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en Seine-et-Marne, les espoirs de la gauche face à un député macroniste sortant

en Seine-et-Marne, les espoirs de la gauche face à un député macroniste sortant

Le temps est comme le 8e Circonscription de Seine-et-Marne : incertaine. Sous une pluie battante, Arnaud Bonnet, professeur de collège SVT, débute cette nouvelle matinée de campagne, samedi 22 juin. Le candidat du Nouveau Front populaire (NFP), qui se confie « dormir trois heures par nuit », est venu accueillir des militants arrivant de Paris à la gare d’Ozoir-la-Ferrière. Ils n’ont pas voyagé lors de la campagne des législatives de 2022, mais cette fois, les partis de gauche ont envoyé des renforts pour les élections anticipées, prévues les 30 juin et 7 juillet. « Désolé pour la météo, ce n’était pas prévu, comme la campagne »il sourit.

Il y a deux ans, ce père de deux enfants, âgé de 47 ans, et membre des Écologistes, avait porté les couleurs du Nupes et avait échoué par 4 voix – réduites à une voix par le Conseil constitutionnel – face au candidat Renaissance, Hadrien Ghomi. « Non, ce n’était pas difficile à digérer, je ne me suis pas lancé en politique pour trouver un travail. »il évacue. Mais ses partisans n’ont pas oublié. « On était tous déçus d’être si près du but, c’était frustrant », confie Smaïl Djebara, conseiller départemental PS de Seine-et-Marne. Sur le chemin qui le mène de la gare au marché, Arnaud Bonnet est rapidement stoppé par une jeune maman, qui lui propose de l’aider. « J’ai voté pour vous il y a deux ans. J’étais à la fin de ma vie en voyant les résultats, notamment lorsqu’une amie m’a dit qu’elle avait voté pour l’autre, sans vraiment le savoir !

Cette fois, cet électeur est rempli d’espoir, face à un camp présidentiel en plein désarroi et un bloc de gauche qui totalisait, en additionnant les différents candidats, 36,6% aux élections européennes dans la circonscription. « C’est une mini-France »selon un ancien élu local. « A la fois du point de vue de la sociologie, mais aussi du point de vue électoral, puisque c’est un cirque qui est toujours du côté de la majorité nationale, depuis 1981 », souligne-t-il.

Le visage pluvieux, Arnaud Bonnet dresse le portrait de son territoire. « Ici, il y a des quartiers pavillonnaires, des quartiers populaires et des villages. » Vingt-deux communes, 154 000 habitants. L’écologiste souligne « le gros problème des transports quotidiens » et des fins de mois difficiles. « Il faut résoudre toutes les angoisses du quotidien et ensuite avancer dans les transitions écologiques », il a dit. La météo automnale a eu raison des quelques clients du marché d’Ozoir. Le candidat et ses militants décident de faire du porte-à-porte dans le quartier populaire Anne-Franck qui abrite des logements sociaux.

Un panneau à l'effigie du candidat de gauche, Arnaud Bonnet, dans le quartier Anne Franck, à Ozoir-la-Ferrière (Seine-et-Marne), le 22 juin 2024. (MARGAUX DUGUET / FRANCEINFO)

« C’est très compliqué ici, et c’est pour ça qu’on y va, il y a beaucoup d’abstentions et de votes pour le RN »assure Arnaud Bonnet. « Les choses vont mal en ce moment »articule difficilement un premier résident, sur le pas de sa porte. « Ils essaient de me chasser de chez moi, je suis ici depuis 2001. » La discussion tourne autour de l’allocation adulte handicapé (AAH) que perçoit cet électeur un peu perdu. « Nous voulons le porter au niveau du SMIC », » engage immédiatement Arnaud Bonnet, qui ne manque pas de rappeler les enjeux de la circonscription. « Nous avons perdu d’une voix, chaque voix compte. »glisse-t-il en lui tendant un tract.

Quelques portes plus loin, Ivan, 29 ans, ingénieur de maintenance, n’a pas voté aux élections européennes, mais a pu cette fois voter aux législatives. « Je voterai à gauche, pour qu’on ne bascule pas au RN. Les macronistes ? Vu le désordre, non. » Il est 11 heures, et il est temps de retourner au marché. La pluie a laissé place à un ciel nuageux, il y a plus de clients. Nicole, 75 ans, issue de la gauche mais farouche opposante à Jean-Luc Mélenchon, entoure la candidate du NFP. « J’ai voté pour vous la dernière fois, je suis optimiste. Les gens se diront que les écologistes ne sont pas Mélenchon ! Et puis, ils en ont marre de Macron.»

Macron, c’est un nom que le député sortant de la Renaissance Hadrien Ghomi se garde bien de prononcer. Le trentenaire compte sur ses racines locales pour assurer sa réélection, parachuté dans la circonscription il y a deux ans. L’image dégradée du Président de la République crée « un effet de refoulement »observent de nombreux candidats à la Renaissance. « Hadrien peut créer l’exploit deux fois, c’est de dimension olympique !, s’enflamme son ancien employeur, le patron des sénateurs du camp présidentiel, François Patriat. On l’a envoyé sur une mission difficile et il a fait un travail extraordinaire, beaucoup de travail de terrain, même s’il est conscient, comme moi, que face à une vague, c’est très difficile. Mais il est très apprécié des maires. ».

C’est aussi le premier argument invoqué par Hadrien Ghomi, rencontré à la fête sportive de Thorigny-sur-Marne. « J’ai 15 maires sur 22 qui me soutiennent alors que je n’en avais que trois en 2022. » Parmi ces édiles, des élus avec LR, qui n’ont pas envoyé de candidat face au député sortant. Il est plus de 14 heures et le soleil brille à nouveau.

Le maire (Divers centre) de la ville arrive à l’entrée du stade du Moulin à Vent. « Personne ne le connaissait à l’époque, il a largement fait ses preuves », vante Manuel Da Silva, citant la mise en place d’un système d’obtention de papiers d’identité dans sa commune, grâce à l’intervention du député sortant. A ses côtés, Hadrien Ghomi, flanqué de son directeur de campagne et de son photographe, boit du petit-lait.

La journée est chargée : le candidat, qui allait fêter son « 1 000e événement local » avant la dissolution, faire une série de réunions. « Il a participé à beaucoup d’événements, c’est un représentant. Ce n’est pas pour ça que je m’implique, je veux représenter les citoyens et ne pas serrer la main »se moque Arnaud Bonnet. « Mon adversaire fait de la propagande, je continue mes activités », rétorque Hadrien Ghomi. Bien que son discours se soit concentré uniquement sur le territoire local, les électeurs l’ont interrogé sur la dissolution. « Quelle idée folle ! »lève les yeux au ciel une électrice qui tient un stand de marche nordique lors du festival sportif. « Je suis la principale victime de la dissolution décidée par le président ! répond le député sortant en riant.

Un petit café, Hadrien Ghomi prend la route avec son équipe en direction de Roissy-en-Brie, au sud du quartier. L’association SOS Liens, qui organise notamment des sorties culturelles et sportives, l’accueille dans ses locaux pour un échange avec des jeunes et des parents d’élèves. Devant ce public, en grande partie issu d’horizons divers, le candidat de la Renaissance met en avant son passé de fils d’immigré iranien et axe son discours sur la dangerosité du RN. « L’extrême droite a un programme anti-République qui vise à stigmatiser les communautés. Toutes les politiques sociales peuvent être mises à mal si l’extrême droite est majoritaire« . Et de s’appuyer une nouvelle fois sur son expérience locale : « On m’a rarement vu dans les médias servir de la soupe, je suis là pour soulever les problèmes. »

Après plusieurs minutes de discussion, une jeune femme lui demanda d’une voix timide : « Vous m’avez fait prendre conscience de la question du vote, mais quel est votre parti ? Un court silence, Hadrien Ghomi commence : « Je ne me cache pas derrière mon petit doigt, je suis centriste. Je suis contre les extrêmes. » Toujours sans citer le nom d’Emmanuel Macron, face à un public qui l’interroge sur le salaire minimum à 1.600 euros, la retraite à 60 ans ou encore l’indexation des salaires à l’inflation, mesures promises par le NFP. Une nouvelle fois, Hadrien Ghomi met en avant son « personnalité » plutôt que le sien « étiquette ».

Tout le contraire de son adversaire du RN, qui entend perturber le duel entre la gauche et le camp présidentiel. Manon Mourgères, 27 ans, infirmière en réanimation, a été envoyée au 8e circonscription, qu’elle promet d’habiter rapidement, elle qui habite au 7e. Inconnue des électeurs, elle mise tout sur le duo Jordan Bardella-Marine Le Pen alors que le camp d’extrême droite est arrivé en tête aux élections européennes, avec 26,5% des voix. « Les gens en ont marre, ils veulent l’alternance, ils sont prêts à nous essayerelle livre. On sent qu’il y a un changement de mentalité par rapport au RN. » En face, Hadrien Ghomi se rassure tant bien que mal : « Les Européens jouaient sur des terrains nationaux. Et puis, le RN a eu son plus faible score de Seine-et-Marne sur ce tour.»


Liste des candidats pour le premier tour :

• Arnaud Bonnet (Union de la Gauche)

• Hadrien Ghomi (Ensemble ! (Majorité présidentielle))

• Frédéric Renault (extrême gauche)

• Henriette Sauvage (Droite souverainiste)

• Bernard Duchaussoy (écologistes)

• Marnon Mougères (Rassemblement National)

• Jean-Marc Moskowicz (Reconquête !)

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