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En Martinique, l' »Armée du Ruban Rouge » bloque un supermarché pour dénoncer la vie chère


Article rédigé par

Robin Prudent – envoyé spécial en Martinique

France Télévisions

Publié


Temps de lecture : 4 min

Des manifestants devant le Carrefour Market du François, en Martinique, le 21 septembre 2024. (ROBIN PRUDENT / FRANCEINFO)

Plusieurs dizaines de manifestants du RPPRAC ont dressé un barrage routier devant le Carrefour Market du François ce samedi. Ils ont été rapidement délogés par les forces de l’ordre envoyées en renfort sur l’île.

Des chariots vides renversés pour bloquer l’accès au supermarché. Il n’est pas encore 8 heures du matin, samedi 21 septembre, mais plusieurs dizaines de manifestants se rassemblent déjà devant le Carrefour Market du François, en Martinique. L’objectif : empêcher l’ouverture du magasin afin de dénoncer le coût de la vie sur l’île. Un mode d’action qui se multiplie depuis le début du mouvement de contestation, entamé il y a plusieurs semaines. « Nous n’allons pas abandonner »assure Florence, bien décidée à se faire entendre face aux prix « qui ne sont plus raisonnables ».

A l’entrée du barrage, la photo d’un pack d’eau à 7,99 euros a été collée sur un panneau pour illustrer les prix pratiqués dans ce territoire d’outre-mer. Selon l’Insee, les produits alimentaires étaient « 40% plus cher en Martinique qu’en métropole » en 2022. Et l’inflation continue d’alourdir la facture des Martiniquais, avec une hausse des prix de 3,2% sur les douze derniers mois, soit un point de plus qu’en métropole.

Un panneau devant le Carrefour Market du François, en Martinique, le 21 septembre 2024. (ROBIN PRUDENT / FRANCEINFO)

« Je dois choisir entre payer mes courses et payer mon loyer »dit un manifestant, tout de rouge vêtu. En quelques mois, cette couleur est devenue le signe de ralliement du Rassemblement pour la Protection des Peuples et des Ressources Afro-Caribéennes (RPPRAC). C’est ce « L’Armée du Ruban Rouge »comme s’appelle le mouvement qui est à l’origine de cette mobilisation et des principales actions contre la vie chère qui secouent l’île depuis l’été.

« Nous avons les prix des denrées alimentaires de la Suisse… mais pas leurs salaires ! »« C’est une question de temps, ça ne fait aucun doute », affirme Rodrigue Petitot, le président du RPPRAC, coiffé d’un carré rouge. Et pour cause, en Martinique, le taux de pauvreté est presque deux fois plus élevé qu’en métropole, selon l’Insee. « Nous sommes ici parce qu’il faut stopper cette hémorragie des prix »dit cette figure du mouvement, que tout le monde surnomme « le R ».

Rodrigue Petitot en Martinique, le 21 septembre 2024. (ROBIN PRUDENT / FRANCEINFO)

C’est lui qui, à 6 heures du matin, a appelé à un rassemblement dans cette ville de 15 000 habitants, à une vingtaine de kilomètres de Fort-de-France. Le lieu n’a pas été choisi au hasard. La ville ne fait pas partie des quatre communes dans lesquelles se déroule le rassemblement. « manifestations et rassemblements de protestation » sont désormais interdites par un arrêté préfectoral publié la veille.

Cela n’a pas empêché une intervention rapide des forces de l’ordre. Vers 8h40, environ 45 gendarmes du département et du groupe mobile sont venus dégager l’accès au supermarché. En quelques minutes, la barrière a été levée et les camionnettes bleues se sont placées entre les manifestants habillés en rouge et le supermarché. « Ce déploiement de force est disproportionné, Manifestation de Rodrigue Petitot, diffusée en direct sur TikTok. « C’est une forme de violence contre un peuple pacifique. »

Même si le déploiement des forces de l’ordre a rapidement tendu l’ambiance sur place, aucune violence n’est venue perturber l’action des gendarmes. Ces derniers, armés de lanceurs de balles de défense (LBD), n’ont pas bronché face aux interpellations des manifestants, dont beaucoup ont filmé la scène et affiché leur numéro d’identification RIO. « Il n’y a eu aucun contact physique avec les manifestants, nous avons simplement dégagé l’accès pour permettre au magasin d’ouvrir et à ses employés de venir travailler »commente le lieutenant-colonel Franck, dont le groupe mobile est déployé sur l’île depuis plusieurs jours.

Au fur et à mesure que la matinée avance, les affrontements continuent, au rythme de la musique caribéenne jouée par les manifestants. « Les voleurs sont derrière toi ! »crie une femme, à quelques centimètres des militaires. Derrière le magasin, tous les grands distributeurs installés sur l’île sont pointés du doigt lors de ces mobilisations. « Ce sont eux qui gouvernent et qui possèdent toutes les richesses ici. »dit un autre manifestant, en t-shirt rouge.

Ce Carrefour Market a ainsi été pris pour cible car, comme tous ceux de l’île, il appartient au Groupe Bernard Hayot (GBH), également propriétaire des enseignes Euromarché, Décathlon, Monsieur Bricolage, ainsi que des principaux réseaux de distribution automobile de l’île. Une concentration, héritée de l’époque coloniale, qui alimente la colère des habitants. « Nous demandons une maîtrise de leurs marges et un alignement des prix sur la France »explique Aude Goussard, secrétaire et membre fondatrice du mouvement.

Des revendications que le RPPRAC espère pouvoir faire entendre auprès des autorités de l’île. Une nouvelle table ronde sur le coût de la vie devrait prochainement être organisée par la préfecture. « Nous voulons participer, mais nous demandons que tout le monde puisse être présent. »explique Rodrigue Petitot, qui a déjà quitté les négociations à plusieurs reprises ces dernières semaines, faute de pouvoir les filmer et les diffuser en direct. Il prévient : « S’ils continuent à essayer de nous museler, nous ne viendrons plus à la table des négociations, nous la renverserons ! »

francetvinfo

Malagigi Boutot

A final year student studying sports and local and world sports news and a good supporter of all sports and Olympic activities and events.
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