Entraîneurs, arbitres, managers… Où sont les femmes ?
« 1900-2024 : un long chemin vers la parité ». Sur le site officiel de Paris 2024, l’organisation se vante d’être les premiers Jeux de l’histoire à afficher une stricte parité entre les athlètes. Sur les 14 500 athlètes présents, la moitié seront des femmes. Pourtant, derrière cet effet d’annonce, il y a une réalité : le manque d’entraîneuses de haut niveau à l’échelle internationale.
À Tokyo en 2021, le Comité international olympique (CIO) n’en a recensé que 13 %, toutes nationalités confondues, soit deux points de moins qu’à Rio en 2016. En France, la situation est similaire : le Plan entraîneurs de l’Agence nationale du sport (ANS), qui regroupe les entraîneurs des sportifs susceptibles d’accrocher une place sur un podium aux JO d’hiver ou d’été, ne compte que 17 femmes sur 217 techniciens. Ces derniers mois, alors que les Jeux de Paris 2024 approchaient à grands pas, Valérie Garnier et Corinne Diacre, anciens entraîneurs des équipes de France féminines de basket et de football, ont été remplacés respectivement par Jean-Aimé Toupane et Hervé Renard, faisant ainsi baisser une nouvelle fois la moyenne.
Femmes et coachs, l’éternel dilemme
« Dans mon travail, je n’ai jamais eu l’impression d’être freinée parce que j’étais une femme, Précise toutefois Stéphanie Gros, responsable de l’équipe française olympique de triathlon. Pourtant, je n’ai que des hommes autour de moi. Tous les entraîneurs de mon secteur, que ce soit dans les équipes masculines ou féminines, sont des hommes. »
Pour expliquer ce phénomène, la sportive ne croit pas au procès d’illégitimité. « Une carrière se construit au fil du temps, avec l’expérience que l’on acquiert, elle explique, mais la formation demande un investissement quotidien important. Même si le rapport entre le travail des femmes et leur travail a évolué dans la société, il faut néanmoins supposer, au niveau familialêtre absent et tellement investi.
Au-delà des absences liées aux déplacements, le rôle reste, de fait, très exigeant. Pour les sportifs comme pour les membres de leur encadrement, les week-ends et jours fériés n’existent que très rarement. « Pendant la grossesse, par exemple, les femmes sont complètement éloignées du terrain pendant quatre à six mois, se souvient Stéphanie Gros. Cela peut faire partie de la réflexion à mener lorsque l’on se lance dans une carrière d’entraîneur. » Elle-même reconnaît avoir « coincé » ses grossesses l’année suivant les échéances olympiques. « J’ai un fils qui est né en 2005, après Athènes, et un autre en 2009, après Pékin. »
Le nombre et la qualité
Outre le nombre de femmes entraîneurs, une autre étape semble également compliquée à franchir : celle de l’aspect qualitatif. Que ce soit dans l’arbitrage, chez les entraîneurs et, bien sûr, chez les dirigeants. La loi française du 4 août 2014 impose désormais 40% de femmes dirigeants au minimum au sein des fédérations qui comptent 25% de licenciées, entraînant, de fait, une augmentation du nombre de femmes dans les conseils d’administration fédéraux.
« La loi est appliquée mais les femmes assument souvent des rôles qui ne sont pas toujours gratifiants ou valorisés dans le sport, déplore Béatrice Barbusse, ancienne handballeuse professionnelle et sociologue du sport. Par exemple, on leur confie le secrétariat général, mais rarement des postes stratégiques ou économiques élevés.
En France, sur les 36 fédérations sportives olympiques qui composent le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), seules quatre sont dirigées par des femmes. « Il est important d’avoir plus de femmes entraîneurs »plaide Stéphanie Gros. « Pour les jeunes athlètes féminines seules, certains sujets intimes sont plus faciles à aborder avec des coaches féminines. L’approche est différente et j’aimerais voir une évolution, tout en sachant l’investissement que cela demande. On ne peut pas pousser les femmes à le faire si elles n’en ont pas envie. »
Signe d’une époque plus propice à cette égalité, le CIO a souhaité donner l’exemple en augmentant le nombre de femmes à des postes de direction en son sein entre les Jeux de Tokyo et de Paris. Elles représentent désormais 33,3 % des membres de la commission exécutive du CIO, contre 26 % il y a quatre ans. Un premier pas.
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