En Martinique, un couvre-feu instauré dans certains quartiers de Fort-de-France et du Lamentin suite à des violences
Après plusieurs nuits de violences, en marge de manifestations contre la vie chère, un couvre-feu a été instauré, mercredi 18 septembre au soir, dans certains quartiers de Fort-de-France et du Lamentin, les villes les plus touchées par les troubles, a annoncé le préfet de la Martinique, Jean-Christophe Bouvier. Cet arrêté sera effectif de 21 heures à 5 heures du matin, au moins jusqu’au 23 septembre, selon un communiqué de la préfecture.
« J’ai demandé aux forces de sécurité intérieure de saturer les routes et les ronds-points de leur présence, et de procéder à autant d’arrestations que possible. »a déclaré le préfet lors d’une conférence de presse, ajoutant que des renforts « significatif » étaient arrivés et que d’autres arriveraient « dans les prochains jours »Un escadron de gendarmerie, soit une centaine de militaires, a déjà été envoyé en renfort.
Lors des violences à Fort-de-France, capitale de cette île des Antilles françaises d’environ 350 000 habitants, un McDonald’s du quartier de Dillon a été incendié dans la nuit de mardi à mercredi, laissant ses employés au chômage technique, et des barricades ont été incendiées.
Dans ce même quartier, un hypermarché Carrefour a été « envahi par une cinquantaine d’individus qui ont dressé une barricade sur le parking et ont tenté d’y mettre le feu »Les autorités ont rapporté à l’Agence France-Presse (AFP). En fuite à scooter au moment de la dispersion par la police, un homme est tombé, se blessant légèrement. Il a été interpellé.
Onze policiers blessés
Ces tensions s’inscrivent dans un mouvement de protestation contre la vie chère qui a débuté début septembre. En Martinique, selon une étude de l’Institut national de la statistique et des études économiques, en 2022, les prix des denrées alimentaires étaient 40 % plus élevés qu’en France métropolitaine.
Depuis le début du mouvement, « quarante-quatre véhicules » ont été incendiés et « 35 locaux commerciaux privés attaqués »et les autorités ont procédé à « quinze arrestations »a détaillé M. Bouvier. Selon le préfet, « Onze policiers ont été blessés par balles » Et « trois émeutiers » ont également été blessés, dont un par balle.
« La cause est noble, mais la méthode, ce que nous vivons ici, discrédite le mouvement »a dénoncé, mercredi sur Franceinfo, Rosette Jean-Louis, présidente du conseil citoyen du quartier populaire de Sainte-Thérèse, l’un des plus touchés par les violences.
Ce quartier « n’est pas concerné par le couvre-feu. Je n’ai pas voulu pénaliser deux fois les citoyens qui y vivent, qui subissent déjà des violences, qui doivent parfois se déplacer, pour des raisons professionnelles, la nuit »a indiqué mercredi le préfet. Des violences avaient déjà éclaté à Sainte-Thérèse dans la nuit du 2 au 3 septembre, au cours desquelles des policiers avaient été pris pour cible à balles réelles.
Dans la nuit de vendredi à samedi, deux personnes ont ouvert le feu sur la façade du commissariat de Fort-de-France, sans faire de blessés. « Cette stratégie du chaos ne peut conduire à aucun résultat positif »a prévenu la préfecture.
Le Grand Port Maritime de la Martinique, par lequel transitent 98% des marchandises entrant ou sortant de ce territoire d’outre-mer, est également visé par le mouvement de contestation.
Objectif : aligner les prix sur ceux de la France
« Nous lançons depuis juillet, le 1er juillet plus précisément, des injonctions aux grandes enseignes pour leur demander d’aligner leurs prix sur ceux pratiqués en France métropolitaine. »Rodrigue Petitot, leader du Rassemblement pour la protection des peuples et des ressources afro-caribéennes (RPPRAC), a déclaré à l’AFP. « Nous sommes Français, nous avons les mêmes cartes d’identité, les mêmes amendes, les mêmes impôts, voire plus d’impôts, nous ne comprenons pas pourquoi, sur le sujet de l’alimentation, justement, nous ne pourrions pas avoir les mêmes prix »a critiqué M. Petitot, surnommé « le R » sur l’île.
Invités jeudi 12 septembre à une table ronde en préfecture avec l’ensemble des acteurs de la grande distribution et des institutionnels, les représentants du RPPRAC ont quitté les négociations au bout de cinq minutes lorsque le préfet a refusé de diffuser les échanges en direct sur les réseaux sociaux.
L’État, les distributeurs et les collectivités ont pour objectif de « 20% de baisse de prix en moyenne » de 2 500 produits de première nécessité. Pour lutter contre la vie chère, la collectivité territoriale de la Martinique s’est prononcée en faveur de la suppression des taux de la taxe maritime, taxe spécifique des DOM s’appliquant aux marchandises importées, sur plusieurs centaines de produits.