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ENTRETIEN. Pourquoi le prix des mutuelles va exploser en 2025 : « La hausse sera de 12 à 15% », c’est un vrai scandale ! »

ENTRETIEN. Pourquoi le prix des mutuelles va exploser en 2025 : « La hausse sera de 12 à 15% », c’est un vrai scandale ! »

l’essentiel
Le projet de budget 2025 de la Sécurité sociale du gouvernement Barnier prévoit d’augmenter la part de la complémentaire santé pour les consultations médicales et de réduire celle de l’Assurance maladie. C’est la principale raison de l’explosion des tarifs des mutuelles annoncée pour 2025. Entretien avec l’économiste de la santé Frédéric Bizard.

Les mutuelles ont annoncé qu’elles devront augmenter le montant de leurs cotisations l’année prochaine, afin de financer de nouvelles dépenses… Quelles sont-elles ?

C’est un châtaignier, nous y avons droit chaque année. Mais cette fois, la hausse sera très forte, de l’ordre de 12 à 15 %. Pour plusieurs raisons. Il y a d’abord un élément structurel : l’augmentation des frais de gestion, qui est toujours de 2 à 3 %, un peu au-dessus de l’inflation, soit 300 à 400 millions d’euros par an. Et ce malgré l’évolution des technologies numériques qui sont pourtant sources de gains de productivité.

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Et pourquoi pensez-vous que l’augmentation dépassera 12 % l’année prochaine ?

Car il est prévu, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2025, de donner une place encore plus importante aux mutuelles. Si la loi est adoptée, ou si elle fait l’objet du 49.3, ils seront quasiment à égalité avec l’assurance maladie pour le remboursement des consultations, qui sont la porte d’entrée au système de santé. Cela correspond à un transfert de coûts de la sécurité sociale vers les mutuelles de 1,2 milliard d’euros. A titre de comparaison, en 2023, il y a eu un transfert de 500 millions d’euros lors du démboursement d’une grande partie des frais dentaires par la sécurité sociale. Et les mutuelles ont alors augmenté leurs tarifs de 8 %, soit 4 milliards d’euros.

Économiste de la santé, Frédéric Bizard vient de publier « Les itinérants de la santé », aux éditions Michalon.
RD

Êtes-vous en train de dire qu’une économie de 500 millions d’euros pour la Sécurité sociale représente une augmentation de 4 milliards d’euros du coût de la complémentaire santé ?

Oui, il y a un véritable effet d’aubaine pour eux. Chaque fois qu’un gouvernement décide de leur transférer les coûts des soins de santé publics, c’est-à-dire de privatiser une partie du système de santé, ils en profitent. Y compris les mutuelles, qui n’ont plus grand-chose en matière de mutualisme et fonctionnent sur le modèle des assureurs privés, donc dans un but lucratif. Ce ne sont pas du tout des enfants de chœur. D’après mes calculs, on arrive à un ratio de un pour cinq : pour un euro de dépenses de santé économisé, les clients des mutuelles doivent payer cinq euros de plus. Je ne jette pas la pierre aux complémentaires santé, c’est le système qui permet cela.

Qui sera le plus pénalisé par la hausse des tarifs des mutuelles ?

Il s’agit des inactifs et des indépendants, car les autres ne paient que la moitié de leur complémentaire santé. En première ligne, il y aura les retraités, qui sont les vaches à lait du système. Pour eux, la hausse représentera en moyenne autour de 250 euros l’année prochaine. Alors que le tarif de leur mutuelle est déjà trois fois plus élevé, en raison de leur âge. Encore une fois, nous sommes sur un modèle d’assurance classique dont le prix augmente en fonction du risque. Conséquence : les retraités des classes moyennes vont tenter de conserver un contrat de complémentaire santé, mais ils devront en dégrader la qualité : moins de soins leur seront remboursés.

La gestion du système de santé est-elle plus efficace lorsqu’elle est confiée à une complémentaire santé ou à une assurance maladie ?

Avec des coûts de gestion de plus de 20 % dans le secteur privé, le secteur public est infiniment plus efficace. C’est au-delà de toute mesure. Nous détruisons un système de santé universel et solidaire dont la construction a pris des décennies. Et on laisse le contrôle, presque sans régulation, à des opérateurs privés dont les contrats sont parfaitement opaques. C’est un véritable scandale.

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