C’est une affaire qui secoue la Malaisie depuis plusieurs jours. 402 enfants hébergés dans 20 foyers d’accueil ont été secourus mercredi par la police malaisienne lors d’une vaste opération qui a abouti à l’arrestation de 170 personnes. Ces dernières, enseignants de la religion islamique et surveillants de ces foyers sont soupçonnées d’abus physiques et d’agressions sexuelles sur plusieurs de leurs « protégés ». Pour les autorités malaisiennes, cette enquête, qui s’annonce de grande ampleur, ne fait que commencer.
De quoi parle-t-on ?
Une vaste opération policière a eu lieu mercredi dans une vingtaine de centres d’accueil des États de Selangor et de Negri Sembilan. Les autorités soupçonnent que des maltraitances et même des actes de torture ont été perpétrés sur certains des 402 enfants, âgés de un à 17 ans, placés dans ces établissements.
Des agressions sexuelles auraient été commises par des membres du personnel (un professeur musulman et un gardien) et certains enfants auraient été forcés à en agresser d’autres, a indiqué la police malaisienne. Selon Husain Razarudin, l’inspecteur général de la police, certains enfants ont été brûlés avec des cuillères chaudes et d’autres, malades, se sont vu refuser des soins médicaux jusqu’à ce que leur état de santé devienne critique. Les gardiens des foyers « ont également caressé le corps des enfants sous prétexte de procéder à un examen médical », a-t-il déclaré.
Depuis les opérations, les enfants ont été hébergés dans un centre de formation de la police de Kuala Lumpur, la capitale, où ils ont été examinés un par un par des médecins. Les consultations ont révélé jusqu’à présent qu’au moins 13 d’entre eux ont été victimes de violences sexuelles, a déclaré vendredi l’inspecteur général de la police Husain Razarudin, ajoutant que d’autres opérations et arrestations sont à prévoir.
Qui administre ces maisons ?
Selon la police, ces hébergements seraient gérés par un groupe (Global Ikhwan Services and Business – GISB). Ce dernier est depuis longtemps dans le collimateur des autorités civiles et islamiques de Malaisie pour ses liens avec la secte Al-Arqam, dissoute en 1994 par les autorités qui l’accusaient de dispenser une doctrine « déviante » et de représenter une menace pour l’ordre public.
En 2011, le GISB a fait la une des journaux lorsque certains de ses membres ont fondé un « club d’épouses obéissantes » qui appelait les femmes à être des « putes au lit » pour empêcher leurs maris de s’égarer.
La police pense également que les mineurs hébergés dans les refuges sont tous des enfants de membres du GISB. « Nous pensons que les pères des 402 enfants sont des membres du GISB », a déclaré le policier Husain Razarudin, ajoutant que « des tests ADN sont nécessaires ».
Les autorités religieuses de l’État de Selangor ont déclaré cette semaine qu’elles surveillaient de près les activités du GISB, affirmant qu’elles restaient « vigilantes face à tout développement qui conduirait à des écarts par rapport aux véritables enseignements islamiques ».
Ce que dit le groupe
Le GISB a toutefois démenti ces informations et précisé dans un communiqué qu’il ne gérait pas ces refuges. « Ce n’est pas notre politique de faire des choses qui vont à l’encontre de l’islam et de ses lois », a-t-il écrit mercredi.
Selon le site Internet du GISB, le groupe exploite des supermarchés et des restaurants dans plusieurs pays, dont l’Indonésie, la France et le Royaume-Uni.
Les réactions
Le Premier ministre malaisien Anwar Ibrahim a ordonné aux autorités compétentes de « mener une enquête approfondie » sans délai. « Cela concerne la foi de la communauté. C’est une affaire importante et grave, impliquant un abus de pouvoir, un abus de religion », a-t-il déclaré aux journalistes après la prière du vendredi.
L’Unicef s’est également indignée. « Ces enfants ont vécu des horreurs inimaginables et auront besoin d’une aide médicale et psychologique à long terme », a déclaré Robert Gass, le représentant de l’agence des Nations Unies en Malaisie pour les droits de l’enfant.