entre sentiment de rejet et affirmation identitaire, le football en ex-RDA tente encore d'exister
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entre sentiment de rejet et affirmation identitaire, le football en ex-RDA tente encore d’exister

L’équipe de France affronte les Pays-Bas vendredi à Leipzig, seule ville de l’ex-RDA à accueillir des matches de l’Euro.

France Télévisions – Éditorial Sport

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Un seul des stades hôtes situés en ex-RDA, seulement trois joueurs nés en ex-Allemagne de l’Est parmi les 26 de la sélection allemande… Même 34 ans après la réunification du pays, l’Euro qui y est organisé reflète les disparités. qui existent encore dans le football entre les territoires de l’ancienne République fédérale allemande (RFA) et de la République démocratique allemande (RDA). Le RB Leipzig, dont la Red Bull Arena sera le théâtre de France-Pays-Bas vendredi 21 juin, ne représente pas vraiment sa région. Il est même rejeté par les fans orientaux en raison de son manque d’histoire et de tradition.

« Qui ne se laisse pas acheter par l’Occident ? L’Union de Fer !. Chaque semaine, les supporters de l’Union Berlin, seul club de Bundesliga situé en ex-RDA avec le RB Leipzig, chantent leur rejet du capitalisme occidental. Un rejet qu’ont ressenti les clubs de l’Est au moment de la réunification, alors que seulement deux places leur étaient accordées dans le nouveau championnat national, et qu’ils devaient faire face à une nouvelle économie. « En RDA, tous les sports étaient réglementés par l’État, comme dans tous les pays de l’URSS, donc toutes les organisations étaient financées par le parti, explique Jutta Braun, présidente du Centre d’histoire du sport allemand. Ce système s’est effondré et les clubs ont dû trouver eux-mêmes des financements, sauf qu’en général ils recherchent des sponsors dans leur zone régionale et que l’environnement économique à l’Est n’est pas aussi stable qu’à l’Ouest.

Outre cette ouverture forcée au capitalisme, les clubs de l’ex-RDA doivent faire face à la mondialisation du football, avec l’arrêt Bosman qui, en 1995, a mis fin au quota de joueurs étrangers dans les clubs. « Cette décision a provoqué une forte augmentation des salaires des joueurs, et les clubs de l’Est n’ont pas pu s’aligner et rivaliser », assure l’historien. Alors qu’ils avaient déjà perdu leurs meilleurs joueurs partis à l’Ouest dès qu’ils en avaient l’occasion, comme Matthias Sammer et Ulf Kirsten, les clubs est-allemands se sont vite retrouvés à végéter dans des divisions inférieures sans pouvoir jouer les premiers rôles.

« La République fédérale d’Allemagne et la Fédération allemande de football n’étaient pas intéressées à agir véritablement par solidarité et ont laissé disparaître le football de la RDA. », regrette Frank Willmann, écrivain et auteur de plusieurs ouvrages sur l’histoire du football allemand. Ainsi, même au-delà de la Bundesliga 1, les équipes situées en ex-RDA et qui parviennent à se maintenir à un haut niveau se comptent sur les doigts d’une main : deux en deuxième division, et trois en troisième division.

« Ce sentiment d’exclusion se reflète dans la société, et c’est pourquoi l’extrême droite a une longueur d’avance à l’Est, car de nombreux Allemands de l’Est se sentent pratiquement des Allemands de second ordre. »ajoute Frank Willmann. « Avec le déclin économique de la région, il y avait beaucoup de chômage et on en parle encore aujourd’hui.ajoute Jutta Braun. Les jeunes ont été éduqués dans ce contexte et se sentent exclus. On sent cette ambiance dans les stades, avec beaucoup d’ultras et parfois de la violence. »

Le Dynamo Dresde est l’un de ses symboles. Huit fois champion de RDA et demi-finaliste de la Coupe UEFA (C3) en 1989, le club évolue désormais en troisième division mais est soutenu par de très nombreux supporters ultras. « Les supporters sont restés fidèles car les clubs représentent une partie de l’identité est-allemande perdue ailleurs et à laquelle ils sont attachés.« , explique l’historien. « Pour moi, Dresde ressemble un peu à Marseille avec une ferveur de toute la ville et de toutes les générations.décrit Romain Brégerie, joueur français qui y a joué entre 2011 et 2014, et qui a même porté le brassard de capitaine. Tous les matches contre des clubs de l’ex-RDA sont pour eux des derbys, avec parfois des supporters et des affrontements un peu virulents, car certains sont politiquement marqués et assimilés à des franges d’extrême droite. Mais je pense que cela reste minoritaire et je ne veux pas généraliser« .

Le Français se souvient des conditions d’entraînement « pas très professionnel » en raison d’infrastructures sportives pas encore au niveau des clubs occidentaux. Mais il s’est aussi souvenu de trois saisons avec une moyenne de 30 000 spectateurs dans un stade de 32 000 places. « Pour mon deuxième match à domicile, en coupe, nous sommes tombés contre le Bayer Leverkusen de Michael Ballack. Nous avons joué à domicile, nous avons perdu 3-0 à la 60e.e minute, mais on revient à 3-3 et on gagne en prolongation. C’est la seule fois dans ma carrière où j’ai très mal aux oreilles. C’était intenable parce qu’ils sifflaient tellement l’adversaire. »il dit.

Très impliqués, les supporters soutiennent également financièrement le club, qui a fini de rembourser ses dettes. « juste avant la crise du Covid »selon Lukas Kerzendörfer, présentateur du podcast « Dynamo-Fan ». « Nous avons acheté plus de 200 000 billets fantômes pour des matchs à huis clos pendant la crise du coronavirus afin d’aider le club à traverser cette mauvaise période.« , il ajoute.

Aussi fervents soient-ils, les ultras de Dresde se distinguent encore parfois par des actions outrancières, comme en 2016, où ils avaient jeté sur le bord du terrain une tête de taureau coupée et ensanglantée alors que leur club affrontait le RB Leipzig. « La tradition ne s’achète pas », a complété une bannière. Il faut dire que le club, propriété de la firme Red Bull, fondée en 2009 et qui a réussi à grimper très rapidement en Bundesliga, ne véhicule pas l’identité est-allemande. Surnommé « le club en plastique » en Allemagne, « Le RB Leipzig est pointé du doigt parce qu’il est un club commercial »confirme Jutta Braun.

Ainsi, les autres clubs de Leipzig, Chemie et Lokomotiv, qui évoluent en quatrième division, sont restés populaires auprès des supporters locaux. Chemie Leipzig a même récemment fêté les 60 ans de son titre surprise de champion de RDA. « Les politiciens de l’époque avaient volé les meilleurs joueurs du club de l’époque, pour les faire jouer dans des équipes favorisées par le pouvoir. Des choses comme celles-ci étaient possibles sous la dictature de la RDA, les joueurs avaient l’ordre de changer de club. Et à cette époque, Chemie s’est imposé sur le terrain et a déjoué la dictature en devenant champion, explique Jutta Braun. Ce genre d’histoire, les gens y sont encore très attachés aujourd’hui, et un nouveau club comme le RB Leipzig ne peut pas rivaliser avec ce passé.. Cette saison, Chemie Leipzig a attiré en moyenne 4 400 spectateurs par match, soit plus que certains clubs français de Ligue 2.

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