En Nouvelle-Calédonie, deux indépendantistes incarcérés à Nouméa
Suite à leur arrestation la semaine dernière, deux indépendantistes de Nouvelle-Calédonie ont été placés en détention provisoire à Nouméa, mardi 25 juin, a appris l’Agence France-Presse (AFP) auprès de leurs avocats. Ils ont été arrêtés mercredi 19 juin, avec neuf autres personnes soupçonnées d’avoir commandité les violences qui touchent l’archipel du Pacifique Sud depuis la mi-mai.
Parmi les accusations figuraient celles de « complicité de tentative de meurtre », de « vol en bande organisée avec arme », de « destruction en bande organisée des biens d’autrui par des moyens dangereux ». Les deux militants, incarcérés, sont Gilles Jorédié et Joël Tjibaou, le fils du leader kanak Jean-Marie Tjibaou, assassiné en 1989. Les prévenus avaient demandé un débat différé devant le juge des libertés et de la détention. Mais à l’issue de ces échanges, le juge a décidé que leur détention provisoire aurait lieu au centre pénitentiaire de Nouméa (Camp Est), M.e Claire Ghiani, avocate de Joël Tjibaou, et Stéphane Bonomo, conseil de Gilles Jorédié.
Ces arrestations font suite au transfert vers la France, dimanche 23 juin, de sept de ces militants, dont Christian Tein, le porte-parole de l’Unité de coordination des actions de terrain (CCAT), en vue de leur incarcération. L’avocat de Joël Tjibaou s’est réjoui que son client ne subisse pas le même sort qu’eux. « Le fait qu’il ne soit pas allé en France est un soulagement », a commenté son avocat auprès de l’AFP. Même satisfaction pour les conseils de Gilles Jorédié qui reste néanmoins prudent. Mon client « n’est pas sûr », selon lui, voir l’administration pénitentiaire” décider unilatéralement et en catimini » pour le mettre dedans « un avion militaire » pour la métropole. Deux autres militants arrêtés la semaine dernière ont été placés sous contrôle judiciaire.
Récupération de tension
Les autorités accusent le CCAT d’avoir fomenté les émeutes survenues à partir du 13 mai, après le vote d’un projet de loi constitutionnel réformant le corps électoral pour les élections provinciales prévues fin 2024. Le mouvement a réfuté cette mise en œuvre. cause. Les indépendantistes refusent cette réforme, qu’ils accusent de réduire le poids politique de la population indigène kanak.
Des violences ont donc éclaté après le vote de cette réforme constitutionnelle. Ces violences, les plus graves survenues dans l’archipel depuis les années 1980, ont fait neuf morts, selon le dernier bilan des autorités, et des dégâts matériels considérables (incendies, destructions, pillages…). Un regain de tension est survenu suite au transfert vers la France, dans la nuit du samedi 22 au dimanche 23 juin, de sept indépendantistes. Le CCAT a également exigé leur « libération » et leur « retour immédiat » en Nouvelle-Calédonie.
Les troubles se sont répandus sur tout le territoire, notamment « buisson », loin de l’agglomération de Nouméa. A Bourail, deux maisons ont été incendiées lundi 24 juin et mardi 25 juin ainsi que « deux grands quais à la zone industrielle de Nandaï », selon le maire, Patrick Robelin, faisant état d’échanges de tirs. Au nord du Grand Nouméa, à Païta, une école a été ravagée par les flammes, un tiers du bâtiment étant parti en fumée, selon le directeur de cabinet du maire. Le commissariat de police municipale a été saccagé et un bâtiment d’hébergement de la gendarmerie détruit, ainsi que plusieurs locaux, dont celui de la Croix-Rouge.
Lors d’une conférence de presse mardi 25 juin réunissant la plupart des mouvements indépendantistes, le secrétaire général de l’Union calédonienne, Dominique Fochi, a dénoncé le « déportations » des militants kanak en France. « Ce sont des pratiques coloniales et ces pratiques que l’on voit aujourd’hui sont les mêmes que celles de 1984-1988, c’est grave »il a dénoncé, estimant que « Ce gouvernement a rompu trente-six ans de paix en trois jours. »
« Macron nous pousse à la guerre civile pour ses intérêts électoraux et financiers », a accusé un autre leader indépendantiste, Jean-Marie Ayawa. Dans le camp loyaliste, Nicolas Metzdorf (Renaissance), député sortant et candidat aux législatives, a jugé la situation « plus tendu que jamais ».