Cela oblige les maîtres d’œuvre satellitaires, comme ADS, à s’associer à une entreprise unique dans ce pays qui n’est pas forcément la plus compétitive dans son domaine », déplore Thierry Prefol. SpaceX n’a ​​pas ce genre de tracas. Il gagne évidemment en agilité.

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