C’est une décision qui pourrait faire verser encore plus d’or à la figure de proue du saut à la perche mondial, le Suédois Armand Duplantis, qui a une nouvelle fois battu son record du monde, samedi 20 avril à Xiamen (Chine), pour l’ouverture de la Diamond League. Alors que les têtes d’affiche de l’athlétisme entament leurs derniers préparatifs, à moins de cent jours des Jeux olympiques de Paris – qui se tiendront du 26 juillet au 11 août 2024 – la Fédération internationale de la discipline reine a annoncé la mise en place de primes, qui permettront être versée aux médaillés d’or aux prochains Jeux olympiques.
Un pécule de 50 000 dollars (47 000 euros) par athlète victorieux, qui ravit surtout ceux qui en bénéficieront, mais inquiète les autres fédérations, autant que les instances olympiques. Pour l’association regroupant les sports olympiques d’été (ASOIF), qui n’a pas été consultée en amont, cette initiative « soulève des questions plus complexes qu’il n’en répond »et elle a l’intention d’informer World Athletics de la « préoccupations » de ses fédérations membres.
Incapables d’accorder de telles sommes aux athlètes sous leur contrôle, ces autres fédérations sportives ont exprimé un certain mécontentement. « La proposition n’a pas été discutée » avec le reste du mouvement olympique, a déploré jeudi David Lappartient, président de l’Union cycliste internationale (UCI) et du Comité national olympique et sportif français (CNOSF), regrettant un « changement dans les valeurs olympiques ».
« Bon progrès »
Ce coup de projecteur inattendu intervient alors que l’élite de l’athlétisme se retrouve dès samedi 20 avril à Xiamen (Chine), pour le premier rendez-vous de la Diamond League. Un gros rodage pour les stars de la piste, avant l’inévitable échéance estivale.
Si la lumière apportée par le nouveau record du monde d’Armand Duplantis aurait suffi à attirer l’attention, ces primes ne sont cependant pas boudées par les principaux intéressés, qui y voient une très bonne initiative. A commencer par l’ancien rival du perchiste suédois, le champion olympique français Renaud Lavillenie, titré aux Jeux de Londres en 2012 : « C’est bon progrès, (OMS) augmentera l’importance d’une performance gagnante. »
Mais cet éloignement croissant de l’amateurisme, au cœur de la fondation des Jeux modernes par Pierre de Coubertin, soulève de nombreuses questions. L’Association des Comités Nationaux Olympiques d’Afrique (Acnoa) estime par exemple que cette mesure va à l’encontre du principe de « solidarité »pointant en particulier vers le plan de sauvetage « comptes bancaires d’athlètes non nécessiteux plutôt que d’aider ceux qui en ont le plus besoin ».
Pression exercée sur d’autres sports
Il reste difficile, voire inatteignable pour certaines disciplines, d’espérer voir émerger des figures comme la sprinteuse américaine Sha’Carri Richardson, ou le recordman « Mondo » Duplantis. Ces primes pourraient ainsi créer des situations conflictuelles, comme le relève le patron du Comité olympique britannique, Andy Anso, à la chaîne Sky Sports : « Il est clair que d’autres sports vont faire l’objet d’une surveillance accrue et même de pressions de la part d’athlètes qui diront : « Qu’en est-il de notre sport, comment se fait-il que ce sport puisse le faire et nous pas ? » « . Avant d’ajouter. » C’est un débat que nous pouvons avoir, mais nous devons le mener au bon moment, au bon endroit et ensemble. »
Pour l’instant, aucune fédération internationale n’a annoncé vouloir imiter World Athletics. Le court de tennis a indiqué qu’un tel plan devrait être « conçu en consultation avec l’ASOIF et le Comité International Olympique »et la basketteuse a rappelé qu’elle soutenait déjà « ses fédérations membres de diverses manières, pour couvrir leurs frais d’organisation ou de participation à des concours de sélection. »
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De toute façon, peu d’organismes sportifs pouvaient offrir de telles récompenses à leurs athlètes, la fédération internationale d’athlétisme étant l’un des membres les mieux dotés par le CIO, aux côtés de la gymnastique et de la natation, en plus de ses ressources propres, des droits TV de ses compétitions.
Il n’en reste pas moins que même si jusqu’à présent les instances internationales n’ont rien versé aux athlètes dans leurs sports, les primes de médailles sont une pratique courante dans de nombreux pays. A commencer par la France, où un titre aux JO de Paris devrait rapporter environ 80 000 euros aux athlètes vainqueurs (et respectivement 40 000 et 20 000 euros pour les médaillés d’argent et de bronze). Contacté par l’Agence-France-Presse, World Athletics a défendu son « un engagement sans faille envers les sportifs »juger » important « faire don d’une partie des revenus olympiques « à ceux qui font des Jeux le spectacle qu’ils sont ».