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en pleine guerre, l’Ukraine entame une compétition à part mais presque « chez elle »

Pour la première fois dans l’histoire, l’un des pays qualifiés pour l’Euro de football est un pays en guerre. Attaquée par la Russie en février 2022, l’Ukraine a en effet validé son billet pour la compétition en mars dernier, en battant la Bosnie-Herzégovine puis l’Islande en barrages. Célébrée comme une victoire à Kiev, cette qualification a soulevé un vent d’espoir dans un pays ravagé par la guerre, qui n’a plus vu sa sélection sur son sol depuis 2021, mais où le football a longtemps dépassé son cadre sportif. . Face à la Roumanie, lundi 17 juin (15 heures), la sélection débute la compétition.

Trois mois après sa qualification, la sélection ukrainienne fait donc partie des 24 nations engagées dans cet Euro 2024. Une compétition qui aura forcément une saveur particulière pour le Zbirna, engagé dans le groupe E avec la Belgique, la Slovaquie et la Roumanie. D’autant que ce tournoi se déroule en Allemagne, l’une des principales terres de refuge des Ukrainiens, dont un million y ont élu domicile. Alors, le football les a suivis, qu’il s’agisse de la sélection ukrainienne ou des clubs phares, contraints de partir à l’étranger pour les matches internationaux.

Depuis deux ans, l’Ukraine a en effet « reçu » la Pologne, l’Allemagne, la République tchèque ou la Slovaquie, selon la disponibilité de ses voisins, tandis que le Shakhtar Donetsk joue ses matches de Ligue des champions et de Ligue Europa à Hambourg. Plusieurs dizaines de milliers de spectateurs ont assisté à ces matches, pour des moments uniques de fraternité pour les nombreux expatriés ukrainiens.

Les joueurs du Shakhtar Donetsk sur le terrain du Volksparkstadion de Hambourg avant un match de Ligue des champions contre le FC Porto, le 19 septembre 2023. (AFP)

« Le lien entre l’Ukraine et l’Allemagne est fort, c’est le deuxième pays d’adoption des Ukrainiens depuis le début de la guerre après la Pologne. C’est donc évidemment spécial de jouer cet Euro ici »confirme Andrew Todos, journaliste anglo-ukrainien qui couvre la sélection ukrainienne.

« Le Shakhtar Donetsk a beaucoup joué à Hambourg ces derniers mois. C’est une ville avec une forte diaspora ukrainienne, tout comme Munich et Düsseldorf, où l’Ukraine disputera cet Euro. Ce sera très émouvant. »

Andrew Todos, journaliste ukrainien

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En attendant peut-être de retrouver Hambourg – « ce serait un beau symbole »glisse Andrew Todos – en quarts de finale (si elle termine deuxième de son groupe et remporte ses huitièmes de finale), l’Ukraine a atterri à Wiesbaden, à l’ouest de Francfort, où hélicoptères et drones surveillent un dispositif de sécurité renforcé autour de la sélection.

Jeudi 13 juin, pour le seul entraînement ouvert au public, les ondes étaient brouillées alors qu’on apercevait des hommes armés au milieu des 5 000 spectateurs, dont 1 000 Ukrainiens, heureux de ne faire qu’un si loin de chez eux.

Des visages sur lesquels les joueurs se sont concentrés, à l’instar de l’ancien Marseillais Ruslan Malinovski : « C’est très important pour nous de ressentir ce soutien. L’Allemagne nous aide beaucoup. J’espère que les Ukrainiens pourront regarder nos matchs ». Un point de vue partagé par le sélectionneur Sergueï Rebrov : « C’est un plaisir de se sentir chez soi. Tout le monde est fatigué. Nous nous battons pour notre liberté et le football n’est pas la priorité, mais nous voulons être représentés pour continuer à garder espoir ».

C’est dans ce contexte difficile que l’Ukraine a préparé son entrée dans l’euro, face aux Roumains. Mais ce n’est rien comparé aux joueurs qui évoluent encore en championnat national (un tiers de la liste des 26). « Ils retrouveront des conditions normales dans un pays en paix, avec des stades pleins, eux qui ont l’habitude de voir des matchs interrompus par des alertes à la bombe, dans des stades à huis clos »se souvient Andrew Todos.

« Certains stades restent fermés, comme à Odessa et à Dnipro, où un missile est tombé à 300 m du stade l’an dernier. Ce qui montre le danger. Nous avons eu des matches qui ont duré plus de quatre heures à cause des interruptions provoquées par les raids aériens russes. »

Andrew Todos, journaliste ukrainien

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« Le partenaire le plus important de l’Ukraine dans cette guerre » Selon le sélectionneur Sergueï Rebrov, l’Allemagne a tendu la main aux clubs ukrainiens ainsi qu’à ses jeunes talents non concernés par la loi martiale, qui interdit aux hommes de quitter le territoire. Le jeune espoir Dmytro Bogdanov a ainsi fait les belles heures du Dynamo Dresde.

Pendant ce temps, les joueurs de l’équipe nationale organisent des collectes de fonds pour envoyer du matériel aux soldats et aider les familles des victimes. Une façon d’être utile en dehors du terrain, même si le football lui-même est là « à rappeler à l’Europe que nous sommes toujours en guerre et que nous avons besoin d’aide »glisse un cadre du Shakhtar Donetsk à franceinfo : sport.

« C’est surréaliste de jouer au football alors que les gens se battent. Mon beau-père est au front, il a besoin de matériel mais quand on s’appelle, on parle de football, pas de guerre. »

un cadre du Shakhtar Donetsk sous couvert d’anonymat

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Il ajoute : « L’Allemagne nous aide beaucoup, mais ce serait encore mieux si elle nous donnait des missiles Taurus ! Parce que pendant que nous jouons au football ici, des proches meurent au front. »

Mais Andreï Shevchenko, Ballon d’Or 2004 devenu président de la fédération ukrainienne, a rappelé aux joueurs l’importance de leurs performances : « Nous représentons fièrement l’Ukraine et nous rappelons au monde ce que nous traversons. Chaque victoire de notre pays, sur et en dehors du terrain, est cruciale pour tous les Ukrainiens et surtout pour ceux qui le défendent en ce moment. » Chargée de cette lourde mission, l’Ukraine avance dans cet Euro avec une garantie : celle de son niveau de jeu. Car s’ils se sont qualifiés en barrages, les Ukrainiens ont de réelles ambitions.

« L’objectif officiel c’est de sortir des poules, le reste sera du bonus. Pour moi, on peut viser au moins les quarts de finale voire les demi-finales, car, soutenu par ce contexte, on peut avoir un un boost d’âme supplémentaire. »

Andrew Todos, journaliste ukrainien

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Quarts de finalistes en 2021, les Ukrainiens peuvent surtout compter sur une génération dorée, qui regorge de talents comme Oleksandr Zinchenko (Arsenal), Mykhaïlo Mudryk (Chelsea), Andriy Lunin (Real Madrid) ou encore Artem Dovbyk (Gérone). « La moitié de l’équipe évolue à un très haut niveau en Europe, dans de grands clubs. Et ils sont en bonne forme !note Andrew Todos, rappelant que la génération ukrainienne, sacrée championne du monde U19, arrive à maturité.

Battus une seule fois en dix matches (1-3 par la Pologne), les Ukrainiens restent notamment avec une éclatante victoire en Moldavie (4-0) et deux nuls contre l’Allemagne en un an (3-3, 0-0), sans oublier ceux contre l’Angleterre (1-1) et l’Italie (0-0) lors des qualifications l’automne dernier.

De quoi donner confiance à une équipe en mission, comme l’a déclaré Andreï Chevchenko au quotidien italien. Timbre14 juin : « Nous sommes prêts à affronter tout ce qui peut arriver. Nous avons été obligés de jouer ailleurs, loin de nos proches et de nos racines, et nous avons toujours trouvé beaucoup de chaleur. A l’Euro, l’équipe ne se sentira pas seule. « .

Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
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