L’actrice française, qui a récemment révélé les agressions sexuelles qu’elle a subies dans le milieu du cinéma, s’est montrée très émue en évoquant le soutien qu’elle reçoit depuis.
La scène était soudain remplie d’émotions. Juliette Binoche était l’invitée de l’émission Cliquez sur TVmardi 30 avril. A cette occasion, le présentateur Mouloud Achour a interrogé l’actrice sur la chronique publiée par le magazine ELLE , le même jour, au cours duquel une centaine d’hommes, principalement issus de l’industrie culturelle, ont apporté leur soutien au mouvement Me Too. Parmi eux, les acteurs et réalisateurs Mathieu Amalric et Cyril Dion, l’acteur Reda Kateb et le réalisateur Abderrahmane Sissako. « Est-ce important que les hommes parlent ? », a demandé le présentateur à l’icône française. «C’est fondamental», répond-elle sans hésiter. Parce qu’à partir du moment où on est entendu, écouté, d’abord on existe différemment, et la douleur, si elle est entendue, ça fait un peu moins mal. Venant de l’actrice, ces mots puisent dans son expérience, elle qui s’est longuement confiée au journal Libérer sur le harcèlement et les agressions sexuelles subies lors du tournage du film, mais aussi à l’extérieur.
Faisant écho à cet entretien publié le 27 avril, Mouloud Achour lui a alors demandé si elle avait depuis reçu le soutien de certains acteurs du cinéma. « Surtout les réalisateurs et Claire Denis », a répondu Juliette Binoche, en nommant le réalisateur pour lequel elle a joué dans Un si beau soleilsorti en 2017. Lorsque le présentateur l’interroge sur la nature de ce soutien, la comédienne cite les mots que lui a adressés le scénariste Christophe Honoré et qu’elle qualifie de « quelque chose de simple mais qui m’a vraiment fait du bien ». « Tu n’aurais pas dû vivre ça », dit-elle, submergée par l’émotion. Alors que les larmes lui montent aux yeux, Mouloud Achour répond : « C’est ce qu’on pense tous » et ajoute qu’il se demande comment l’actrice a pu vivre ça et pourquoi.
«On se comprend mieux»
La voix tremblante et les yeux humides, Juliette Binoche a quand même réussi à reprendre la parole. « En même temps, je pense que ça m’a rendue plus forte, parce que ça me rend plus courageuse, parce que ça me rend plus humaine », a-t-elle d’abord ajouté, se contenant difficilement. « Quand nous éprouvons de la souffrance, de la douleur ou des difficultés, cela crée certainement des défauts en nous car cela brise, cela trahit, cela maltraite », a-t-elle poursuivi en pesant chacun de ses mots. Mais en même temps on comprend, il y a quelque chose qui fait qu’on sait ce que c’est que souffrir, on comprend mieux l’autre du coup. On est plus capable d’avoir de la porosité, de la compassion, ça nous permet d’être plus humains parce qu’il faut briser tellement de fierté, tout ce qui nous rend un peu rigides.
Dans son entretien avec Libérer, Juliette Binoche a toutefois assuré que ces traumatismes n’avaient pas entaché sa passion pour le cinéma. « Les coups bas, les gestes déplacés, les propos sexistes : je ne les oublie pas, ils empoisonnent la vie, mais ils restent secondaires. Finalement, tout est pardonné. Tout se transforme, tout m’a sculpté. L’envie de se donner par le jeu reste plus forte, l’art du jeu est une forme de savoir secret jubilatoire, impossible à saisir, impossible à voler.