En misant sur Bernard Cazeneuve comme option de gauche à Matignon, Emmanuel Macron fait un pari risqué
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En misant sur Bernard Cazeneuve comme option de gauche à Matignon, Emmanuel Macron fait un pari risqué

En misant sur Bernard Cazeneuve comme option de gauche à Matignon, Emmanuel Macron fait un pari risqué
Photo d'illustration de Bernard Cazeneuve et Emmanuel Macron en mai 2017 devant Matignon.
FRANCOIS GUILLOT / AFP Photo d’illustration de Bernard Cazeneuve et Emmanuel Macron en mai 2017 devant Matignon.

FRANCOIS GUILLOT / AFP

Photo d’illustration de Bernard Cazeneuve et Emmanuel Macron en mai 2017 devant Matignon.

POLITIQUE – Après sept semaines d’un gouvernement démissionnaire, et alors que la gauche réclame (toujours) Matignon, les socialistes pourraient-ils censurer un Premier ministre issu de leurs rangs ? C’est le pari fait par Emmanuel Macron alors que l’hypothèse Bernard Cazeneuve continuait, mardi 3 septembre, d’être mise en doute. « testé » par le chef de l’Etat, selon son entourage.

L’ancien chef du gouvernement de François Hollande a été reçu la veille à l’Élysée. « Il ne le demande pas, mais s’il le fait, c’est par devoir et pour éviter des difficultés supplémentaires au pays »Son entourage l’avait assuré la veille. Après avoir évincé Lucie Castets, proposée par le Nouveau Front populaire, la personnalité de Bernard Cazeneuve présente des atouts pour Emmanuel Macron. Expérience, ex-socialiste… A minima, elle permettrait au chef de l’Etat d’affaiblir le procès de déni de démocratie que ne manquerait pas de lui faire la gauche, qui estime qu’au vu des résultats des législatives, Matignon devrait lui revenir.

Le choix de Bernard Cazeneuve ne garantit cependant pas que l’échec soit évité. D’abord parce que l’ancien Premier ministre est fondamentalement hostile à La France Insoumise, qui lui rend la pareille et brandit déjà la menace de la censure. Ensuite parce qu’il ne fait pas non plus l’unanimité chez les socialistes… Et c’est encore pire à l’Assemblée.

Un vote pour soutenir Cazeneuve est exigé

Invité sur BFMTV le 2 septembre, le Premier secrétaire du parti Olivier Faure prend soin de souligner que si Bernard Cazeneuve  » a été «  socialiste, il est désormais à la tête de son propre mouvement, La Convention. « Je ne sais pas sur quelle base Bernard Cazeneuve va aller parler au chef de l’Etat. »s’emporte-t-il. Aucun soutien officiel donc, et le leader socialiste vient tout juste de concéder qu’il n’y a « je vais réfléchir » si Bernard Cazeneuve obtient d’Emmanuel Macron l’abrogation de la réforme des retraites.

Une réserve qui contraste radicalement avec le discours de son principal adversaire interne, le maire PS de Rouen Nicolas Mayer-Rossignol. « L’hypothèse Castets étant écartée, quand on regarde celles qui circulent encore, il est très clair pour nous que c’est Bernard Cazeneuve que nous soutenons », Nicolas Mayer Rossignol l’a affirmé mardi lors d’une visioconférence avec la presse. Il assure être sur la même ligne que la maire de Vaulx-en-Velin, Hélène Geoffroy, cheffe de file du deuxième courant d’opposition socialiste. Carole Delga, présidente de la région Occitanie et également opposée à la ligne Faure, affirme sa  » estimé «  pour l’ancien chef du gouvernement dans une interview avec La dépêche Lundi 2 septembre.

Il n’est cependant pas question de lui donner un « carte blanche » sans avoir vu sa feuille de route. Mais, s’interroge Nicolas Mayer-Rossignol, face à l’hypothèse Xavier Bertrand également étudiée par l’Élysée, « Voulons-nous un Premier ministre qui soit de notre propre volonté ou qui ne le soit pas ? » « , demande-t-il. Dans des SMS copiés à l’AFP, le maire de Rouen et Hélène Geoffroy ont appelé à un vote dans un bureau national du PS mardi soir pour que « Le PS annonce clairement qu’il ne censurera pas un gouvernement de cohabitation dirigé par Bernard Cazeneuve, Premier ministre, sur la base du programme PFN (retraites, salaires, services publics, etc.) et dans le cadre du front républicain. »

Le poids des éléphants (des eaux)

Le maire insiste sur le fait qu’ensemble, son mouvement et celui d’Hélène Geoffroy sont « majorité » parmi les militants. « C’est cette majorité qui nous permet de dire que nous voulons un Premier ministre de gauche qui a un bilan respecté »insiste-t-il. Mais il n’est pas certain que l’argument soit suffisamment fort pour trouver un écho même à l’Assemblée nationale.

Ni Hélène Geoffroy, ni Nicolas Mayer-Rossignol, ni Carole Delga n’y siègent. Bien qu’élus localement, ils l’ont été sur une faible participation – entre 20 et 30 % pour les municipales de 2020 en pleine épidémie de coronavirus. De plus, leur ancrage local répond à des logiques différentes de celles qui ont permis l’élection des soixante-six députés PS, davantage tributaires des dynamiques nationales. Dans ces conditions, disposent-ils de suffisamment de soutiens dans l’hémicycle pour pousser les députés roses à soutenir un gouvernement Cazeneuve, alors même que le chef du parti est sur la réserve ?

Le maire de Rouen assure que les parlementaires partagent son point de vue et cite Jérôme Guedj, en rupture avec Jean-Luc Mélenchon, Dominique Potier, et le chef des sénateurs Patrick Kanner. « et bien d’autres. » Ce n’est pas grand-chose, mais quelle importance ? Nous n’imaginons pas une seule seconde que si la feuille de route était conforme aux attentes, un gouvernement de Bernard Cazeneuve serait censuré par le groupe PS. »veut-il croire, sans pour autant donner un chiffre précis d’élus qui soutiendraient le retour de l’ancien Premier ministre. Pas la meilleure garantie pour assurer à Emmanuel Macron que Bernard Cazeneuve survivrait à une motion de censure.

Contacté par Le HuffPostune source parlementaire rappelle sèchement la ligne officielle du parti : « Les soixante-six députés PS se sont mis d’accord pour censurer toute extension du macronisme et que l’enjeu n’était donc pas le casting mais le fond. Aucun, absolument aucun, n’a transigé sur cette ligne depuis 15 jours et a défendu le soutien à ceci ou à cela sans savoir quelle sera l’orientation politique d’un nouveau Premier ministre. »Une manière de rappeler que le cœur du problème se trouve à l’Assemblée. Et que c’est uniquement avec elle que le futur Premier ministre aura affaire.

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