ENTRETIEN. « L’idée est de livrer le premier train d’ici la fin de l’année », assure Alain Picard, après plusieurs problèmes techniques

Depuis 2018, l’État et la SNCF se sont engagés dans la régénération et la modernisation de la ligne ferroviaire Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, autrement appelée POLT. L’investissement de 2,5 milliards d’euros devrait permettre d’améliorer les temps de trajet, la régularité des trains et le confort des passagers. Il s’agira d’une augmentation des fréquences de 10 à 11 trajets quotidiens, dont 5 vers Cahors et 3 vers Toulouse. Cela impliquera également de remplacer les trains Corail actuels par de nouveaux, plus rapides.

Au total, 28 trains « Oxygène » composés de dix voitures ont été commandés à CAF France.* Son usine de Bagnères-de-Bigorre, dédiée à la construction de tramways, n’est pas concernée par ce projet. Les 7 premiers trains seront construits à Beasàin en Espagne, les 21 restants à Reichshoffen en Alsace. Mais tout ne se passe pas comme prévu. La livraison de l’ensemble de la flotte initialement prévue en avril 2026 vient d’être reportée à décembre 2027. Alain Picard, le directeur général de CAF France et Nicolas Guinault, le responsable technique du projet Oxygène, évoquent les raisons de ce décalage.

DDM : Depuis la signature du contrat en décembre 2019, la fabrication de ce nouveau train a bien avancé malgré un contexte difficile…

Alain Picard : Tout d’abord, il faut rappeler que nous sommes partis d’une feuille blanche et que ce train est vraiment de très grande qualité. Il pourra accueillir 420 passagers dont 103 en première classe. Le confort intérieur a été particulièrement soigné et des efforts notables ont également été réalisés en matière d’acoustique et d’accessibilité. Il y a des espaces à bagages, des prises électriques, un service de restauration… Et en termes de performances, ce train aura une vitesse de 200 km/h. En règle générale, le développement de trains de ce type prend entre cinq et sept ans.

Cela dit, un certain nombre de problèmes sont effectivement apparus : crise sanitaire, difficultés d’approvisionnement, etc. En Espagne, entre mars et décembre 2020, 30 % du temps a été marqué par des confinements totaux ou partiels, et le lancement du projet a donc été excessivement difficile. Les bureaux d’études étaient à l’arrêt, nous avions des difficultés à nous coordonner avec les fournisseurs, il y avait un problème de ressources, puis la guerre en Ukraine est arrivée. Là-bas, nous avons rencontré des difficultés à travailler avec les fournisseurs et à nous procurer des matières premières et des composants. Au final, en décembre 2023, nous avions anticipé un retard de huit mois dans la livraison des 28 trains par rapport au calendrier initial, en décembre 2026 au lieu d’avril.

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DDM : Et puis, il y a deux mois, lors de la phase de développement du train, vous avez rencontré des problèmes techniques. De quelle nature ?

Alain Picard : En février dernier, lors de nos essais, deux difficultés techniques au niveau des freins et des moteurs sont apparues. Nous avons donc arrêté les tests. Les problèmes ont été identifiés. Celui sur les freins, l’usure prématurée des plaquettes de frein, est en passe d’être résolu. Celui sur les moteurs nécessite cependant une analyse de la part du fournisseur Melco, filiale de Mitsubishi.

Nicolas Guinault : Nous avons observé des écarts sur certains paramètres sur deux des huit locomotives du train. Ces moteurs seront donc envoyés au Japon pour des tests. Pour l’instant, la dérive de ces paramètres n’a pas été identifiée. Nous pensons néanmoins qu’il s’agit d’une petite alerte et que les conséquences sur le cours des événements seront limitées.

DDM : Quel est le nouveau calendrier de livraison ?

Alain Picard : L’idée est de livrer le premier train d’ici la fin de l’année. Il permettra à la SNCF et aux chauffeurs de s’en charger. Nous en livrerons plusieurs autres l’année prochaine et d’ici décembre 2026, nous devrions avoir livré un peu moins de la moitié des 28 trains. Le reste sera livré courant 2027. C’est une situation que nous regrettons évidemment fortement.

DDM : Comment la SNCF réagit-elle à ce retard ?

Alain Picard : En fait, la SNCF ne peut pas bien réagir puisqu’elle en subit les conséquences mais aujourd’hui les relations sont axées sur la résolution de problèmes techniques.

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