En Nouvelle-Calédonie, l’économie s’effondre après deux mois d’insurrection
« Nous assistons à l’effondrement d’un pays. » Le sentiment éprouvé par Isabelle, travailleuse indépendante, est très répandu au sein de la population de Nouvelle-Calédonie. Née en France, cette graphiste a passé plus de vingt ans sur le territoire et vient de décider de quitter Le Caillou. Elle partageait des bureaux avec une dizaine de travailleurs indépendants qui, comme elle, ont vu leur carnet de commandes se réduire, de 50 % dans le meilleur des cas. Une majorité d’entre eux envisagent de partir, s’ajoutant, sans être comptabilisés dans les chiffres officiels, à l’immense vague de chômage consécutive aux destructions d’entreprises, de commerces et d’infrastructures publiques qui frappent la Nouvelle-Calédonie depuis le 13 mai.
L’archipel de 270 000 habitants, dont le PIB annuel avoisine les huit milliards d’euros, connaît un véritable cataclysme qui devrait pousser près de 24 000 Calédoniens au chômage à très court terme, selon l’hypothèse retenue par les autorités. Cela représente plus d’un tiers des quelque 68 000 salariés du secteur privé. Les pertes de salaires et les nombreux départs attendus vont sérieusement affecter la consommation. Celle-ci représente environ 60% de la croissance de l’archipel, selon l’Institut national de la statistique et des études économiques.
« En Nouvelle-Calédonie, les émeutes surviennent alors que la situation économique du territoire est déjà particulièrement morose et ses perspectives très incertaines, liées à la crise de la filière nickel. »souligne l’Institut d’émission d’outre-mer de la Banque de France, dans sa dernière note de conjoncture publiée le 11 juillet.
Depuis le début des événements, le gouvernement de Nouvelle-Calédonie a mis en place une cellule économique qui actualise le coût de la crise. Fin juin, le montant des dégâts, encore provisoire, était estimé à plus de 2,2 milliards d’euros pour les secteurs public et privé, sans compter les pertes d’exploitation des entreprises. Les besoins de financement de la collectivité sont également estimés à 675 millions d’euros.
« Mis sur liste noire par les compagnies maritimes »
Après avoir été à l’arrêt complet pendant plus de six semaines, le fonctionnement de l’économie reste largement bloqué. Des secteurs entiers d’activité ne peuvent reprendre, avec des répercussions attendues sur des entreprises qui n’ont pas été directement touchées. C’est le cas du tourisme, mais aussi de l’industrie du nickel, à l’arrêt quasi complet depuis le 13 mai, et qui représente près d’un emploi sur quatre sur le Rocher. La fermeture de sous-traitants et la disparition de fournisseurs vont compliquer une éventuelle reprise.
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