ENQUÊTE EXCLUSIVE – Barnier, Philippe, Attal, Retailleau… qui incarnera la droite en 2027 ?
Michel Barnier ? « C’est celui qui incarne la nouveauté et la fraîcheur, même s’il a quarante-cinq ans de politique derrière lui et qu’il est le plus ancien Premier ministre de la Ve République »commente un pilier de la macronie en découvrant le classement de notre étude qui propulse le Premier ministre comme la meilleure incarnation de la droite – et en un sens du bloc central –, devant Édouard Philippe. Avec son style strict de politique surannée, le Premier ministre incarne la rupture après dix ans de règne – à Bercy, puis à l’Élysée – d’Emmanuel Macron. C’est sans doute le moteur le plus puissant de son crédit auprès de l’opinion publique.
Contrairement à certains de ses concurrents, les partisans de droite ne lui reprochent pas de se substituer à un président affaibli, bien au contraire. « Il y a un effet très net lié à la fonction de Premier ministre dans un contexte difficile qui légitime fortement un homme plus associé au gaullisme qu’à la droite »précise Frédéric Dabi, patron de l’Ifop. Certes il n’était pas question de répondre à la question du meilleur candidat de la droite pour 2027, cependant Michel Barnier s’ajoute désormais à la liste des prétendants. Avec ses qualités reconnues à l’Élysée ainsi que dans le groupe Ensemble pour la République « courtoisie », « apaisement »… « Il n’est pas tordu comme les autres animaux de son espèce »décrypte-t-on dans l’entourage du président. De là à en faire un champion pour la course à la présidentielle ?
« Il est trop chef du gouvernement et pas assez leader de la majorité, décrypte un proche d’AttalPremier ministre, c’est aussi se salir les mains. Wauquiez nous a frappé ? Il n’intervient pas. Philippe a reçu les députés par lots, il ne les a pas soignés… A court terme ça peut marcher, mais ça ne durera pas… » En effet, Édouard Philippe et Gabriel Attal ne semblent pas avoir de raisons de s’inquiéter du « moment Barnier ». L’un, Philippe reste élevé parmi les sympathisants de droite (71 %) et dans le camp présidentiel (78 %), l’autre, Attal, qui ne s’est jamais déclaré « de droite », bénéficie d’un crédit d’incarnation de 56 % parmi les sympathisants de droite (71 %) et dans le camp présidentiel (78 %). partisans de cette famille politique. « Ce sont tous les deux des fourre-tout, ce qui solidifie leur leadership derrière la statue du commandant Barnier »décrypte Frédéric Dabi.
L’autre enseignement de l’étude Ifop est la percée spectaculaire de Bruno Retailleau. 4ème du classement, proche d’Attal, le ministre de l’Intérieur bénéficie d’un discours engageant sans vergogne « immigration » Et « délinquance », « Idée largement partagée par les Français »confirme Dabi. Là où Darmanin ne l’a accepté qu’à demi-mot, Retailleau le martèle matin, midi et soir. Non seulement cela fait de lui la meilleure incarnation de la droite pour sa famille politique (80%), – à égalité avec Xavier Bertrand –, mais aussi – et c’est plus surprenant – de trouver un écho auprès des jeunes, y compris de GAUCHE. « qui font désormais le lien entre immigration et changement climatique »explique Frédéric Dabi.
Hyperactif, parlant cash, Retailleau joue le Sarkozy 2002 et ravive la flamme d’un peuple de droite longtemps inhibé sur les sujets régaliens. Indéniablement, au milieu de sénateurs et d’élus méconnus, Retailleau a changé de dimension en quelques semaines seulement. Preuve en est le statut particulier que lui accorde l’Élysée. Lundi dernier, il a été reçu par Emmanuel Macron pour un tête-à-tête dont il est ressorti que si les deux hommes ne sont pas toujours d’accord, notamment sur l’immigration, leurs échanges sont fluides et constructifs. Bruno Retailleau a notamment obtenu qu’un paragraphe sur ce sujet soit ajouté à la déclaration commune élaborée à l’occasion de la visite d’Etat au Maroc en début de semaine.
Édouard Philippe et Gabriel Attal ne semblent pas avoir de raisons de s’inquiéter du « moment Barnier »
Autre sujet de friction, les discussions sur les nominations à la tête de la police et de la gendarmerie se sont conclues sans encombre. Le ministre de l’Intérieur, qui n’aurait jamais envisagé d’entrer dans un gouvernement « Macron » il y a encore quelques mois, a habilement réussi à rejoindre l’équipe Barnier sans se renier aux yeux des sympathisants de droite. A la lumière de notre étude Ifop, Retailleau a aujourd’hui toutes les raisons de se projeter comme candidat à la présidentielle de 2027. Sa fragilité, surveillée de près par ses rivaux : que le souffle de sa crédibilité ne tombe pas faute de résultats concrets. « Quand Retailleau dit que tirer sur un joint a le goût du sang, que compte-t-il faire derrière ?se demande-t-on dans les rangs macronistes. Éradiquer toutes les articulations ? Eh bien, bonne chance ! »
En bas du classement, Laurent Wauquiez est à son plus bas niveau dans cette étude depuis sa création en 2018. Entre avril et aujourd’hui il a perdu dix points à 36% de crédit pour incarner la droite. Très nettement en avance sur son ennemi intime Xavier Bertrand qui « conserve l’image d’un ministre important de Nicolas Sarkozy qui s’est comporté de manière responsable lors du feuilleton de Matignon »dit Dabi. Laurent Wauquiez, plus difficile à lire à travers son prétendu refus de ne pas assumer la responsabilité de Bercy dans une période difficile, semble souffrir d’une certaine ambiguïté.
En retrait, Gérald Darmanin souffre également d’une image dégradée par la période du remaniement. N’ayant pas digéré sa mise à l’écart alors qu’il espérait le Quai d’Orsay, il suit depuis une stratégie « terre brûlée »témoignent plusieurs élus EPR qui ne comprennent pas toujours sa stratégie. « Il s’est prononcé très haut lors de l’annonce du budget sur l’augmentation de l’impôt sur les sociétés, et quand on en débat à la Chambre, il n’est pas là… »
Le chemin à parcourir est encore long d’ici 2027. Mais l’échéance est dans toutes les têtes. Depuis la maison Macron, on commente le jeu d’alliances qui se mettent en place au fil des jours, d’un côté Michel Barnier/Gabriel Attal, soucieux de garder le plus longtemps possible l’armée mexicaine de la base commune, de l’autre. de l’autre, le duo Wauquiez/Darmanin, animé par l’envie d’un nouveau bouleversement dont ils pourraient, d’une manière ou d’une autre, sortir vainqueur.